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Géologie de la région de Girardville, Province de Grenville, région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Québec, Canada

Projet visant le feuillet 32H02
Abdelali Moukhsil et Mhamed El Bourki
BG 2021-02
 

 

 

 

À la UNE
L’Essentiel

Une nouvelle carte géologique à l’échelle 1/50 000 du secteur de Girardville (feuillet SNRC 32H02), dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, a été produite à la suite d’un levé réalisé à l’été 2020. Les roches cartographiées sont principalement d’âge mésoprotérozoïque (0,99 à 1,45 Ga). Plusieurs unités reconnues dans le secteur de Normandin (feuillet 32A15) se poursuivent vers le nord dans le secteur de Girardville. Il s’agit du Complexe de Barrois (roches métasédimentaires, <1224 ±18 Ma), de la Suite plutonique d’Allegrin (non datée), de la Suite de Saint-Thomas-Didyme (1042 ±2 Ma), de la Suite intrusive de Sainte-Hedwidge (1017 ±36 Ma) et de la Gabbronorite de Claire (non datée). De nouvelles unités lithodémiques ont été cartographiées dans le cadre de ce projet. Ces unités sont les suites plutoniques de Bois Vert et de la Vertu, le Batholite du Coin ainsi que les suites intrusives de Bolduc et de Jean-Marie. Ces unités intrusives sont surtout constituées de gabbronorite, de mangérite, de syénite quartzifère avec ou sans orthopyroxène, de syénogranite, de granite à feldspath alcalin, de charnockite et, plus rarement, de syénite quartzifère et à feldspath alcalin, de jotunite, de monzodiorite, de leuconorite et de pyroxénite. Des dykes de pegmatite granitique à syénitique coupent les roches de la région et un dyke de carbonatite injecte la Suite intrusive de Sainte-Hedwidge. Les roches cartographiées sont généralement déformées, plissées et coupées par plusieurs failles ainsi que des zones de cisaillement. La trame structurale est majoritairement orientée N-S à NNE-SSW. Le secteur se caractérise par un métamorphisme régional prograde du faciès supérieur des amphibolites à celui des granulites. Il recèle plusieurs types de minéralisations offrant un potentiel minéral non négligeable permettant de définir des zones favorables à l’exploration minière :

  1. minéralisation en éléments de terres rares ± Th ± Nb ± Ta dans les dykes granitiques, dans les roches intrusives syénitiques et granitiques à feldspath alcalin et dans les carbonatites;
  2. minéralisation de Fe-Ti±P±V dans les gabbronorites;
  3. minéralisation de Ni±Cu dans les roches intrusives ultramafiques;
  4. minéralisation de minéraux industriels (sillimanite).

Méthode de travail

La région a été cartographiée en utilisant la méthode établie pour les levés effectués dans les zones forestières desservies par un réseau de chemins secondaires. Les travaux de cartographie géologique ont été réalisés par une équipe de trois géologues, d’un géologue stagiaire et de deux étudiants en géologie entre le 28 juin et le 28 août 2020.

 

Données et analyses
Élément Nombre
Affleurement décrit (géofiche) 620 affleurements
Analyse lithogéochimique totale 84 échantillons
Analyse lithogéochimique des métaux d’intérêt économique 64 échantillons
Analyse géochronologique 7 échantillons
Lame mince standard 83
Lame mince polie 74
Coloration au cobaltinitrite de sodium 0
Fiche stratigraphique 10
Fiche de substances minérales métalliques 5
Fiche de substances minérales non métalliques 1

 

 

Travaux antérieurs

Le tableau ci-dessous présente une liste des travaux réalisés dans le secteur à l’étude depuis 1961. Il inclut aussi les références citées dans le rapport. Une liste plus exhaustive peut être trouvée dans la base de données documentaire EXAMINE.

