Historique et méthodologie

La Zone de cisaillement de la Marée (ZCmar) a été définie dans le cadre du levé géologique de la région du lac de la Marée par Bandyayera et Caron-Côté (2023; feuillet SNRC 32O16). Plus tard, Bandyayera et al. (2023 et 2024) l’ont continuée vers l’est. En plus des données du levé cartographique, ces auteurs ont utilisé les données aéromagnétiques de haute résolution du Ministère (D’Amours, 2011) pour tracer cette structure.

Cette structure est nommée d’après le lac de la Marée, qui est localisé au centre du feuillet 32O16.

Limites et morphologie

Unités stratigraphiques concernées

Les unités stratigraphiques présentes dans la Zone de cisaillement de la Marée sont les suivantes :

• le Complexe de la Hutte (nAhue);
• le Groupe du Lac des Montagnes (nAmo1, nAmo2 et nAmo3);
• Le Groupe de Tichégami (nAtg1, nAtg2, nAtg3 et nAtg4);
• la Formation de Voirdye (nAvrd2, nAvrd2a, nAvrd2b et nAvrd4);
• la Suite mafique-ultramafique de Nasacauso (nAnas);
• la Suite de Senay (nAsny);
• l’Essaim de dykes de Mistassini (nAmib).

Caractéristiques structurales

 

❯ Fabriques principales

La fabrique S_n associée à la Zone de cisaillement de la Marée consiste généralement en une foliation tectonométamorphique fortement développée à mylonitique, ou en un fort étirement générant des tectonites en L/S.

Dans cette zone, l’amphibolite du Groupe du Lac des Montagnes montre un très fort étirement et forme des tectonites en L/S (affleurement 2022-EC-2129). Des niveaux métasomatiques enrichis en fer (affleurement 2022-DB-1058) sont coupés par des veines de quartz fortement démembrées et contiennent des porphyroclastes de grenat de type delta et de la cordiérite. En lame mince, ces grenats sont riches en inclusions de quartz et présentent une microstructure hélicitique témoignant d’une rotation.

La branche sud de la Zone de cisaillement de la Marée coupe les unités du Groupe de Tichégami. Dans les roches métavolcaniques de ce groupe (nAtg1 à nAtg3), la déformation est marquée par une très forte schistosité et des fabriques C-S-C’ (affleurement 24-SL-4078), tandis qu’elle est plutôt soulignée par un très fort étirement des grains de quartz dans les formations de fer à silicates (nAtg4; affleurement 24-GS-2046). En lame mince, le quartz est recristallisé et montre des microstructures de rotation de sous-grains, ce qui montre que la température de déformation avoisinait les 400 °C (Passchier et Trow, 2013).

En lame mince, le paragneiss dérivé de wacke de la Formation Voirdye et les roches métavolcaniques felsiques du Groupe du Lac des Montagnes affectées par la Zone de cisaillement de la Marée présentent des porphyroclastes de plagioclase baignant dans une matrice à grain très fin composée de quartz et de biotite. Des microrubans de quartz et des feuillets de biotite marquent la foliation. Le quartz est très finement recristallisé et présente des bourgeonnements, ce qui témoigne d’une déformation dans des conditions de faible grade métamorphique.

Une intrusion de granite pegmatitique de la Suite de Senay (affleurement 2022-EC-2114) est aussi affectée par la zone de cisaillement. Ce granite présente des microrubans millimétriques composés de sillimanite verdâtre (fibrolite) et de quartz très finement recristallisé qui forment un réseau anastomosé, correspondant vraisemblablement à des plans et des bandes de cisaillement C et C’.

Les intrusions de la Suite mafique-ultramafique de Nasacauso ne sont généralement pas déformées. Toutefois, elles se situent généralement à proximité de la zone de déformation, ce qui suggère que leur mise en place est tarditectonique à post-tectonique.

 

La projection stéréographique des pôles de la foliation montre que la fabrique S_n est généralement orientée E-W. Sa direction moyenne est de 90°, soit parallèle à l’orientation générale de la zone de cisaillement. La majorité des mesures présente un pendage fort vers le sud (75°) qui correspond à celui de la zone de cisaillement.

Certains affleurements ont permis d’observer des linéations minérales et d’étirement fortement développées, obliques à plongement vers le SE, d’attitude moyenne 179°/64°. Elles sont matérialisées par l’orientation préférentielle des cristaux de hornblende, d’actinote-trémolite ou des grains de quartz étirés.

❯ Autres fabriques

 

 

La foliation S_n+1 dans les tonalites du Complexe de la Hutte est moins pénétrative que la foliation S_n observée dans les roches métasédimentaires de la Formation de Voirdye. En lame mince, les bandes de cisaillement sont matérialisées par des niveaux riches en quartz fortement recristallisé montrant des microstructures de rotation de sous-grains et de bourgeonnement, alors que les plans C’ sont exprimés par des paillettes de chlorite fortement déformées.

Pedreira Pérez et al. (2022) rapportent la présence de linéations L_n et L_n+1 dans la Zone de cisaillement de Poste Albanel. La linéation L_n est généralement préservée dans les roches mafiques, alors que la linéation L_n+1 est plutôt enregistrée par les plans de chlorite dans les tonalites. Ce phénomène a été observé dans quelques échantillons orientés de la ZCmar (voir section « Cinématique ») ainsi qu’à l’affleurement 23-GS-4011. Dans ce cas, la linéation L_n+1 est marquée par des agrégats minéraux de basse température comme la chlorite. Contrairement à la linéation L_n qui est caractérisée par un plongement oblique, la linéation L_n+1 est subhorizontale.

 

 

❯ Plis

Ne s’applique pas.

