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Géologie de la région de la rivière Arnaud, provinces du Supérieur (Minto) et de Churchill (Fosse du Labrador), secteur de Kangirsuk, Nunavik, Québec, Canada

Projet visant les feuillets 24M, 24N, 25C et 25D
Carl Bilodeau et Emmanuel Caron-Côté
BG 2018-04
Publié le  

 

 

 

 

 

 

 

L’Essentiel

Un levé géologique a été réalisé durant l’été 2017 dans la région de Kangirsuk afin de cartographier l’extrémité nord de la Fosse du Labrador et une partie de la Sous-province archéenne de Minto. Les travaux de terrain et l’interprétation des résultats du levé aéromagnétique de haute résolution ont permis d’améliorer la carte géologique et de mettre en valeur le potentiel minéral de cette région.

Cette partie de la Fosse du Labrador est composée d’une succession de roches sédimentaires déposées dans un contexte de marge continentale et de plate-forme (formations de fer et turbidites), surmontées d’unités marines (basaltes et shales noirs). Les roches sont par endroits injectées de filons-couches mafiques et ultramafiques. L’ensemble repose en contact discordant sur des roches gneissiques et plutoniques archéennes renfermant des lambeaux de roches supracrustales archéennes (amphibolites, paragneiss et formations de fer). Ces unités ont été pour la plupart déformées et métamorphisées lors de l’Orogenèse du Nouveau-Québec (1,82 à 1,77 Ga).

Les principaux types de minéralisations rencontrés dans la Fosse du Labrador incluent les sulfures massifs associés aux roches volcaniques mafiques et les minéralisations de Ni-Cu-EGP associées aux filons-couches ultramafiques. On note également des minéralisations de sulfures associées à une remobilisation hydrothermale localisée en marge d’amas sulfurés et de fronts de chevauchement. Plusieurs nouveaux indices de fer ont été reconnus dans les formations paléoprotézoïques et archéennes, dont certaines présentent un potentiel aurifère.

Méthode de travail

Les travaux dans la région de Kangirsuk ont été réalisés selon la méthodologie prescrite par le Ministère pour les levés effectués dans les milieux isolés.

Les travaux ont bénéficié d’un récent levé aéromagnétique de haute résolution (Benahmed et Intissar, 2015). Les cartes issues de ces levés ont permis d’identifier des secteurs où les contacts des unités lithostratigraphiques reconnues antérieurement ne concordaient pas avec leur signature magnétique. Deux secteurs en particulier ont fait l’objet d’une révision en profondeur, soit :

  • le secteur localisé à l’ouest de Kangirsuk (feuillets SNRC 24M14 à 24M16 et 25D01) caractérisé par de nombreux lambeaux de roches supracrustales archéennes (Complexe d’Arnaud);
  • la Fosse du Labrador au sud de la rivière Arnaud (feuillets SNRC 24N12 et 24N13).

Des images satellitaires à haute résolution (Pléiades) a été acquises dans la Fosse du Labrador au nord de la rivière Payne (portion ouest du feuillet 25C04, 25D01 et portion sud de 25D08). Ces images ont permis de raffiner la carte géologique existante et de mieux cibler les zones rouillées et les sites de minéralisations potentielles.

La cartographie du secteur a permis de produire et de mettre à jour les éléments d’information présentés dans le tableau ci-dessous :

Données et analyses
Éléments Nombre
Affleurements décrits (géofiches) 1 163
Analyses lithogéochimiques totales 249
Analyses lithogéochimiques des métaux d’intérêt économique 227
Analyses géochronologiques 3
Lames minces standards 166
Lames minces polies 48
Fiches du lexique stratigraphique 11
Fiches de substances métalliques 74

Travaux antérieurs

Travaux antérieurs dans la région d’étude
Auteur(s) Type de travaux Contribution
Bergeron, 1957 Travaux cartographiques Géologie de la région de Brochant-de-Bonnard
Hardy, 1976 Travaux cartographiques Géologie de la région des lacs Roberts et des Chefs
Madore et al., 1999 Travaux cartographiques Géologie de la région du Lac Peters (feuillet 24M)
Madore et Larbi, 2000 Travaux cartographiques Géologie de la région de la rivière Arnaud (SNRC 25D) et des régions littorales adjacentes (feuillets 25C, 25E et 25F)
Clark et Wares, 2004 Synthèse Synthèse lithotectonique et métallogénique de l’Orogène du Nouveau-Québec (Fosse du Labrador)
Simard et al., 2008 Synthèse Synthèse du nord-est de la Province du Supérieur
Clark, 1987 Évaluation du potentiel minéral Éléments du groupe du platine dans la Fosse du Labrador
Labbé et Lacoste, 2001 Évaluation du potentiel minéral Environnements propices aux minéralisations polymétalliques de type volcanogène dans le Grand-Nord québécois
Lamothe, 2013 Évaluation du potentiel minéral Évaluation du potentiel en minéralisations de sulfures massifs volcanogènes de type pélitique-mafique pour la Fosse du Labrador
Lacoste et Sharma, 2010 Étude pétrographique Assemblages minéralogiques, textures et faciès métamorphiques du nord-est de la Province du Supérieur
Ferron, 2003 Mémoire de maîtrise Corrélations structurales, stratigraphiques et métamorphiques des séquences paléoprotérozoïques de la Ceinture de Cape Smith et de la partie nordique de la Fosse du Labrador
Maurice, 2009 Thèse de doctorat Magmatisme mafique précambrien dans le nord-est de la Province du Supérieur
David et al., 2008 Étude géochronologique

Datations isotopiques effectuées dans le nord-est de la Province du Supérieur – Travaux de 1998, 1999 et 2000

Benahmed et Intissar, 2015 Levé géophysique Levé magnétique et spectométrique aéroporté dans le secteur de la rivière Arnaud, côte nord-ouest de la baie d’Ungava
Intissar et al., 2015 Interprétation des données géophysiques Interprétation qualitatives des données aéromagnétiques dans les secteurs des rivières Buron et Brochant, côte ouest de la baie d’Ungava
Benahmed et al., 2016 Interprétation des données géophysiques Interprétation qualitatives des données aéromagnétiques et spectrométriques dans les secteurs des rivières Arnaud et Laflau, côte ouest de la baie d’Ungava

Lithostratigraphie

Cette section propose une description sommaire des unités lithostratigraphiques rencontrées dans la région de Kangirsuk à l’été 2017. Une description complète et à jour de ces unités et les données géochronologiques associées sont disponibles dans le lexique stratigraphique à l’aide des hyperliens ci-dessous.