Travaux antérieurs dans la région d’étude
Auteur(s) Type de travaux Contribution
Benoit,1961 Cartographie géologique à l’échelle 1/63 360 (feuillet 32H02) Parmi les rares cartographies géologiques à cette échelle dans la Province de Grenville
Laurin et Sharma, 1975  Cartographie et reconnaissance géologique à l’échelle 1/250 000  Projet de cartographie échelonné sur plusieurs années (1965 à 1967)
Intissar et Benahmed, 2015 Levé magnétique aéroporté du secteur ouest du Lac-Saint-Jean Couverture géophysique à haute résolution

El Amrani et Fournier, 2020

Levé géologique des dépôts quaternaires dans la région de Girardville (feuillets 32H01, 32H02, 32H07 et 32H08) Analyse des minéraux indicateurs des sédiments glaciaires et fluvioglaciaires 

El Amrani, 2020

Cartographie des dépôts de surface dans la région de la rivière Mistassini (feuillets 32H01, 32H02, 32H07 et 32H08) Évaluation du potentiel minéral à partir d’un levé géologique du Quaternaire

Lithostratigraphie

Cette partie présente les différentes lithologies de la région cartographiée dans un cadre stratigraphique et temporel. Le schéma stratigraphique et la frise chronologique ci-contre accompagnent cette discussion. La description lithologique des unités peut être consultée à partir des fiches stratigraphiques respectives en utilisant l’hyperlien associé à chacune d’elles.

La région du Saguenay–Lac-Saint-Jean cartographiée est située dans la partie allochtone de la Province de Grenville. Cette région regroupe des roches qui sont principalement d’âge mésoprotérozoïque (0,99 à 1,45 Ga).

La chronologie relative de mise en place de ces unités est illustrée dans le schéma stratigraphique qui tient compte des relations de recoupement décrites sur le terrain. Ces observations sont supportées par les données géochronologiques U-Pb de plusieurs échantillons prélevés dans le secteur. Ce schéma constitue une section très idéalisée de la géologie de la région étudiée montrant les relations de recoupement des unités ainsi que leurs positions relatives. La dimension des unités représentées sur le schéma respecte plus ou moins les superficies cartographiées en surface.

Le socle

Roches intrusives

La Suite plutonique de Bardeau (mPbad) est composée de roches intrusives felsiques à mafiques déformées à gneissiques. Elle affleure dans le feuillet 32A15 (Moukhsil et El Bourki 2019), où elle a été datée à 1364 ±9 Ma (Papapavlou, 2020). Bien qu’elle n’ait pas été reconnue dans la région étudiée, on considère qu’elle y forme le socle.

Roches supracrustales

Le Complexe de Barrois (mPboi), avec un âge maximal de déposition de 1224 Ma (Papapavlou, 2020), constitue l’ensemble rocheux le plus ancien cartographié dans la région d’étude. Il se compose de roches métasédimentaires à proportions variables de mobilisat, lesquelles reposent sur la Suite plutonique de Bardeau (mPbad). Dans la région cartographiée, le Complexe de Barrois contient l’unité composée de paragneiss quartzofeldspathique à biotite, localement migmatitisé, de quartzite, de migmatite et de gneiss granitique (mPboi4). Seulement deux sous-unités de cette dernière y sont reconnues : a) du paragneiss rouillé à grenat, sulfures et graphite, du paragneiss migmatitique, de la migmatite et du gneiss granitique (mPboi4a), et b) du paragneiss à biotite ± sillimanite ± grenat ± graphite, de la roche volcanique mafique amphibolitisée, du marbre, des roches calcosilicatées, de la grenatite et du quartzite à ± graphite ± grenat (mPboi4c).

