Zone de cisaillement de Pradier-Orillat
Étiquette structurale : ZCpdo
Première publication :  30 septembre 2024
Dernière modification :

 

 

Auteur(s) Chartier-Montreuil et al., 2024
Méthodologie Défini à partir d’un levé géologique et de données géophysiques
Subdivision(s) géologique(s) Province du Supérieur/Sous-province de La Grande et Sous-province d’Opinaca
Mouvement principal Dextre inverse
Style de déformation Parallèle
Faciès métamorphique (faciès moyen lié à la déformation principale) Supérieur des amphibolites à granulites

 

 

Historique et méthodologie

Un domaine structural informel a été défini dans la région lors de travaux de cartographie dans le secteur du lac Joubert, réalisés durant l’été 2015, par Hammouche et Burniaux (2018). Par la suite, un levé cartographique a été réalisé durant l’été 2016, dans la région du lac Léran par Talla Takam et Beauchamp (2016). Chartier-Montreuil et al. (2024) se sont appuyés sur les données des levés cités, combinées à celles des données aéromagnétiques (D’Amours, 2011; Cleven et al., 2020b) pour introduire la Zone de cisaillement de Pradier-Orillat et définir ses limites. Le nom de la zone de déformation fait référence au lac éponyme situé à la limite contiguë entre les feuillets SNRC 23E04 et 33H01.

Limites et morphologie

Largeur (km) 10
Longueur (km) 100
Orientation Allongement ESE-WNW

 

La Zone de cisaillement de Pradier-Orillat (ZCpdo) correspond à un panneau sub-rectangulaire d’orientation ESE-WNW se pinçant à l’est. Elle est située à cheval entre les sous-provinces de La Grande et d’Opinaca et contient des roches des deux sous-provinces, mettant en évidence la structure complexe de cette zone d’interface entres ces deux grandes entités. Elle est limitée au nord par la Zone de cisaillement de Pradier, qui la sépare du Domaine structural de Joubert. Au sud, la Zone de cisaillement d’Orillat qui marque sa limite avec le Domaine structural de Daran. À l’ouest, la ZCdpo est limitée par les intrusions granitiques de la Suite de Richardie, cernées par les zones de cisaillement d’Orillat et de Quentin dans un domaine structural non formellement défini jusqu’à présent. La Zone de cisaillement de Quentin correspond géographiquement au prolongement de la Zone de cisaillement de Pradier.

Unités stratigraphiques concernées

Les unités lithostratigraphiques et lithodémiques affectées par la Zone de cisaillement de Pradier-Orillat sont :

Dans la Sous-province de la Grande :

Dans la Sous-province d’Opinaca :

La Suite de Lablois (unité nAslb2) est présente dans les deux sous-provinces.

Caractéristiques structurales

❯ Fabriques principales

Sn = S2

 

La Zone de cisaillement de Pradier-Orillat présente une fabrique principale Sn bien développée se manifestant principalement sous la forme d’une schistosité dans les paragneiss, marquée par l’alignement de la biotite, et par une foliation, voire une gneissossité, dans les roches intrusives de la Suite de Joubert. La fabrique Sn présente une orientation généralement E-W, parallèle à la limite des sous-provinces, avec des pendages modérés, généralement vers le nord. L’intensité de cette fabrique s’accroit à l’approche des multiples zones de cisaillement présentes dans le domaine. Toutefois, ces structures ont principalement été définies par les données géophysiques, la présence de mylonitisation ou autre tectonite n’a pas été observée sur le terrain.

Les linéations tectonomorphiques minérales et d’étirement présentent un plongement faible principalement vers l’est et sont parallèles à subparallèles aux axes des plis locaux. Celles-ci sont particulièrement développées à proximité des zones de cisaillement majeures.