Le projet Arnaud est situé dans la région de Kangirsuk. Il couvre l’extrémité nord des unités paléoprotérozoïques de la Fosse du Labrador (Province de Churchill) et une partie du nord-est de la Sous-province archéenne de Minto (Province du Supérieur).

La chronologie de mise en place de ces unités est illustrée dans le schéma stratigraphique. Cette interprétation a été établie à partir des données historiques, des relations stratigraphiques et de recoupements observés sur le terrain, ainsi que des données de géochronologie U-Pb et Pb-Pb disponibles. La puissance relative et la dimension des unités sont proportionnelles aux superficies cartographiées.

La Province du Supérieur

Les unités archéennes de la région de Kangirsuk appartiennent à la Sous-Province de Minto de la Province du Supérieur (Simard et al., 2008). Elles consistent en un socle gneissique et plutonique (Suite de Faribault-Thury, complexes de Troie et de Qimussinguat) renfermant des zones riches en lambeaux de roches volcano-sédimentaires plus anciennes (Complexe d’Arnaud). Toutes ces unités sont coupées par des intrusions felsiques (Suite de Leridon) et par deux générations de dykes mafiques paléoprotérozoïques, les Dykes de Klotz et les Dykes de la Rivière Payne.

Les unités archéennes

La Suite de Faribault-Thury (nAfth; 2785 à 2751 Ma) représente l’unité de roches archéennes la plus abondante de la région. Elle se compose d’unités de type TTG (tonalite-trondhjémite-granodiorite) dominées par la tonalite gneissique ou foliée (nAfth1) et, en moindre proportion, de tonalite gneissique riche en enclaves mafiques (nAfth1a) ou de trondhjémite (nAfth1b). La Suite de Faribault-Thury ceinture les complexes de Troie (mAtie) et de Qimussinguat (mAqim) qui sont interprétés comme des unités similaires présentant un grade de métamorphisme plus élevé.

Le Complexe d’Arnaud (mAarn; Simard et al., 2008) regroupe les plus vieilles roches de la région (2870 à 2718 Ma) et se compose majoritairement d’amphibolite et de gneiss mafique mélanocrate (mAarn2), de formations de fer (mAarn4), de paragneiss, de diatexite, de quartzite, de marbre et de roches calcosilicatées (mAarn5). On trouve également des roches ultramafiques (mAarn1), des dacites et des rhyodacites (mAarn3) en moindre proportion. Cette unité forme d’importantes enclaves dans la Suite de Faribault-Thury et dans les complexes de Troie et Qimussinguat. Le Complexe d’Arnaud est également coupé par des intrusions appartenant à ces trois mêmes unités.

La Suite de Leridon (nAlrd; 2735 à 2720 Ma) comprend plusieurs intrusions de granodiorite et de granite massifs à foliés (nAlrd1), de granite porphyroïde (nAlrd2), de monzonite et de monzonite quartzifère porphyroïde (nAlrd2a). Ces roches forment des intrusions d’envergure kilométrique dispersées dans la Suite de Faribault-Thury.

Les unités paléoprotérozoïques

Les Dykes de Klotz (pPktz; 2209 Ma), d’orientation WNW-ESE et l’important essaim de Dykes de la Rivière Payne (pPpay; 2170 et 2160 Ma), d’orientation NNW-SSE, regroupent des dykes de gabbro ouralitisé qui coupent toutes les unités archéennes de la région. Ces dykes se sont possiblement mis en place lors du rifting initial de la Fosse du Labrador (Madore et Larbi, 2000).

La Province de Churchill

Les unités paléoprotérozoïques de la région de Kangirsuk appartiennent à la Fosse du Labrador et à la Zone noyau de la Province de Churchill. Les unités de la Fosse du Labrador appartiennent au Groupe de Ferriman du deuxième cycle volcano-sédimentaire et forment une séquence normale en discordance sur les roches de la Province du Supérieur. L’empilement se compose, de la base au sommet, d’arénites (Formation de Wishart), de formations de fer (Formation de Sokoman), de turbidites (Formation de Menihek) et de basaltes (Formation d’Hellancourt). La séquence est injectée de filons-couches mafiques et ultramafiques (Suite intrusive de Gerido) et de l’Intrusion mafique de la Baie Kyak. La Zone noyau est en contact tectonique avec la Fosse du Labrador et est interprétée comme des terrains archéens remaniés au Paléoprotérozoïque.

Les unités de la Fosse du Labrador

La Formation de Wishart (pPwi) est une unité de quelques mètres de puissance formée d’arénite quartzitique, localement de wacke et de rares niveaux de conglomérat. Elle est surmontée par les shales et les grès ferrifères de la Formation de Ruth (non rencontrés dans le secteur cartographié) et les unités ferrifères de la Formation de Sokoman (pPso; 1880 Ma). Le Sokoman, caractérisé par une très forte anomalie aéromagnétique, est principalement composé d’un faciès à oxydes (pPso1) à la base et d’un faciès silico-carbonaté (pPso2) au sommet. Un faciès silicaté (pPso5) peut également être observé à la base de la formation, en contact avec le Wishart, ou en interlits dans le faciès silico-carbonaté. La Formation de Sokoman peut aussi reposer en discordance sur les roches de la Province du Supérieur. La Formation de Menihek (pPme1) est en contact normal et franc avec le Sokoman et se compose de wacke, de silstone, de phyllade et d’un peu d’arénite ainsi que d’un niveau de dolomie gréseuse. L’unité informelle pPme5 réunit des schistes à quartz-biotite-muscovite-chlorite-grenat interprétés comme des équivalents plus métamorphisés de l’unité pPme1.