Roches intrusives mésoprotérozoïques

Les roches métasédimentaires du Complexe de Barrois représentent l’encaissant de toutes les intrusions mésoprotérozoïques grenvilliennes (0,986 à 1,085 Ga). Ces dernières sont constituées de roches felsiques, intermédiaires et mafiques bien circonscrites sur les cartes aéromagnétiques (Intissar et Benahmed, 2015). Ces intrusions sont, de la plus ancienne à la plus jeune : la Suite plutonique d’Allegrin (mPalg) composée de syénite quartzifère, de granite à feldspath alcalin et de gabbronorite; la Suite de Saint-Thomas-Didyme (mPstd), composée de mangérite, gabbronorite, charnockite, granite à feldspath alcalin et diorite quartzifère; la Gabbronorite de Claire (mPclr), formée de masses lenticulaires kilométriques injectées dans les unités citées ci-dessus; la Suite plutonique de Bois Vert (mPbvr), très magnétique, constituée de gabbronorite localement à oxydes de Fe-Ti ± P, de syénite quartzifère, de granite à feldspath alcalin, de charnockite, de syénite à hypersthène, de mangérite et de syénite quartzifère; la Suite intrusive de Sainte-Hedwidge (mPshe2, 1017,6 ±36 Ma, Papapavlou, 2019) composée de syénite quartzifère, de mangérite, de granite à feldspath alcalin, de gabbronorite et d’enclaves de paragneiss et de gneiss granitique; la Suite plutonique de la Vertu(mPvet), également très magnétique, formée de syénite à hypersthène, de syénite quartzifère, de granite à feldspath alcalin et mangérite; la Suite intrusive de Jean-Marie (mPijm) qui contient de la charnockite, du granite à feldspath alcalin, de la syénogranite, de la syénite à hypersthène, de la gabbronorite riche en enclaves de paragneiss et de gneiss granitique; la Suite intrusive de Bolduc (mPblc) constituée de charnockite, granite à feldspath alcalin, de syénogranite, de syénite quartzifère, de mangérite contenant des enclaves de paragneiss et des proprotions mineures de webstérite, et le Batholite du Coin (mPbcn) qui constitue une petite intrusion formée de monzonite quartzifère avec ou sans hypersthène (mangérite), de syénogranite, de granite à feldspath alcalin et d’une proportion mineure de monzodiorite quartzifère.

Dyke de carbonatite de Girardville

La carbonatite de Girardville correspond à un dyke de 1 à 2 m d’épaisseur apparente orienté 350°/48°. Le dyke affleure dans le coin SE de la région où il s’injecte dans la Suite intrusive de Sainte-Hedwidge. La carbonatite est constituée de calcite, de gros cristaux d’ilménite, ainsi que de microcline, de phlogopite, d’ægyrine, d’apatite (concentrée dans un niveau millimétrique) et de fluorine. Elle contient aussi des enclaves mafiques. Dupuis et David (2013) ont signalé la présence de pyrochlore, de zircon, de fluor-apatite, de rutile, d’anatase, de magnétite et d’hématite. Moorhead et al. (2000) mentionnent que la carbonatite n’a pas été datée. De plus, elle se trouve dans la zone Waswanipi-Saguenay, laquelle comprend entre autres les carbonatites de Montviel (1894,2 ±3,5 Ma, David et al., 2006; Goutier, 2006) et de Lac Shortt (2652 Ma, Morasse, 1988 dans Nadeau et al., 2014), dans la Province du Supérieur, et celle de Saint-Honoré (582,2 ±1,8 Ma, dans Néron et al., 2018), dans la Province de Grenville. Une deuxième zone (Nottaway) contient la carbonatite de Dolodau (2631 ±8 Ma, Augland et al., 2016; Bédard et Chown, 1992). La carbonatite de Crevier (957 ±2,9 Ma, Groulier et al., 2020) est localisée légèrement à l’écart de ces deux zones. Du point de vue de l’âge, on peut considérer que les carbonatites de Girardville et de Saint-Honoré se sont mises en place à la même période.

Dyke pegmatitique à gros cristaux de microcline

BG – GirardvilleUn dyke pegmatitique spectaculaire de composition syénitique affleure à 12 km au NW de Girardville (Plourde et Tremblay, 2018). Ce dyke contient :

1) de gros cristaux de feldspath potassique (microcline), dont le plus gros échantillonné, selon les propriétaires des titres miniers, dépasse 1 m de longueur;

2) des cristaux d’un minéral surtout fibreux, de couleur verdâtre (arfvedsonite), dont la taille varie de 1 cm à 10 cm de longueur;

3) de petits cristaux d’ægyrine et de calcite. Ceux-ci tapissent les parois et se trouvent dans cavités à l’intérieur du dyke.

Le dyke contient également des niveaux de carbonatite calcique de quelques centimètres à décimètres d’épaisseur (5 à 50 cm).

Lithogéochimie

La lithogéochimie des unités de la région de Girardville est présentée séparément sous forme de tableaux.

