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Suite d’Illuinaqtuut
Étiquette stratigraphique : [ppro]iqt
Symbole cartographique : pPiqt
 

Première publication : 14 juin 2019
Dernière modification : 26 mai 2025

 

 

Subdivision(s) informelle(s)
La numérotation ne reflète pas nécessairement la position stratigraphique.
 
pPiqt3 Norite à clinopyroxène à grain moyen, massive, à cumulat d’olivine
pPiqt2 Hornblendite à grain grossier, gabbro à grain très grossier
pPiqt1 Pyroxénite et péridotite à grain grossier, dunite
pPiqt1e Roche encaissante lessivée
pPiqt1d Roche ultramafique altérée
pPiqt1c Dunite
pPiqt1b Pyroxénite à grain grossier
pPiqt1a Péridotite à grain grossier
 
Auteur(s) :
Mathieu et Beaudette, 2019
Âge :
Paléoprotérozoïque
Stratotype :
Aucun
Région type :
À l’ouest du lac Watts (feuillet SNRC 35G16)
Province géologique :
Subdivision géologique :
Orogène de l’Ungava/Domaine Nord
Lithologie : Intrusion mafique à ultramafique
Catégorie :
Lithodémique
Rang :
Suite
Statut : Formel
Usage : Actif

 

 

Historique

Le Pluton d’Illuinaqtuut a été introduit par Mathieu et Beaudette (2019) pour nommer une intrusion ultramafique dominée par une pyroxénite grise et homogène de dimension plurikilométrique, auparavant affectée au Groupe de Watts par St-Onge et Lucas (1989). La relation de recoupement de la majorité des unités du secteur a été considérée par Mathieu et Beaudette (2019) pour retirer l’unité du Groupe de Watts. À la suite des travaux de cartographie de l’été 2021, ce pluton a été élevé au rang de suite pour refléter le caractère régional de la suite (Mathieu et al., 2022). Les travaux de cartographie géologique dans la région du lac Pingasulik (Debruyne et al., 2025) ont permis de tracer l’extension de la suite vers l’ouest (feuillet SNRC 35G12). 

Description

La Suite d’Illuinaqtuut est une laccolite magnésienne polyphasée et litée (Mathieu et al., 2023). La majeure partie de l’unité est de composition ultramafique et la pyroxénite grise, massive et homogène (pPiqt1b) est le faciès dominant. Elle comprend aussi de la péridotite (pPiqt1a) et de la dunite (pPiqt1c). Ces trois faciès (dunite, péridotite et pyroxénite) sont localement présents sur le même affleurement. Ces faciès montrent les relations cogénétiques classiques des intrusions ultramafiques litées (contacts très francs, litage primaire déstructuré, recoupement synchrone) caractéristiques d’un agencement de chambre magmatique partiellement préservée. Une unité de roche ultramafique altérée et de serpentinite (pPiqt1d) a été introduite, de même qu’une unité pour regrouper les roches encaissantes des intrusions lessivées et non reconnaissables (pPitq1e).

Un faciès secondaire (pPiqt2) composé de hornblendite à grain grossier et de gabbro à grain très grossier forme un liseré en bordure des intrusions principales. Ce faciès de hornblendite et de gabbro grossièrement grenus est interprété comme un faciès de bordure.

Un autre faciès secondaire (pPiqt3) est constitué de norite à clinopyroxène à grain moyen, massive, et à cumulat d’olivine. Sa signature géochimique (terres rares et multiélément) est semblable à celle de l’unité pPiqt2.

Suite d’Illuinaqtuut 1 (pPiqt1) : Pyroxénite et péridotite à grain grossier, dunite

Cette unité est définie par cinq unités informelles : pPiqt1a à pPiqt1e.