La Formation d’Hellancourt (pPhe), principalement formé de basalte, surmonte le Menihek avec qui elle est en contact interdigité. La base de l’unité est caractérisée par une abondance de filons-couches mafiques d’aspect mouchetée (pPhe et pPhe5) dont la fréquence diminue progressivement vers le sommet de l’unité au profit des basaltes présentant des faciès massif (pPhe2), puis coussiné (pPhe1). Le sommet de la formation est marqué par une alternance de basalte coussiné et de niveaux de mudrock (pPhe3) et des lentilles de sulfures disséminés à massifs. Les zones affectées par un métamorphisme plus élevé présentent des amphibolites (pPhe6) interprétées comme des équivalents des faciès basaltiques. L’Hellancourt est injecté par les filons-couches de gabbro différenciés de la Suite intrusive de Gerido (pPgrd) et par l’Intrusion tardive de la Baie Kyak (pPkya). Les gabbros du Gerido sont coupés par des filons-couches ultramafiques associés à des minéralisations nickélifères. La signature aéromagnétique des filons-couches de gabbro de l’Hellancourt (pPhe5) et du Gerido (pPgrd2 et pPgrd5) ne se distingue pas de celle des basaltes, contrairement aux filons-couches ultramafiques (pPgrd1) caractérisés par de fortes anomalies positives et l’Intrusion de la Baie Kyak qui se démarque par une anomalie de forme ovoïde.

Les unités de la Zone noyau

Les terrains situés à l’est de la Fosse du Labrador sont composés de roches gneissiques et plutoniques et de dykes d’amphibolite d’origine et d’affiliation indéterminées. On y trouve également des séquences métasédimentaires renfermant des formations de fer et des wackes similaires à ceux de la Fosse du Labrador. Cette zone n’a pas fait l’objet de travaux approfondis.

Géologie structurale

La région de Kangirsuk se subdivise en trois domaines structuraux et un couloir de déformation :

  1. le Domaine de Douglas-Harbour (Sous-Province de MintoProvince du Supérieur);
  2. le Domaine de Payne (Fosse du LabradorProvince de Churchill);
  3. le Domaine de Bonnard (Zone noyau – Province de Churchill);
  4. le Couloir de déformation de Virgin.

Les domaines de Douglas-Harbour et de Payne sont délimités par une discordance stratigraphique localement cisaillée. La limite entre les domaines de Payne et de Bonnard correspond au Couloir de déformation de Virgin, une zone de chevauchement et de cisaillement dextre.
 

La région a été affectée par au moins deux épisodes de déformation :

  1. au moins deux phases de raccourcissement archéennes affectant le Domaine de Douglas-Harbour;
  2. une phase de raccourcissement (D1) et une phase en régime de transpression (D2) qui se sont déroulées durant l’Orogenèse paléoprotérozoïque du Nouveau-Québec entre 1,82 et 1,77 Ga (Clark et Wares, 2004). Ces épisodes touchent les domaines de Payne, de Bonnard et la partie est du Douglas-Harbour (1b).

Province du Supérieur

Domaine structural de Douglas-Harbour – partie ouest (1a)

La partie ouest du Domaine de Douglas-Harbour (1a) a été affectée par au moins deux phases de plissement archéennes. La carte aéromagnétique permet de reconnaître l’arrangement structural des unités, notamment le schéma de déformation complexe dans les lambeaux de roches supracrustales du Complexe d’Arnaud (mAarn). La présence locale de structures en crochets et en dômes indique une histoire structurale complexe, mais seulement une fabrique et deux phases de plissement ont été reconnues.
La principale phase de déformation a produit des plis ouverts à serrés d’orientation NE-SW et d’amplitude kilométrique. Ces plis ont été repris par une seconde phase de plis ouverts à serrés, droits ou légèrement déjetés avec des traces axiales NNE-SSW. Selon Madore et Larbi al., (2000), ces structures ont localement été affectées par une phase de cisaillement ductile N-S visible tant à l’échelle de l’affleurement qu’à l’échelle de la carte.
La principale structure planaire mesurée sur les affleurements est une gneissossité plissée, à pendage abrupt et localement injectée de mobilisat quartzofeldspathique. Cette foliation est interprétée comme une fabrique de première génération, recristallisée et transposée parallèlement aux contacts des unités supracrustales. Les zones de cisaillement sont caractérisées par la présence d’une linéation minérale définie par l’orientation des minéraux métamorphiques ou ferromagnésiens (Madore et Larbi, 2000).

Domaine structural de Douglas-Harbour – partie est (1b)

La partie est du Domaine de Douglas-Harbour (1b) comprend les mêmes éléments structuraux archéens que la partie ouest du domaine auxquels se superpose une phase de plissement et une fabrique associées à l’Orogenèse paléoprotérozoïque du Nouveau-Québec. L’étendue de sa zone d’influence est incertaine, mais on assume que la limite devrait se situer à environ 20 km au sud-ouest du Domaine de Payne.
La phase de déformation paléoprotérozoïque est particulièrement évidente au sud de la rivière Arnaud où elle se manifeste notamment dans les charnières des plis régionaux affectant les unités paléoprotérozoïques. Cette déformation s’exprime par le plissement et l’oblitération de la gneissossité archéenne reprise par la déformation paléoprotérozoïque en bordure des plis.
Certains dykes de gabbro (pPpay) de la partie est du Domaine de Douglas-Harbour présentent une schistosité au même titre que la tonalite encaissante. Cette fabrique marque les traces axiales des plis fermés à serrés d’orientation NW-SE affectant notamment les lambeaux supracrustaux du Complexe d’Arnaud. Elle correspond également à l’orientation de la schistosité axiale des plis majeurs du Domaine de Payne. Ces observations corroborent celles de Madore et Larbi (2000) qui avaient noté l’apparition de nouveaux clivages et une augmentation de la densité de failles dans les unités archéennes à l’approche du Domaine de Payne.

Province de Churchill

La totalité de la Province de Churchill (Fosse du Labrador et Zone noyau) a été affectée par l’Orogenèse du Nouveau-Québec. La direction des contraintes tectoniques a évolué dans le temps, modifiant le style tectonique (Madore et Larbi., 2000).