Géologie structurale

Les unités dont les âges sont de l’Elsonien (Suite plutonique de Bardeau) et de l’Elzévirien (Complexe de Barrois) constituent les roches les plus anciennes de la région de Girardville. Ces unités ont subi une recristallisation, des déformations importantes et présentent des plissements majoritairement isoclinaux (plans axiaux plus ou moins parallèles au grain structural). Ceux-ci sont principalement le résultat des orogenèses et des événements antégrenvilliens et grenvilliens (1180 à 989 Ma). Dans la région cartographiée, seul le Complexe de Barrois affleure; celui-ci montre des structures gneissiques et des rubanements migmatitiques qui génèrent des patrons régionaux en dôme et bassin. Ces structures planaires sont attribuées à la déformation D2. En effet, les structures primaires de ces unités ont été transposées lors d’une première phase de déformation D1 et ont été oblitérées par les événements de déformation durant l’Orogenèse grenvillienne. Le résultat final de cette dernière est une trame structurale d’orientation principale N-S à NNE-SSW. Des plis ouverts ont été observés par endroits dans les roches de la région et correspondent à une déformation D3. La région présente également plusieurs failles et zones de cisaillement.

En se basant sur la trame des linéaments visibles et interprétés des cartes aéromagnétiques ainsi que sur l’attitude des structures planaires (D2/G2) mesurées dans les roches, la région de Girardville a été subdivisée en quatre domaines structuraux. Ceux-ci sont généralement à fabrique planaire plus ou moins homogène. Il s’agit des domaines structuraux du Lac rond (DSrnd), de Jean-Marie (DSjme), de La Vertu (DSvtu) et de Bois Vert (DSbvt).

Le Domaine structural de Bois Vert (DSbvt) occupe le centre de la région. Il se caractérise principalement par la mise en place de la Suite plutonique de Bois Vert. Généralement, les structures au sein de l’intrusion sont de type magmatique, alors que celles en bordure sont caractéristiques de la déformation D2 qui épousent la forme elliptique du contact avec l’encaissant. Il s’agit d’un contact faillé bien circonscrit à partir des cartes aéromagnétiques.

En projection stéréographique, les pôles des plans de la foliation (fabrique planaire) se répartissent en grande majorité dans les quadrants NW et SW (quelques points dans les autres quadrants), ce qui donne une direction principale N-S à NNE-SSW et un pendage modéré vers l’est. Les linéations minérales portées par les structures planaires se concentrent essentiellement dans le quadrant SE et sont à composante pendage à localement oblique.

Le Domaine structural de Jean-Marie (DSjme), situé dans la partie ouest de la région cartographiée, présente un patron structural orienté généralement N-S qui résulte de la mise en place des suites intrusives de Jean-Marie (mPijm) et de Bolduc (mPblc). Ces intrusions sont également coupées ou bordées par des failles majeures (normales et inverses) d’orientation moyenne N-S et par des zones de cisaillement à mouvement dextre.

Le grain structural dominant dans ce domaine est d’orientation N-S à NNE-SSW et le pendage moyen est soit vers l’est ou l’ouest. Il est représenté essentiellement par une foliation minérale tectonométamorphique de la déformation D2. Les linéations minérales portées par ces fabriques planaires sont généralement à composante oblique et, par endroits, directionnelle. En projection stéréographique, les linéations se répartissent essentiellement dans le quadrant SE (quelques points dans le quadrant SW) et correspondent aux plans de la foliation à pendage ouest.

Le Domaine structural de la Vertu (DSvtu) occupe la partie centre nord de la région et est dominé par la Suite plutonique de la Vertu. Il présente une fabrique planaire moyenne orientée NNW-SSE qui est généralement caractérisée par une foliation minérale tectonométamorphique, une foliation magmatique ou un rubanement mylonitique. En projection stéréographique, les pôles des plans de cette foliation occupent en grande partie le quadrant SW. Les linéations portées par ces structures planaires sont généralement à composante oblique.

À noter que dans ce domaine, il y a présence de deux failles normales dont l’orientation est subparallèle au patron structural interprété pour ce domaine. Il est possible qu’une relation existe entre la mise en place de cette intrusion et ces failles. Une autre faille, orientée E-W, a été cartographiée au sud de l’intrusion et est interprétée comme une faille de chevauchement. Cette faille est moins documentée en raison du nombre limité d’affleurements.