Suite d’Illuinaqtuut 1a (pPiqt1a) : Péridotite à grain grossier

La péridotite est une lherzolite. Elle arbore une patine d’altération grise à rouge brunâtre. La roche est gris très foncé en cassure fraiche. Elle est caractérisée par une susceptibilité magnétique élevée. Le litage magmatique est défini par une alternance de bandes centimétriques à patine grise composées de cristaux de pyroxène dans une matrice d’olivine, et de bandes rougeâtres à olivine avec une proportion moindre de pyroxène. Des niveaux d’épaisseur centimétrique riches en magnétite à grain grossier soulignent également le litage magmatique. Des veinules plurimillimétriques et non orientées de chrysotile sont observées en affleurement (24-MY-1122). Cette sous-unité affleure aussi sous la forme d’une lherzolite homogène dans laquelle des cristaux centimétriques d’orthopyroxène et de clinopyroxène isolés (20 à 40 %) baignent dans une matrice d’olivine. L’olivine représente 40 à 80 % de la roche. L’orthopyroxène est en proportion moindre (20 à 40 % des pyroxènes) par rapport au clinopyroxène. Les phases magnésiennes sont altérées en serpentine et en talc dans des proportions variables. Le clinopyroxène est ouralitisé en trémolite.

 

Suite d’Illuinaqtuut 1b (pPiqt1b) : Pyroxénite à grain grossier

 

La pyroxénite à grain grossier est une phase majeure de la suite. Elle est constituée d’une webstérite à olivine très homogène, massive, à cristaux jointifs de pyroxène moyennement à grossièrement grenu. La patine d’altération est gris foncé et la cassure fraiche exhibe un gris moyen à foncé. Très localement, les pyroxènes ne sont plus jointifs et baignent dans une matrice d’olivine. Cette unité est caractérisée par une susceptibilité magnétique élevée. St-Onge et Lucas (1992) ont décrit cette unité comme suit : « Les pyroxénites sont massives et composées essentiellement de pyroxènes primaires et grossiers. De la hornblende est observée dans les plus petits corps lithologiques. D’après les relations de recoupement, il semble que les pyroxénites soient intrusives à l’intérieur des unités de gabbro lité se trouvant au pourtour ».

Au microscope, la pyroxénite est composée de clinopyroxène à grain grossier (60 à 70 %), d’orthopyroxène à grain grossier (10 à 30 %), jusqu’à 15 % de reliques d’olivine à couronne de serpentine-carbonate-magnétite et jusqu’à 5 % de magnétite automorphe. L’ouralitisation est couramment observée. Dans les affleurements au sud de l’unité, de fines baguettes de trémolite bordent, voire remplacent, des cristaux de clinopyroxène alors que dans les affleurements plus au nord, le même phénomène s’observe avec la hornblende. Des lamelles de minéraux opaques croissent dans le clivage des pyroxènes.

 

Suite d’Illuinaqtuut 1c (pPiqt1c) : Dunite

La dunite arbore une teinte chamois caractéristique et une cassure fraiche gris très sombre à éclat vert. Le litage primaire est défini par de minces lits discontinus de chromite automorphe. Localement, une minéralisation podiforme en chromite est observée.

Au microscope, l’olivine est remplacée à divers degrés par un maillage de chrysotile et d’antigorite, et en moindre mesure par des rosettes de talc. La chromite est entourée d’une couronne de magnétite, le tout selon un habitus automorphe de spinelle. Des sulfures sont couramment observés en trace et sont composés de pyrrhotite et de chalcopyrite automorphes.

 

Suite d’Illuinaqtuut 1d (pPiqt1d) : Roche ultramafique altérée

Cette sous-unité regroupe plusieurs faciès d’altération distincts. Le premier concerne une serpentinisation intense des roches ultramafiques. Les reliques de cristaux d’olivine sont entourées d’une couronne de magnétite. Les échantillons sont composés, dans l’ordre d’importance, de serpentine (75 à 95 %), de talc, de carbonate brun et d’oxyde brun non identifié. Deux générations de serpentine sont observées, la première étant formée de fibres d’antigorite définissant la foliation, la seconde étant constituée de fibres non orientées de chrysotile. L’existence de la génération déformée de serpentine est compatible avec une altération hydrothermale antécinématique ayant affecté les roches ultramafiques dès leur mise en place. Cette sous-unité comprend le gisement de l’ancienne mine d’amiante d’Asbestos Hill, située à Purtuniq.