Cet événement est associé à moins deux phases de déformation distinctes :

  1. une phase de raccourcissement liée à une génération de failles de chevauchement et de plis régionaux;
  2. un épisode tectonique en transpression à l’origine du chevauchement des roches du Domaine de Bonnard sur celles du Domaine de Payne, via le Couloir de déformation de Virgin, accompagné d’un décrochement dextre le long de cette dernière structure.

Une phase antérieure à ces deux phases de déformation a été mise en évidence dans la partie nord du Domaine de Payne (Madore et Larbi, 2000; Ferron, 2003). Cette phase n’a pas été reconnue dans la région cartographiée en 2017.

Domaine structural de Payne (2)

Le Domaine de Payne a été affecté par au moins deux épisodes majeurs de déformation associés à l’Orogenèse du Nouveau-Québec (1,82 et 1,77 Ga; Clark et Wares, 2004). La phase de raccourcissement D1 a produit des chevauchements et des plis régionaux, dont le principal est le Synclinal de Roberts situé au nord de la rivière Arnaud. Les roches du Domaines de Payne reposent en discordance angulaire sur les roches archéennes de la partie est du Domaine de Douglas-Harbour. La discordance est généralement préservée dans la partie ouest du domaine, à l’exception de certains segments fortement cisaillés dans la portion nord du Synclinal de Roberts (Hardy, 1976). La réorientation des contraintes tectoniques a entraîné un épisode de déformation en transpression D2 affectant la marge orientale du Domaine de Payne. Cet épisode se traduit par la formation de plis locaux, d’imbrications, de couloirs de cisaillement dextre et par le chevauchement du Domaine de Bonnard sur le Payne. La limite est du Domaine de Payne est cisaillée sur toute sa longueur et correspond au Couloir de déformation de Virgin.

Phase de déformation D1

Le Domaine de Payne est affecté par un épisode de raccourcissement D1 qui se traduit par des failles de chevauchements à vergence SW produisant des imbrications parallèles au litage S0. Les unités et les failles sont ensuite reprises par le plissement régional (P1) qui est responsable de la formation d’une série de synclinaux et d’anticlinaux déversés à plongement SE, dont le Synclinal de Roberts. La fabrique associée à cet épisode est une schistosité de plan axial (S1) d’orientation 335°. Cette fabrique est particulièrement marquée le long du contact basal de la séquence basaltique de la Formation d’Hellancourt (unités pPhe) avec les roches sédimentaires du Menihek (pPme), ce qui semble indiquer l’existence d’un décollement à l’interface des roches sédimentaires et des volcanites. Outre la schistosité S1, les principaux éléments structuraux mesurés sont les axes de plis, la linéation d’intersection entre le litage et la schistosité ainsi que l’allongement de nodules de carbonates dans les formations de fer du Sokoman. Ces nodules définissement une linéation avec un plongement variant de 10 à 60° vers le NE ou le SW, ce qui démontre que l’épisode de chevauchement précède le plissement.
Des plis de grande amplitude, droits ou légèrement déjetés vers le SE avec des traces axiales orientées NE-SW, ont été reconnus au nord du lac Roberts. L’orientation de ces plis et l’étirement minéral associé plongeant faiblement vers le NW pourraient indiquer une possible phase de décollement antérieure à la formation du Synclinal de Roberts et aux structures associées à la phase D1 (Madore et al., 2000).

Phase de déformation D2

La partie orientale du Domaine de Payne est affectée par un second épisode de déformation D2 découlant d’un régime tectonique en transpression. Cette phase est responsable de la formation de plis serrés asymétriques (P2) de 30 à 300 m d’amplitude et d’orientation 155°, subparallèles aux traces axiales des plis P1. Les secteurs affectés par les phases de plissement P1 et P2 présentent des schémas d’interférence en crochets ou en petits dômes et bassins allongés. Cette génération de plis est associée à une schistosité S2 qui transpose la schistosité S1. L’intensité de la déformation s’intensifie à l’approche du Domaine de Bonnard et du Couloir de déformation de Virgin, notamment par l’apparition de zones de cisaillement dextre de puissance hectométrique.

Domaine structural de Bonnard (4)

Le Domaine de Bonnard regroupe des unités gneissiques recristallisées de la Zone noyau et au moins deux bandes plissées de roches métasédimentaires d’affiliation incertaine. Ces dernières unités ont toutefois été attribuées à la Fosse du Labrador en raison de la présence de formation de fer à oxydes, mais pourraient également représenter une extension de la Supersuite de Laporte (pPlpt). Elles sont interprétées comme des cœurs de synclinaux, mais leur arrangement structural reste à définir. Ces roches métasédimentaires sont recristallisées avec une foliation principale parallèle à la fabrique du domaine et sont injectées par du matériel felsique syntectonique à post-tectonique. Le Domaine de Bonnard renferme également des équivalents métamorphisés des Dykes mafiques de la Rivière Payne, présents sous la forme de boudins d’amphibolite concordants à la foliation (Madore et Larbi., 2000).

Couloir de déformation de Virgin (3)

Le Couloir de Virgin regroupe les zones de déformation affectant les roches volcano-sédimentaires localisées à la limite orientale du Domaine structural de Payne au contact avec les roches gneissiques de la marge occidentale du Domaine de Bonnard. Cette structure est le résultat d’une réorientation de la contrainte tectonique principale lors de l’épisode D2 de la collision entre ces deux domaines durant l’Orogenèse du Nouveau-Québec au Paléoprotérozoïque. Le Couloir de Virgin correspond à un important linéament aéromagnétique qui passe d’une direction NW-SE au nord de la rivière Payne à N-S au sud de cette rivière. Il se signale par la présence de zones de cisaillement, le resserrement des plis, le déversement local des unités et l’augmentation notable du degré de métamorphisme. Les roches sont intensément déformées et fortement injectées de veines de quartz boudinées ou démembrées, dont la plupart figurent des indicateurs cinématiques démontrant un décrochement dextre. Le Couloir de Virgin est composé de plusieurs familles de couloirs mylonitiques d’épaisseur décamétrique à hectométrique dans le Domaine de Bonnard. Ces zones subverticales et d’orientation 320° montrent une linéation d’étirement subhorizontale prédominante dans les unités archéennes (Madore et Larbi., 2000).