Le Domaine structural du Lac Rond (DSrnd), situé dans les parties est et sud de la région cartographiée, est la continuité nord du même domaine reconnu dans les feuillets 32A15 et 32A16 (Moukhsil et El Bourki, 2019). Il comprend principalement les fabriques du Complexe de Barrois, du Batholite du Coin, la Suite de Saint-Thomas-Didyme et de la Suite intrusive de Sainte-Hedwidge. La fabrique planaire de ce domaine dans cette région est assez homogène avec une direction moyenne N-S et à pendage modéré vers l’est (foliation moyenne G2 : 354°/39°).

En projection stéréographique, les linéations minérales portées par les fabriques planaires dans la région se répartissent selon un cercle autour de vecteur moyen de la foliation et varient d’une linéation à composante pendage à directionnelle.

Afin de montrer les relations entre les différentes unités lithostratigraphiques de la région de Girardville, deux coupes géologiques AB et CD ont été réalisées selon une orientation E-W.

 

Métamorphisme

L’étude de l’évolution métamorphique de la région de Girardville a été faite à partir des observations minéralogiques et structurales à l’échelle macroscopique et microscopique (157 lames minces et polies d’échantillons représentatifs des unités mésoprotérozoïques). Elle montre que les roches de la région présentent de nombreuses évidences d’un métamorphisme prograde aux faciès des amphibolites et des granulites (carte métamorphique simplifiée). 

Le Complexe de Barrois, qui est composé entre autres de paragneiss alumineux (métapélite), présente des paragenèses à biotite (BO), sillimanite (SM) et grenat (GR) qui indiquent que les roches de cette unité ont été métamorphisées au faciès supérieur des amphibolites. Ce même complexe contient des sous-unités de roche migmatitique à différents degrés de fusion partielle.

De même, l’orthopyroxène est omniprésent dans la plupart des roches de la région à l’échelle macroscopique ainsi que microscopique (lames minces) pour plusieurs intrusions felsiques, intermédiaires et mafiques (p. ex. affleurement 20-FM-2115). Ceci indique que la mise en place de ces roches s’est faite dans des conditions de température et de pression équivalentes à celles du faciès des granulites. La présence de structures perthitiques et mésoperthitiques (inclusions d’albite) dans le feldspath potassique des roches intrusives felsiques et intermédiaires témoigne également des conditions de haute température

Les roches de la région présentent également un métamorphisme rétrograde au faciès inférieur des amphibolites. Ceci est indiqué par un remplacement partiel ou total du pyroxène par l’amphibole (ouralitisation). Localement, une association de faible grade métamorphique a été observée dans un paragneiss. Il s’agit d’une association de grenat avec un assemblage de biotite-chlorite-muscovite, indiquant un métamorphisme aux faciès des schistes verts, entre autres par la transformation de la biotite en chlorite ou en partie par de la muscovite (affleurement 20-ME-1038D).

Géologie économique

La région de Girardville présente plusieurs zones favorables pour quatre types de minéralisation :

  • minéralisation de terres rares ± Th ± Nb ± Ta associée à des dykes pegmatitiques de composition granitique, à des intrusions syénitiques, à un dyke de carbonatite et à des granites à feldspath alcalin;
  • minéralisation magmatique de Fe-Ti (± P ± V) dans les gabbronorites;
  • minéralisation magmatique de Cu-Ni dans les roches intrusives ultramafiques;
  • minéralisation de minéraux industriels (sillimanite).

Le tableau des zones minéralisées ci-dessous présente les résultats d’analyses pour cinq zones minéralisées connues dans le secteur (feuillet 32H02), incluant trois nouvelles zones de substances métalliques découvertes dans le cadre de nos travaux.