 
Fabrique principale Type de fabrique Direction (°) Pendage (°) Nombre de mesures Commentaires
Foliation Sn Foliation tectonométamorphiques et schistosité 289 39 181 Tendance E-W et pendage moyen vers le nord
Linéation Ln Linéation tectonométamorphique 80 30 34 Plongées faibles vers l’est

❯ Autres fabriques

Aucun litage ou autre structure primaire n’ont été observés dans les roches métasédimentaires de la Formation de la Rivière Salomon et du Complexe de Laguiche. Les structures primaires ne sont probablement pas préservées suite à la recristallisation des roches. Aucune fabrique tardive (postérieure à la fabrique principale) n’a été identifiée dans la Zone de cisaillement de Pradier-Orillat.

❯ Plis 

La ZCpdo comporte une série de plis droits synformes et antiformes, serrés à isoclinaux, associés à la déformation principale et parallèles au contact entre les sous-provinces de La Grande et d’Opinaca. Les plis sont suggérés par l’alternance du sens des pendages dans les roches intrusives, au NW, et dans les roches métasédimentaires, au SE. Hammouche et Burniaux (2018) associent ces structures à des perturbations locales.

 

Paramètres géométriques des plis régionaux : 

Plis ou famille de plis Type (anticlinal, synclinal ou indéterminé) Forme (antiforme ou synforme) Attitude (déversé ou droit) Plan axial Axe de pli Position (certaine ou probable) Phase de déformation
Direction Pendage Direction Plongement
Famille de plis Anticlinal et synclinal Antiforme et synforme Droit ESE-WNW Probable Dn

❯ Relations de recoupement

La Zone de cisaillement d’Orillat marque la limite sud de la ZCpdo. Elle est orientée ESE-WNW à E-W et possède une épaisseur métrique à décamétrique. Les affleurements de paragneiss affectés par cette zone de cisaillement sont intensément déformés, contiennent une proportion importante de leucosome présentant une structure stromatique, ainsi que des injections granitiques boudinées (Talla Takam et Beauchamp, 2016; Hammouche et Burniaux, 2018). En dehors de ces affleurements, la position de la zone de cisaillement a été établie par la présence d’une troncature importante du grain géophysique sur les cartes aéromagnétiques.

Au nord, parallèlement à la Zone de cisaillement d’Orillat, la Zone de cisaillement de Pradier, marque la limite nord de la ZCpdo. Elle est orientée ESE-WNW et est marquée par le contact entre les paragneiss de la Formation de la Rivière Salomon et les roches plutoniques de la Suite de Joubert. Ce contact est souligné aussi par un bri net dans le patron géophysique. La Zone de cisaillement de Pradier est marquée sur quelques rares affleurements par une déformation intense des paragneiss.

Ces deux zones de cisaillement, associées à des mouvements inverses, occasionnent un chevauchement des roches plus anciennes de la Sous-province de La Grande sur les roches métasédimentaires de la Sous-province d’Opinaca. Vers l’ouest, ces deux zones de cisaillement se poursuivent au delà du domaine, cernant la Suite de Richardie. À l’est, la ZCpdo se pince et la Zone de cisaillement de Pradier rejoint la Zone de cisaillement d’Orillat.

Une série de zones de cisaillement mineures, à l’attitude similaire aux deux précédents, sont présentes à l’intérieur de la ZCpdo.

Paramètres géométriques des failles régionales coupant la Zone de cisaillement de Pradier-Orillat :

Faille ou Famille de failles Type Direction (°) (moy) Pendage (°) (moy) Plongée de la linéation dans le plan de la faille Largeur estimée (m) Longueur estimée (km) Mouvement apparent Position Commentaires
Zone de cisaillement d’Orillat Cisaillement régional E-W à WNW-ESE Inconnu Inconnue 10 200 Dextre Certaine  
Zone de cisaillement de Pradier Cisaillement régional ESE-WNW Inconnu Inconnue 10 100 Dextre Certaine  

❯ Cinématique

Aucun indicateur cinématique clair n’a été observé jusqu’à présent dans la Zone de cisaillement de Pradier-Orillat. Des plis en S ont été observés à plusieurs endroits, suggérant une composante senestre, mais aucune autre structure ne permet d’appuyer cette interprétation. Hammouche et Burniaux (2018) ont suggéré que le mouvement associé aux zones de cisaillement devait plutôt être dextre, puisque celles-ci correspondent au prolongement des zones de cisaillement plus à l’ouest qui marquent la limite entre les sous-provinces d’Opinaca et de La Grande. Cette composante dextre, interprétation avancée par Bandyayera et al. (2011) et Bogatu et Huot (2016) pour la section du contact se trouvant dans le feuillet 33G07, se base sur des plis en Z dans ce qui est interprété comme la zone de suture entre les sous-provinces.