Métamorphisme

Toutes les unités de la région ont été métamorphisées, à l’exception d’une partie des dykes paléoprotérozoïques qui font intrusion dans le socle archéen. La Suite de Faribault-Thury et le Complexe d’Arnaud renferment peu de minéraux diagnostiques qui permettent de déterminer leur degré de métamorphisme. La présence de grenat, de muscovite, de biotite et d’amphibole, ainsi que la recristallisation des roches semblent indiquer des conditions du faciès des amphibolites. Les roches sont localement rétromorphisées au faciès supérieur des schistes verts ou au faciès inférieur des amphibolites. Une proportion importante de ces roches a subi une fusion partielle plus ou moins importante exprimée par la présence de 5 à 50 % d’injections de mobilisat felsique. Cette observation indique que ces roches ont probablement atteint le faciès supérieur des amphibolites. Ce phénomène est lié à l’Orogenèse du Nouveau-Québec qui affecte la partie est du socle archéen à l’approche de la Fosse du Labrador. Les zones de cisaillement associées sont constituées de schistes à muscovite, biotite, épidote et chlorite (Madore et Larbi, 2000). La partie ouest du socle a été porté à des conditions de pression et de température élevées du faciès des granulites (complexes de Troie et de Qimussinguat), comme en témoigne l’assemblage orthopyroxène-clinopyroxène-hornblende-plagioclase-quartz-biotite. Les monazites ont livré des âges métamorphiques de 2707 ±3 Ma et les titanites des âges de 2701 ±1 Ma (Madore et Larbi., 2000).

Les métabasaltes du Domaine de Payne sont composés d’actinote, de chlorite, d’épidote et de quartz, un assemblage caractéristique du faciès métamorphique des schistes verts. La majorité des roches métasédimentaires de cette partie de la Fosse du Labrador est issue de sédiments terrigènes et matures et, par conséquent, ne renferment pas de minéraux métamorphiques diagnostiques. La marge occidentale du Couloir de déformation de Virgin et le secteur au sud de la rivière Payne (secteur de la rivière Brochant) sont composés de roches portées au faciès supérieur des schistes verts jusqu’au faciès des amphibolites. Le grenat est ubiquiste dans les roches sédimentaires et les métabasaltes à microstructure granoblastique contiennent de la hornblende et du plagioclase. Les roches mafiques ceinturant le front de chevauchement à l’approche du Domaine de Bonnard renferment du grenat et localement de la staurotide, témoins de conditions de pression plus élevées. Le métamorphisme du Domaine de Bonnard n’est pas connu. La disparition des structures ignées originelles de ces roches laisse supposer des conditions métamorphiques élevées, sans toutefois atteindre le faciès supérieur des amphibolites puisqu’aucune évidence de fusion partielle n’a été reportée.

Géologie économique

Le secteur de Kangirsuk présente des zones favorables pour quatre types de minéralisation :

  • minéralisations de sulfures massifs de métaux usuels associées aux roches volcaniques mafiques;
  • minéralisations magmatiques de nickel-cuivre-EGP associées aux intrusions mafiques à ultramafiques;
  • formations de fer paléoprotérozoïques et archéennes avec un potentiel ferrifère et aurifère;
  • minéralisations épigénétiques de Cu associées aux couloirs de déformation;

Le tableau ci-dessous présente les résultats d’analyses pour les 74 zones minéralisées du secteur d’étude, incluant 15 nouveaux indices de substances métalliques et un nouvel indice de substance non-métallique découverts dans le cadre de nos travaux.

Zones minéralisées dans la région de Kangirsuk
Nom
Teneurs

 

 

Nouvelles zones minéralisées
Minéralisation de sulfures massifs de métaux usuels associée aux roches volcaniques
0,55 % Cu, 910 ppm Ni et 1 % S (E)

 

 

Minéralisation épigénétique de Cu associée à un couloir de déformation
0,8 % Cu et 1,2 % S (E)

 

 

Minéralisation épigénétique de Ni associée à des veines de quartz
0,32 % Ni et 0,15 % Co (E)

 

 

Minéralisation de corindon
76,7 % Al2O3 et 3,8 % TiO(E)

 

 

Formations de fer de type Algoma
31 % Fe (E)

 

 

32,7 % Fe (E)

 

 

30 % Fe (E)

 

 

35,5 % Fe (E)

 

 

33,5 % Fe (E)

 

 

32,3 % Fe (E)

 

 

34,5 % Fe (E)

 

 

32,4 % Fe et 12 ppb Au (E)

 

 

39,7 % Fe (E)

 

 

Formations de fer de type lac Supérieur
34,5 % Fe (E)

 

 

36 % Fe (E)

 

 

32,7 % Fe (E)

 

 

 

 

Nom
Teneurs

 

 

Zones minéralisées connues
Minéralisations de Ni-Cu-EGP associées aux intrusions mafiques à ultramafiques
0,43 % Ni (E); 0,61 % Ni (E); 1,29 % Cu et 0,54 % Ni, 0,1 ppm Pt et 1,25 ppm Pd (Bloc E); 0,75 % Cu, 0,98 % Ni et 1,55 ppm Pd (E)

 

 

0,31 % Ni et 558 ppm Cu (E); 0,25 % Ni et 0,15 % Cu, 0,09 ppm Pt et 0,06 ppm Pd (E)

 

 

0,20 % Ni, 0,70 % Cu, 0,14 ppm Pt et 0,69 ppm Pd (E); 0,42 % Ni, 0,38 % Cu, 0,11 ppm Pt et 0,58 ppm Pd (E)

 

 

0,62 % Cu et 0,58 % Ni sur 14,90 m (F); 0,83 % Cu et 0,82 % Ni sur 6,1 m (F); 1,42 % Ni, 0,18 % Co et 210 ppb Pd (E); 1,10 % Ni, 0,14 % Co et 0,28 % Cu (E)

 

 

1,12 % Ni et 0,05 % Cu (E)

 

 

1,17 % Ni (E); 1,07 % Ni et 2,00 % Cu (E); 0,55 % Ni et 0,56 % Cu sur 4,0 m (R); 0,58 % Ni sur 6,1 m (F).