Zones minéralisées dans la région de Girardville

Nouvelles
Nom Teneurs Commentaires
Minéralisation associée aux pegmatites granitiques
ETRALI 4827,88 ppm ETR (G); 1230 ppm Th (G); 20,4 ppm Nb (G)  
Jeb 10 561,01 ppm ETR (G)  
Niobithor 551 ppm Nb (G); 732 ppm Th (G); 257 ppm Y (G); 1 100 ppm Zr (G); 9,8 ppm Ta (G)  
Minéralisation de type indéterminé
Beaudet 1861,25 ppm ETR (G)  
Connues
Nom Teneurs Commentaires
Minéralisation associée aux carbonatites
Carbonatite de Girardville 37 000 ppm Nb (G); 25 780 ppm Ti (G)  
Guérin-Plourde On trouve dans les cavités des agglomérations de mégacristaux de feldspath potassique ou d’ægyrine. La calcite se présente plutôt en petits cristaux ou en petits amas.  

(G) : Échantillon choisi 

 

 

Le tableau des analyses lithogéochimiques des métaux d’intérêt économique présente la localisation, la description et les résultats d’analyse pour 64 échantillons choisis dans le but d’évaluer le potentiel économique de la région.

 

Minéralisations connues de la région d’étude

Zone favorable de Girardville

BG – GirardvilleLa zone favorable de Girardville correspond à un couloir NNW-SSE montrant un enrichissement en niobium-tantale (Nb-Ta) et en éléments de terres rares. La partie sud du couloir contient le dyke de carbonatite de Girardville (zone minéralisée de la Carbonatite de Girardville), orienté 350°/48°, dont la puissance est de 1 m à 2 m (affleurement 20-AM-0129). Cette carbonatite injecte le syénogranite de la Suite intrusive de Sainte-Hedwidge. Un échantillon choisi (20-AM-0129-C1) a donné une teneur de 1539,59 ppm ETR totaux (dont 675 ppm Ce, 318 ppm La et 289 ppm Nd). La partie nord du couloir est caractérisée par un dyke de pegmatite (zone minéralisée de Guérin-Plourde) de composition syénitique encaissé dans un gneiss granitique (affleurement 20-ME-1097). Il renferme des mégacristaux de feldspath potassique (microcline), des grains d’un minéral aciculaire (arfvedsonite), des cristaux de calcite et d’ægyrine ainsi que des niveaux de carbonatite calcitique de 5 cm à 50 cm d’épaisseur.

 

Minéralisations méconnues et découvertes lors des présents travaux

Deux nouvelles zones minéralisées en éléments de terres rares

La nouvelle zone minéralisée de Beaudet est localisée par l’affleurement 20-FM-2119 à ~3,20 km au NE de la ville de Girardville et à 3,60 km au SE de la zone minéralisée connue de la Carbonatite de Girardville. La minéralisation, probablement portée par de l’allanite, est associée à un dyke de syénite grise orienté 110°/85°. La roche est constituée d’orthopyroxène, de clinopyroxène, d’apatite et de biotite. Ce dyke coupe une syénite verdâtre à magnétite, biotite et pyroxène. Un échantillon choisi (20-FM-2119-B1) a retourné une teneur de 1861,25 ppm ETR totaux (dont 835 ppm Ce, 382 ppm La et 400 ppm Nd).

 

La nouvelle zone minéralisée de Jeb est située à ~800 m à l’est du lac des Roches (partie NW du feuillet 32H02). Elle est localisée par l’affleurement 20-ME-1087. La minéralisation est associée à un dyke de pegmatite de composition syénitique orienté 07°/49° dont la puissance est de 5 cm à 20 cm. La pegmatite contient du quartz, du feldspath potassique, de la biotite, de la magnétite de l’allanite et quelques traces de la thorite. Cette injection coupe une gabbronorite foliée de la Suite intrusive de Jean-Marie composée essentiellement d’orthopyroxène, de clinopyroxène, de magnétite, d’amphibole et de biotite. L’analyse d’un échantillon choisi (20-ME-1087-C1) a donné une teneur de 10 561,01 ppm ETR totaux (dont 5320 ppm Ce, 2710 ppm La, 1660 ppm Nd et 544 ppm Pr). 