La linéation tectonométamorphique plonge majoritairement vers l’est. La Zone de cisaillement de Pradier-Orillat est reconnue comme étant à mouvement inverse, pour que les roches de la Sous-province de La Grande, plus âgées, se superposent sur le Complexe de Laguiche selon un mouvement senestre. Toutefois, on reconnait aussi une réactivation des failles avec un mouvement normal dans la Zone de cisaillement de Quentin, correspondant au prolongement à l’ouest de la Zone de cisaillement de Pradier, nuançant cette interprétation (Hammouche et Burniaux, 2018; Goutier et al., 2021).

Style de la déformation

La fabrique principale dans le domaine est bien développée, d’intensité typiquement modérée à élevée, voire intense pour les roches à proximité d’une zone de cisaillement. Elle affecte toutes les unités, à l’exception des roches intrusives tardives des suites de Richardie et de Lablois. La ZCpdo est affectée par plusieurs structures d’orientation E-W à ESE-WNE, mettant en évidence une structure régionale parallèle. Les structures cisaillées se manifestent à travers une déformation plus prononcée avec une tectonite en L/S, des hausses importantes de volume de leucosome et du boudinage.

Caractéristiques métamorphiques

La ZCpdo est marquée par un contraste métamorphique important qui, associé aux zones de cisaillement, définit la limite entre les sous-provinces de La Grande et d’Opinaca. La Sous-province de la Grande est composée de paragneiss à amphibole ± grenat ± sillimanite ± cordiérite, assemblage associé au faciès supérieur aux amphibolites. La Sous-province d’Opinaca est plutôt constituée de paragneiss à orthopyroxène, suggérant un métamorphisme au faciès des granulites.

Dans la Sous-province de La Grande, des zones métamorphisées au faciès des granulites ont aussi été observées. Elles sont associées à des foliations et des rubanements intenses, des structures gneissiques et de fortes recristallisations, suggérant un métamorphisme lié à un épisode de déformation important (Hammouche et Burniaux, 2018).

Altérations

En général, dans la Zone de cisaillement de Pradier-Orillat, l’altération des roches est relativement faible. À proximité des zones de cisaillement, les granites sont affectés par une légère épidotisation et hématitisation.

Caractéristiques géophysiques

Les cartes aéromagnétiques (D’Amours, 2011; Cleven et al., 2020b) montrent que la Zone de cisaillement de Pradier présente un patron magnétique relativement hétérogène. Une texture chagrinée se glisse entre des rubans d’orientation ESE-WNW à E-W, parallèles au contact Opinaca–La Grande et aux zones de cisaillement. Les rubans, dont le contraste est modéré à élevé, semblent correspondre aux roches intrusives de la Suite de Joubert et à des masses granitiques injectées dans les paragneiss du Complexe de Laguiche. Il est aussi possible qu’ils reflètent les secteurs de plus forte migmatitisation des paragneiss. La ZCpdo est contrainte par les zones de cisaillement majeures de Pradier et d’Orillat, au nord et au sud, respectivement, qui sont identifiables par des contrastes négatifs forts, minces et nets. D’autres zones de cisaillement de moindre envergure parcourent la ZCdpo, mais celles-ci sont plutôt discontinues, coupées par des rubans à haut contraste magnétique et par des masses plurikilométriques chagrinées et homogènes. Le centre du domaine correspond à une masse homogène chagrinée mesurant plus de 10 km d’épaisseur apparente qui coupe les rubans à fort contraste. Cette structure ne semble pas se manifester par un changement lithologique en surface. Le patron géophysique, bien qu’hétérogène, est continu sur toute la largeur de la limite entre les sous-provinces d’Opinaca et de La Grande, impliquant une relation complexe.