 

 

1,24 % Ni et 0,22 % Cu (E); 0,65 % Ni et 0,58 % Cu (E); 2,90 % Ni et 0,13 % Cu (E); 1,66 % Ni et 0,15 % Cu (E); 1,10 % Ni, 0,31 % Cu et 0,20 % Co (E).

 

 

0,53 % Ni et 0,24 % Cu sur 13,9 m (F); 0,58 % Ni et 0,23 % Cu sur 9,3 m (F); 0,44 % Ni et 0,16 % Cu sur 289,0 m (F).

 

 

0,29 % Ni et 0,61 % Cu (E); 0,97 % Ni (E); 0,81 % Ni et 0,37 % Cu (E); 1,07 % Ni, 0,24 % Cu et 0,12 % Co (E).

 

 

2,10 % Ni, 0,09 % Cu et 0,15 % Co (E); 1,65 % Ni, 0,16 % Cu et 0,10 % Co (E); 0,82 % Ni et 0,71 % Cu (E).

 

 

6,50 % Ni, 0,5 ppm Pt et 0,32 % Co (E); 1,40 % Cu, 1,45 ppm Pt et 0,83 ppm Pd (E); 6,00 % Ni, 0,73 ppm Pt et 0,347 % Co (E); 7,10 % Cu et 0,41 % Ni (E).

 

 

1,77 % Ni et 0,11 % Co (E); 2,10 % Ni, 0,48 ppm Pt et 0,67 ppm Pd (E); 0,12 % Ni, 0,72 % Cu et 0,29 ppm Pd sur 3,0 m (R); 0,41 % Ni, 0,20 % Cu, 0,17 ppm Pt et 0,54 ppm Pd sur 2,0 m (R).

 

 

3,60 % Ni, 0,22 % Cu, 0,18 % Co, 0,68 ppm Pt et 2,35 ppm Pd (E); 0,56 % Cu, 0,56 % Ni et 0,04 % Co sur 0,46 m (F); 1,17 % Cu et 657 ppm Ni (E).

 

 

4,10 % Ni, 0,27 % Co et 0,99 ppm Pt (E); 3,25 % Ni, 0,14 % Cu, 0,17 % Co, 9 ppb Au, 0,42 ppm Pt, 0,11 ppm Pd et 68,69 % Fe2O3 (E).

 

 

0,99 % Ni, 0,41 % Cu, 0,12 ppm Pt et 0,35 ppm Pd (E); 0,73 % Cu et 0,96 % Ni (E); 1,22 % Ni (E); 1,15 % Ni (E); 1,21 % Ni (E); 2,30 % Cu (E).

 

 

0,40 % Cu, 0,34 % Ni et 0,43 ppm Pd (E); 0,32 % Ni, 0,43 % Cu, 0,33 ppm Pd et 67,80 % Fe2O3 (E); 0,27 % Ni, 0,21 % Cu, 0,41 ppm Pd et 65,57 % Fe2O3 (E).

 

 

0,34 % Ni, 1,40 % Cu et 72,90 % Fe2O3 (E); 1,45 % Ni, 0,32 % Cu, 0,18 % Co, 0,42 ppm Pt et 1,97 ppm Pd (E); 0,76 % Ni, 0,95 % Cu et 0,18 % Co sur 3,40 m (R).

 

 

0,32 % Ni, 0,53 % Cu et 0,37 ppm Pd (E); 0,40 % Ni, 0,40 % Cu et 0,60 ppm Pd (E); 0,38 % Ni, 1,00 % Cu et 0,44 ppm Pd (E); 1,12 % Cu sur 0,74 m (F).

 

 

0,88 % Ni, 0,27 % Cu, 0,08 % Co, 0,30 ppm Pt et 69,68 % Fe2O3 (E); 1,54 % Ni, 0,31 % Cu et 0,16 % Co (E); 0,49 % Ni, 0,72 % Cu et 0,34 ppm Pd sur 7,20 m (R).

 

 

10,35 % Cu, 0,44 % Ni, 0,72 ppm Pt, 4,86 ppm Pd, 21,3 ppm Ag et 31,38 % Fe2O3 (E); 3,33 % Ni, 0,61 % Cu, 0,16 ppm Pt, 0,33 ppm Pd, 8,4 ppm Ag et 59,71 % Fe2O3 (Bloc E).

 

 

0,28 % Ni (E); 0,26 % Ni, 0,35 % Cu, 0,10 ppm Pt et 0,26 ppm Pd (E).

 

 

1,17 % Cu et 11,3 ppm Ag (E).

 

 

Formations de fer de type lac Supérieur

 

 

(E) : Échantillon choisi; (R) : Rainure; (F) : Forage

Le tableau des analyses lithogéochimiques des métaux d’intérêt économique fournit la localisation, la description et les résultats d’analyse pour les échantillons choisis dans le but d’évaluer le potentiel économique de la région.

Nouvelles zones favorables à l’exploration pour les sulfures massifs à métaux usuels associés aux roches volcaniques mafiques

Dans le secteur de Kangirsuk, la Formation d’Hellancourt présente des zones favorables à l’exploration pour les métaux usuels (Cu-Zn). Ces zones minéralisées stratiformes sont généralement encaissées dans les basaltes coussinés (pPhe1) et consistent en des niveaux tabulaires de puissance métrique à décamétrique et d’étendue hectométrique à kilométrique.