Nouvelles zones favorables pour les minéralisations magmatiques en éléments des terres rares ± Th ± Nb associées aux dykes de pegmatites granitiques, aux syénites et aux granites à feldspath alcalin

La zone favorable d’ETRALI (zone minéralisée d’ETRALI) est constituée d’un dyke de pegmatite qui coupe une migmatite dérivée de roches sédimentaires. Le dyke est orienté 290°/80° et présente une épaisseur de 5 à 15 cm et une longueur minimale de 5 m. Il est de composition granitique, d’affinité métalumineuse (15,5 % Al2O3) et est enrichi en potassium (5,81 % K2O). Il contient de la biotite, de la magnétite, de l’allanite, de la monazite et de la thorite. Un échantillon choisi (20-AM-0041-B1) présente une teneur de 4827,88 ppm ETR totaux (dont 2170 ppm Ce, 1020 ppm Nd, et 1030 ppm La) et une concentration de 1230 ppm Th. Cet échantillon contenait également 20,4 ppm Nb et 86 ppm Pb.

La zone favorable de Petit est localisée à ~490 m à l’ouest du lac Petit dans la Suite plutonique de Bois Vert. L’affleurement correspondant à cette zone est constitué d’une syénite quartzifère à grain moyen à grossier, foliée (120°/57°) et fortement magnétique. Un échantillon choisi (20-AM-0012-A1) contient 1479,18 ppm ETR totaux (dont 708 ppm Ce, 328 ppm La et 274 ppm Nd) et 31,2 ppm Nb.

 

La zone favorable de Donat est constituée d’un dyke de syénogranite à hornblende, biotite, magnétite, à grain moyen qui injecte le paragneiss du Complexe de Barrois (mPboi4). Un échantillon choisi (20-ME-1024-A1) a donné des teneurs de 881,13 ppm ETR totaux (dont 423 ppm Ce et 236 ppm La).

 

Nouvelle zone favorable pour les minéralisations de Fe-Ti (± P ± V) associées aux gabbronorites

La zone favorable de Croche, située à ~480 m à l’ouest du lac Croche, est constituée de gabbronorite. L’affleurement 20-AM-0003-A est une gabbronorite leucocrate à granulométrie fine à moyenne composée de magnétite titanifère, d’hémo-ilménite, de biotite et d’orthopyroxène accompagnés de pyrrhotite et de pyrite disséminées (<1 %). L’affleurement 20-AM-0005 montre une gabbronorite à structure ophitique caractérisée par des amas (2 à 3 cm) d’hémo-ilménite, d’ilménite et de magnétite associées à de l’apatite et des traces de pyrite et de pyrrhotite. Deux échantillons choisis ont donné 3,68 % TiO2, 1,33 % P2O5 et 8,74 % Fe (20-AM-0003-A) et 4,15 % TiO2, 1,74 % P2O5 et 11,1 % Fe (20-AM-0005-A). L’échantillon 20-AM-0005-A1 contient également 51,8 ppm Nb et 216 ppm Zn.

La zone favorable de Pierre est constituée essentiellement de roche mafique (gabbronorite) avec des injections de granite, de monzogranite et de syénite (20-FT-3040, 20-FT-3041 et 20-FT-3045) de la Suite plutonique de Bois Vert (mPbvr3). Les minéraux observés dans cette gabbronorite sont le clinopyroxène, l’orthopyroxène, la magnétite, l’hémo-ilménite et la biotite associés à ~1 % à 2 % de sulfures (pyrite, pyrrhotite et chalcopyrite) en grains millimétriques disséminés. Trois échantillons choisis ont donné 4,31 % TiO2, 1,96 % P2O5, 10,6 % Fe et 184 ppm Zn (20-FT-3040-A1), 3,64 % TiO2, 2,16 % P2O5, 10 % Fe et 197 ppm Zn (20-FT-3041-A1) et 3,03 % TiO2, 1,92 % P2O5, 9,18 % Fe et 151 ppm Zn (20-FT-3045-A1).