 

❯ Relations de recoupement

La Zone de cisaillement de la Marée est coupée par des dykes mafiques néoarchéens non déformés appartenant à l’Essaim de dykes de Mistassini.

❯ Cinématique

 

Deux échantillons orientés provenant de l’affleurement 23-WM-5011 ont été examinés afin de déterminer la cinématique de la Zone de cisaillement de la Marée. Le premier est un tuf andésitique qui montre une linéation L_n oblique à plongement vers l’ouest; le second est une tonalite montrant une linéation L_n+1 subhorizontale à légèrement plongeante vers l’ouest.

En lame mince, le tuf andésitique présente des évidences d’un mouvement dextre, avec des fabriques C-S-C’ bien développées et des porphyroclastes de type sigma. Quant à la tonalite, elle montre une déformation moins pénétrative. Dans la tonalite, les plans C-S-C’ sont exprimés par de fines bandes de biotite chloritisée, ainsi que des bandes de quartz caractérisées par un mode de recristallisation dynamique dominé par la rotation de sous-grains et le bourgeonnement. Les cristaux de plagioclase sont séricitisés ou fracturés et nemontrent généralement pas d’évidence de recristallisation dynamique. Le mouvement associé à la linéation L_n+1 est également dextre.

 

Style de la déformation

Les observations de terrain montrent que les roches affectées par la Zone de cisaillement de la Marée sont plus déformées que celles du Domaine structural de La Sicotière. Ces roches présentent une forte fabrique mylonitique qui indique qu’elles ont subi une déformation intense.

La Zone de cisaillement de la Marée partage plusieurs caractéristiques structurales avec la Zone de cisaillement de Poste Albanel, incluant une orientation E-W, deux générations de linéations (L_n et L_n+1) et un mouvement dextre. Ces similitudes suggèrent qu’elles ont probablement connu une histoire tectonométamorphique similaire.

Caractéristiques métamorphiques

 

La Zone de cisaillement de la Marée (ZCmar) coupe les roches métavolcaniques du Groupe du Lac des Montagnes et de la Formation de Tichégami, les roches métasédimentaires de la Formation de Voirdye ainsi que les tonalites du Complexe de La Hutte. Les observations en lame mince de chacune de ces unités, décrites ci-après, permettent de caractériser le métamorphisme dans ce secteur.

Dans les roches métavolcaniques mafiques, les bandes de cisaillement associées aux zones de déformation sont principalement composées de cristaux aciculaires d’actinote-trémolite et de paillettes de biotite chloritisée, couramment associées à des grains d’épidote. La schistosité, quant à elle, s’exprime par des porphyroblastes de hornblende idiomorphe, partiellement remplacée par l’actinote. Le bourgeonnement des grains de quartz varie de modéré à fort, alors que la rotation des sous-grains est bien développée dans les zones les plus fortement déformées. L’assemblage actinote-hornblende-biotite ± quartz suggère des conditions métamorphiques transitionnelles entre le faciès des schistes verts et celui des amphibolites, ce qui concorde avec les températures indiquées par les microstructures du quartz. La chloritisation de la biotite et la présence d’épidote témoignent d’un métamorphisme rétrograde aux schistes verts associé à la circulation de fluides de basse température.

Les paragneiss à structure protomylonitique à mylonitique dérivés d’arénite quartzitique de la Formation de Voirdye montrent l’assemblage quartz-sillimanite-biotite-feldspath potassique ± muscovite. Les bandes de cisaillement sont formées de biotite déformée, de sillimanite (fibrolite) et de petits grains de quartz caractérisés par du bourgeonnement, alors que les grains plus grossiers se distinguent plutôt par une rotation des sous-grains. Cet assemblage et les autres éléments décrits sont typiques d’un métamorphisme prograde au faciès des amphibolites, auquel se superpose un rétromorphisme au faciès des schistes verts.

Les tonalites et les gneiss tonalitiques du Complexe de la Hutte présentent l’assemblage à hornblende-plagioclase-quartz-biotite-chlorite. Dans les plans de cisaillement les mieux développés, le quartz est fortement recristallisé et se distingue par des phénomènes de bourgeonnement et de rotation de sous-grains. À <2 km de la zone de cisaillement, ces mêmes roches sont peu déformées et ont localement préservé de minces films de quartz-plagioclase de forme irrégulière qui sont interprétés comme des pseudo-poches de fusion partielle in situ (Sawyer, 2008). 

 

Altérations

Non observées.

Caractéristiques géophysiques

La Zone de cisaillement de la Marée est située entièrement dans le Domaine structural de La Sicotière. Elle ne constitue pas une limite séparant des domaines de textures magnétiques contrastées. Son tracé suit un linéament magnétique.

Repères chronologiques

La Zone de cisaillement de la Marée est coupée par les diabases de l’Essaim de dykes de Mistassini, qui ne présentent aucune évidence de déformation. L’âge de mise en place de ces dykes (2515 à 2503 Ma; Hamilton, 2009; Davis et al., 2018) représente donc l’âge minimal de l’activité de cette zone de cisaillement.

Références

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

Autres publications

Citation suggérée

Collaborateurs

Première publication	Emmanuel Caron-Côté, géo., M. Sc. emmanuel.caron-cote@mrnf.gouv.qc.ca (rédaction) Ghyslain Roy, géo. (coordination); Claude Dion, ing., M. Sc. (lecture critique); Simon Auclair, géo., M. Sc. (révision linguistique); André Tremblay (montage HTML).
Révision(s)	Gaëlle St-Louis, ing., M. Sc.; gaelle.st-louis@mrnf.gouv.qc.ca (rédaction) Hanafi Hammouche, géo., M. Sc. (coordination); Claude Dion, ing., M. Sc. (lecture critique); Simon Auclair, géo., M. Sc. (révision linguistique); André Tremblay (Montage HTML).