Un important niveau minéralisé de ce type a été reconnu sur une distance d’environ 25 km sur la rive est de la rivière tributaire du lac Hardy. Il se trouve sur le flanc ouest du Synclinal de Roberts et longe le contact oriental du plus important filon-couche de Gerido de la région. Plusieurs autres niveaux de moindre importance sont localisés sur la rive nord de la rivière Arnaud, à l’est de Kangirsuk. Ces zones favorables sont généralement formées de basaltes silicifiés et minéralisés en pyrrhotite, de mudrocks pyriteux et graphiteux et de sulfures massifs à semi-massifs (PO-PY ± CP ± SP). Elles sont localement associées à des mudrocks intensément altérés en albite caractérisés notamment par de fortes teneurs en sodium (jusqu’à 9 % Na2O; échantillon 2017070539). Les basaltes silicifiés se présentent sous la forme de niveaux métriques à décamétriques contenant 1 à 20 % de pyrrhotite disséminée à grain très fin accompagnée de veinules millimétriques de chlorite noire. Les zones intercoussins montrent également un remplacement par du quartz et des carbonates. Les niveaux décimétriques à métriques de mudrock pyriteux contiennent de 1 à 20 % de pyrite automorphe à grain fin à moyen. Les sulfures semi-massifs à massifs en niveaux décimétriques à métriques se trouvent soit en contact avec les basaltes silicifiés, soit associés aux niveaux de mudrock pyriteux. Ces sulfures sont à granulométrie fine à très fine et présentent des structures laminées, massives ou bréchiques. La zone du lac Chaunet NE constitue un exemple de ce type de minéralisation. Cette minéralisation a été mise au jour lors des travaux d’exploration pour le nickel et le cuivre associés aux intrusions mafiques et ultramafiques de la région. Dans le secteur du lac Chaunet, des basaltes et des sédiments graphiteux et sulfurés ont rapporté des valeurs anomales en Cu, Zn et Au (Huot et al., 2011; Simard et al., 2012).

Les minéralisations de Ni-Cu-EGP associées aux intrusions mafiques et ultramafiques

Le Synclinal de Roberts dans la Fosse du Labrador est reconnu pour ses nombreuses minéralisations de Ni-Cu-EGP. Ces zones sont contenues dans les filons-couches mafiques et ultramafiques de la Suite intrusive de Gerido, ainsi que l’Intrusion de la Baie Kyak. Elles sont généralement formées de pyrrhotite, de chalcopyrite et de pentlandite.

 

Minéralisations associées aux filons-couches mafiques de la Suite intrusive de Gerido

Les filons-couches mafiques (pPgrd) s’injectent principalement dans les basaltes de la Formation d’Hellancourt et sont localement associés à des mudrocks pyriteux ou graphiteux et à des sulfures massifs à semi-massifs, lesquels pourraient avoir constitué la source du soufre à l’origine de la formation des minéralisations magmatiques. Les sulfures sont disséminés dans des gabbros, des péridotites et des pyroxénites. Les indices Lac ChaunetLac Chaunet 2 et Lac Chaunet Nord à une trentaine de kilomètres au nord-ouest de Kangirsuk, correspondent à ce type de minéralisation.

Minéralisations associées aux filons-couches ultramafiques de la Suite intrusive de Gerido

Les filons-couches ultramafiques (pPgrd1) constituent les unités encaissantes des indices de Qarqasiaq et de Tasikutaak. Ces filons-couches forment des intrusions différenciées et litées majoritairement composées de péridotite et, en moindre partie, de gabbro. Ils se trouvent dans le secteur du lac Quarqasiaq, au nord et au NW du lac Perron et au SW du lac Chaunet. À certains endroits, ils sont spatialement associés à des niveaux pélitiques pouvant représenter une source de soufre favorable à la formation des minéralisations magmatiques de Cu-Ni-EGP. Ces minéralisations présentent des similarités avec celles rencontrées à la mine Raglan (Huot et al., 2011). Elles se présentent sous la forme de lentilles de sulfures massifs, semi-massifs et disséminés de puissance métrique et d’extension latérale décamétrique. Les lentilles sont localisées au contact entre les péridotites et les basaltes encaissants ou dans une faille de chevauchement, ce qui a pu entraîner la remobilisation d’une partie de la minéralisation.

Intrusion de la Baie Kyak

L’Intrusion de la Baie Kyak (pPkya) correspond à une intrusion d’envergure kilométrique située au cœur du Synclinal de Roberts, au nord de Kangirsuk. Cette unité consiste en un stock différencié constitué de roches mafiques de composition variable (pPkya1) et, localement, de roches ultramafiques (pPkya2). Elle présente un litage magmatique avec une polarité vers le NW.

L’Intrusion mafique et litée de la Baie Kyak (pPkya) renferme les minéralisations du Lac Twin, de Muscox et du Sondage PB00-03 localisées près la base stratigraphique et dans la partie NE de l’intrusion. Les sulfures se trouvent sous une forme disséminée, réticulaire, semi-massive et massive. Les minéralisations sont à plusieurs endroits associées à des dykes ou à des lentilles de péridotite et de norite. L’analyse systématique du forage PB00-03 (Laporte et al., 2013) a permis d’obtenir des teneurs de 0,44 % Ni et de 0,16 % Cu sur 289 m.

Potentiel ferrifère et aurifère des formations de fer paléoprotérozoïques et archéennes

La Fosse du Labrador est reconnue pour ses gisements de fer exploités dans la Formation de Sokoman près de la ville de Schefferville. Le projet Hopes Advances regroupe plusieurs formations de fer dans la zone d’étude et a fait l’objet d’une étude de préfaisabilité en 2014. Ces travaux ont identifié des ressources de 1251,6 Mt à 35,9 % Fe dans le secteur du lac Roberts (au sein du Synclinal de Roberts) et de 611,8 Mt à 22,2 % Fe dans le secteur du lac Morgann (correspondant au secteur de la rivière Brochant de ce rapport, immédiatement au sud de la rivière Arnaud; Canova, 2014). Trois nouveaux indices s’ajoutent à la liste des 37 zones minéralisées historiques répertoriées dans les roches du Sokoman dans le secteur d’étude. Ces minéralisations consistent en des séquences rubanées de 10 à 50 m d’épaisseur et d’extension hectométrique formées de formations de fer à magnétite accompagnée localement d’hématite spéculaire.