Nouvelle zone favorable pour les minéralisations de Ni ± Cu dans les roches intrusives ultramafiques

La zone favorable de Jumeau Nord est située à ~750 m au NW du lac Jumeau Nord. Elle correspond à l’affleurement 20-AM-0055 caractérisé par une webstérite (Suite intrusive de Bolduc, mPblc) à olivine et pyroxènes (orthopyroxène et clinopyroxène) contenant ~2 % de pyrite et de pyrrhotite en grains millimétriques disséminés. Elle contient également des traces de chalcopyrite et de la pentlandite associées à la pyrrhotite (en très petits grains de <20 μm). La webstérite (80 % de l’affleurement) est associée à une charnockite (20 % de l’affleurement). L’analyse d’un échantillon choisi (20-AM-0055-A1) a donné une teneur de 496 ppm Ni, 71 ppm Cu, 99 ppm Co, 0,18 % Cr et 52 ppm Zn.

 

Zones favorables pour les minéraux industriels (sillimanite)

La zone favorable de Francis est associée à deux petites lentilles de paragneiss du Complexe de Barrois (mPboi4c). Localement, ces paragneiss peuvent contenir jusqu’à 30 % de sillimanite fibreuse, millimétrique à centimétrique, concentrée dans des niveaux de ~1 m d’épaisseur sur 3 m de longueur. Sur l’affleurement 20-FT-3154, cette roche métasédimentaire à sillimanite et grenat est associée à un banc de quartzite impur ainsi qu’à de minces niveaux de grenatite (40 % grenat). Cette zone favorable est également caractérisée par une anomalie magnétique de faible intensité.

 

Problématiques à aborder dans le cadre de futurs travaux

La nouvelle carte géologique à l’échelle 1/50 000 a grandement amélioré les connaissances géologiques de la région de Girardville en termes de descriptions stratigraphiques, structurales et métallogéniques. Cependant, quelques problématiques restent à aborder : 1) l’augmentation de la teneur en Nb du sud vers le nord dans la région cartographiée, et 2) la source des teneurs anomales en Zn dans les sédiments de fond de lac.

1) Problématique du Nb : la présence de la carbonatite de Girardville et du dyke Guérin-Plourde explique l’augmentation de la teneur en Nb dans ces intrusions postgrenvilliennes; par contre, l’enrichissement en Nb dans les intrusions syénitiques grenvilliennes n’est pas encore expliqué.

2) Problématique du Zn : la continuité vers le nord de la zone favorable de Moncou découverte dans le cadre d’un projet antérieur de cartographie dans la région de Normandin (Moukhsil et El Bourki, 2020) n’a pas été confirmée dans la région de Girardville. Il est possible que les roches enrichies en zinc ne soient pas importantes du point de vue du volume, et qu’elles soient plutôt limitées à la sous-unité mPboi4c du Complexe de Barrois. Cette dernière est facilement érodable (marbre et paragneiss alumineux) et n’affleure pas beaucoup dans la région.

Le prochain levé géologique du Ministère prévu vers le nord (feuillet 32H07) pourra expliquer l’augmentation des teneurs en Nb dans les roches grenvilliennes. Quant aux teneurs en zinc, elles pourraient être expliquées dans la région de Dolbeau-Mistassini (feuillet 32H01).

 

Collaborateurs
 
Auteurs Abdelali Moukhsil, géo., Ph. D. abdelali.moukhsil@mern.gouv.qc.ca
Mhamed El Bourki, géo. stag., M. Sc. mhamed.elbourki@mern.gouv.qc.ca
Géochimie Fabien Solgadi, géo., Ph. D.
Géophysique

Rachid Intissar, géo., M. Sc.

Évaluation de potentiel Virginie Daubois, géo., M. Sc.
Logistique Marie-Dussault, coordonnatrice
Géomatique Sylvie Tétreault
Kathleen O’Brien
Conformité du gabarit et du contenu François Leclerc, géo., Ph. D.
Accompagnement
/mentorat et lecture critique
Fabien Solgadi, géo., Ph. D.
Organisme Direction générale de Géologie Québec, Ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, Gouvernement du Québec

Remerciements :

Ce Bulletin GéologiQUE est le fruit de la collaboration de nombreuses personnes qui ont activement pris part aux différentes étapes de la réalisation du projet. Nous tenons à remercier les géologues Frédéric Massei et Francis Talla Takam, ainsi que les étudiants Sébastien Larente-Marcotte et Johnatan Sylvain-Bravo qui ont très bien performé durant leur stage.

Références

Publications du gouvernement du Québec

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Autres publications

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4 mai 2021