Repères chronologiques

Une analyse de zircon dans une tonalite foliée de la Suite de Joubert (2015-PB-1039A) a permis de lui octroyer un âge de cristallisation de 2681,7 ±5,6 Ma (David, 2018). Cet âge correspond à l’âge maximal de la déformation principale. Un âge de 2647 ±6 Ma sur monazite a été obtenu dans un paragneiss de Formation de la Rivière Salomon (2015-FB-7519) et est interprété comme l’âge du pic de l’épisode métamorphique principal, probablement associé à l’épisode de déformation principale (Hammouche et Burniaux, 2018; Cleven et al., 2020a).

Références

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

BANDYAYERA, D., BURNIAUX, P., MORFIN, S., 2011. Géologie de la région du lac Brune (33G07) et de la baie Gavaudan (33G10). MRNF; RP 2011-01, 25 pages, 2 plans.

BOGATU, A., HUOT, F., 2016. Minéralisation aurifère du gîte Orfée, Eeyou Istchee Baie-James, Québec. MERN, UNIVERSITÉ LAVAL; MB 2016-10, 47 pages.

CHARTIER-MONTREUIL, W., TALLA TAKAM, F., BEAUCHAMP, A M., MASSEI, F., 2024. Géologie de la région du lac Léran, sous-provinces d’Opatica, d’Opinaca et de la Grande, Eeyou Istchee Baie-James, Québec, Canada. MRNF. BG 2016-01.

CLEVEN, N. R., GUILMETTE, C., HARRIS, L. B., DAVIS, D. W., 2020a. Timing of crustal deformation in Archean rocks along the northern boundary of the Opinaca and La Grande subprovinces, Eeyou Istchee Baie-James region, Québec Superior Province. MERN, UNIVERSITE LAVAL, INRS, UNIVERSITY OF TORONTO; MB 2020-03, 63 pages.

CLEVEN, N. R., HARRIS, L. B., GUILMETTE, C., 2020b. Structural interpretation of enhanced high-resolution aeromagnetic depth slices of the Eeyou Istchee Baie-James region, Québec Superior province. UNIVERSITÉ LAVAL, INRS, MERN; MB 2020-02, 84 pages.

D’AMOURS, I., 2011. Synthèse des levés magnétiques de la Baie-James. MRNF; DP 2011-08, 5 pages, 2 plans.

DAVID, J., 2018. Datations U-Pb dans la Province du Supérieur effectuées au GEOTOP en 2015-2016. MERN, GEOTOP; MB 2018-16, 24 pages.

GOUTIER, J., GIGON, J., BURNIAUX, P., DION, C., TALLA TAKAM, F., CHARTIER-MONTREUIL, W., BANDYAYERA, D., 2021. Géologie de la région du lac de la Corvette, Eeyou Istchee Baie-James. MERN; RG 2020-01, 69 pages, 1 map.

HAMMOUCHE, H., BURNIAUX, P., 2018. Géologie de la région du lac Joubert (SNRC 23E03, 23E04, 33H01), municipalité d’Eeyou Istchee Baie-James. MERN; RG 2018-04, 53 pages.

TALLA TAKAM, F., BEAUCHAMP, A. M., 2016. Géologie-Lac Léran. MERN; CG-2016-08, 1 plan.

 

Citation suggérée

Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF). Zone de cisaillement de Pradier-Orillat. Lexique structural du Québec. https://gq.mines.gouv.qc.ca/lexique-structural/zone-de-cisaillement-de-pradier-orillat [cité le jour mois année].

 

Collaborateurs

Première publication

William Chartier-Montreuil, géo. william.chartier-montreuil@mrnf.gouv.qc.ca (rédaction)

Hanafi Hammouche, géo., M. Sc. (coordination); Daniel Bandyayera, géo., Ph. D. (lecture critique); Simon Auclair, géo., M Sc. (révision linguistique); André Tremblay (montage HTML)

 

 

 

30 septembre 2024