 

Neuf nouveaux indices ont été répertoriés dans les formations de fer de type Algoma incluses dans les lambeaux de roches supracrustales archéennes du Complexe d’Arnaud de la Province du Supérieur. Elles consistent en des formations à magnétite et à amphibole de puissance métrique à décamétrique. Leur distribution et leur extension latérale sont toutefois peu connues. De plus, une valeur anomale de 680 ppb Au obtenue dans un échantillon choisi (affleurement 17-FL-6194, analyse : 2017070532) confirme le potentiel aurifère des formations de fer archéennes reconnu dans le nord-est du Supérieur, dans la Sous-province d’Ashuanipi et dans d’autres cratons similaires (p. ex. le Craton du Yilgarn, Australie; Simard et al., 2008). Il existe également quelques exemples de minéralisations aurifères associées à un processus de remplacement partiel des formations de fer au faciès des silicates de la Formation de Baby (partie centre-nord de la Fosse du Labrador), qui ont toutefois subi des conditions de métamorphisme plus faibles (Clark et Wares, 2004).

 

Minéralisation épigénétique de Cu associée au Couloir de déformation de Virgin 

La côte ouest de la baie d’Ungava est traversée par un important couloir de déformation, le Couloir de déformation de Virgin, qui marque le chevauchement des unités archéennes (Zone noyau de la Province de Churchill) sur les roches volcano-sédimentaires paléoprotérozoïques de la Fosse du Labrador. Cette zone de déformation est accompagnée d’une augmentation du degré de métamorphisme et de l’intensité de l’activité hydrothermale. Une veine de quartz de 0,3 à 1,0 m d’épaisseur échantillonnée dans le secteur du lac Sinaujarjuaq a donné une teneur de 8020 ppm Cu (affleurement 17-RP-3158, indice du Lac Sinaujarjuaq). La veine renferme de la chalcopyrite et de la pyrite disséminées et en amas accompagnées de malachite. Elle s’injecte de manière subconcordante à la foliation dans une unité de métabasalte amphibolitisé de la Formation d’Hellancourt.

 

Nouveau type de minéralisation dans le secteur de Kangirsuk : Indice de corindon

L’indice de Sitamat est la première minéralisation de ce type dans la région d’étude. Cette découverte pourrait indiquer un potentiel pour ce minéral industriel dans la Fosse du Labrador.

L’indice a été découvert sur l’affleurement 17-WC-4151 localisé sur la bordure sud de la rivière Arnaud, à 1 km au SW des îlots Sitamat et 11 km au SE de Kangirsuk. Le corps minéralisé forme une zone de faible relief d’environ 5 m par 5 m. Il est encaissé dans les basaltes de la Formation d’Hellancourt, adjacent à des niveaux de sulfures semi-massifs et de mudrock albitisé contenant jusqu’à 9 % Na2O. La roche, dont le protolite est indéterminé, contient de 60 à 80 % de corindon à grain moyen. Elle se distingue des basaltes encaissants par sa couleur pourpre foncé en surface altérée, sa cassure conchoïdale, son relief positif plus important, sa plus grande dureté et l’abondance de veines de quartz, mica et amphibole. À l’analyse (2017070597), elle montre des valeurs de 76,7 % Al2O3 et 3,8 % TiO2, ce qui semble indiquer un lessivage des oxydes majeurs et un enrichissement correspondant en éléments immobiles (Al2O3, TiO2, Zr, Nb). Il est probable que la zone minéralisée en corindon soit le produit d’un intense lessivage suivi du métamorphisme d’un protolite déjà riche en aluminium, tel un leucogabbro ou un mudrock. Le lessivage est probablement associé à la circulation des mêmes fluides hydrothermaux qui ont altéré en albite le mudrock adjacent et qui ont déposé les sulfures semi-massifs. La recristallisation est probablement reliée à un métamorphisme de contact résultant de la mise en place des filons-couches de la Suite intrusive de Gerido ou de la Formation d’Hellancourt. Cependant, aucun filon-couche ou intrusion n’a été observé dans le secteur du corps minéralisé en corindon.

Collaborateurs
Collaborateurs
Auteurs Carl Bilodeau, géo., M.Sc. carl.bilodeau@mern.gouv.qc.ca
Emmanuel Caron-Côté, géo. stag., M.Sc. emmanuel.caron-cote@mern.gouv.qc.ca
Géochimie Fabien Solgadi, géo., Ph.D.
Géophysique Siham Benahmed, géo. stag., M.Sc.
Rachid Intissar, géo, M.Sc.
Évaluation de potentiel Hanafi Hammouche, géo., M.Sc.
Logistique Clotilde Duvergier, géo. stag., B.Sc.
Marie-France Beaulieu, géo. stag., B.Sc.
Géomatique Julie Sauvageau
Kathleen O’Brien
Édition Claude Dion, ing., M.Sc.
Lecture critique James Moorhead, géo., M.Sc.
Patrice Roy, géo., M.Sc.
Organisme Direction générale de Géologie Québec, Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, Gouvernement du Québec

Remerciements :

Les auteurs tiennent à remercier les géologues Renato Henrique-Pinto, William Chartier-Montreuil, Sacha Lafrance et Florence Lanouette, les étudiants Antoine April, Ariane Chourot, Gabriel Bolduc, Alexandra Harvey, Marjorie Larocque-Plante et Sean Kudluk, ainsi que Carole Conway, Calvin Buckle, Jannick Croteau, Benoit Demers, l’équipe de Peak Aviation, Eva, Joe, Alik et Elvis de la communauté de Kangirsuk. L’équipe Arnaud tient à remercier plus particulièrement Sean McDonagh d’Arctic Adventures et de la Fédération des coopératives du Nouveau-Québec (FCNQ) pour son soutien logistique sans faille pendant toute la durée du projet.

Références

Publications du gouvernement du Québec

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BENAHMED, S., INTISSAR, R., 2015. Levé magnétique et spectrométrique aéroporté dans le secteur de la rivière Arnaud, côte nord-ouest de la baie d’Ungava. MERN, GEO DATA SOLUTIONS GDS INC; DP 2015-08, 8 pages, 10 plans.
BERGERON, R., 1957. Rapport préliminaire sur la région de Brochant – de Bonnard, Nouveau-Québec. MRN; RP 348, 9 pages, 1 plan.
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Autres publications

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MAURICE, C., 2009. The Precambrian mafic magmatism of the Northeastern Superior Province, Canada. McGill University; thèse de doctorat, 259 pages. Source

 

 

27 juin 2018