Le second faciès correspond à une carbonatation et à une silicification qui semble postérieure à la mise en place de la roche. Ce type d’altération est confinée dans la bordure des intrusions de la Suite d’Illuinaqtuut ainsi que dans des zones de déformation. Les phases minérales secondaires sont constituées de carbonate brun (5 à 80 %) à inclusions et bordures d’oxyde de fer et de magnésium, de quartz granoblastique en lentilles et en amas (trace à 25 %), d’amas aciculaires de talc (5 à 35 %), de feuillets de fuchsite (trace à 3 %), de feuillets sombres de chlorite, de chromite et de traces de sulfures automorphes. Des veines et des veinules de quartz sont couramment observées sur de tels affleurements.

De plus, des veines et des veinules de chrysotile en lamelles radiales strient la majorité des affleurements de la Suite d’Illuinaqtuut.

Suite d’Illuinaqtuut 1e (pPiqt1e) : Roche encaissante lessivée

Le contact entre la Suite d’Illuinaqtuut et les unités encaissantes est généralement souligné par un schiste à talc, trémolite, serpentine, chromite et magnétite. Dans le secteur du lac Watts, la suite est spatialement associée à une zone d’altération intense affectante les unités encaissantes rendant impossible par endroits l’identification du protolite ou de l’unité lithostratigraphique d’origine.

Ces roches sont blanchies par l’altération. La minéralogie primaire est remplacée par un assemblage de zoïsite, de clinozoïsite, de pistachite et de séricite automorphes ainsi que des proportions moindres de chlorite et de carbonate.

 

 

Suite d’Illuinaqtuut 2 (pPiqt2) : Hornblendite à grain grossier, gabbro à grain très grossier

Cette unité est constituée de mésogabbro hétérogranulaire (grain moyen à très grossier) passant latéralement à une hornblendite. La roche est peu déformée. La patine d’altération du gabbro est blanche et verte et celle de la hornblendite est noire. Les clinopyroxènes sont pœcilitiques et incluent des grains de quartz et de magnétite.
 

Suite d’Illuinaqtuut 3 (pPiqt3) : Norite à clinopyroxène à grain moyen, massive, à cumulat d’olivine

L’unité est constituée de norite ophitique à subophitique fortement à modérément magnétique. En affleurement, l’unité est décrite comme massive et mésocrate à mélanocrate. La patine d’altération offre une mosaïque de gris foncé et de beige clair. La roche est noire en cassure fraiche. Localement, la composition de la roche évolue vers celle d’une gabbronorite. Un niveau brunâtre de cumulat d’olivine à matrice de pyroxène a été observé. Ces variations de composition sont la preuve d’un litage magmatique d’amplitude décamétrique. 
 
La norite est constituée de 70 à 80 % de pyroxènes, soit presque exclusivement de l’orthopyroxène, et de 20 à 30 % de plagioclase. Au microscope, l’orthopyroxène se développe en intercroissance avec une orthoamphibole. Des traces de hornblende et d’apatite primaires sont observées. De l’actinote se développe au détriment des phases ferromagnésiennes mentionnées précédemment. Le plagioclase est partiellement remplacé par un assemblage de zoïsite et de pistachite. La magnétite et une proportion moindre de pyrrhotite constituent les phases opaques. Le pyroxène remplacé par l’amphibole contient un oxyde en exsolution dans le plan de clivage.
 
Le niveau de cumulat est composé de 60 % de cristaux subautomorphes à automorphes d’olivine totalement serpentinisée dans de larges cristaux d’orthopyroxène pœcilitiques remplacés par de l’amphibole. Du clinopyroxène (5 %) est également observé. De l’actinote-trémolite secondaire est rapportée. La faible déformation est soulignée par la très légère rotation de cette dernière phase minérale, impliquant une mise en place et un métamorphisme tardicinématiques.

Épaisseur et distribution

La Suite d’Illuinaqtuut affleure à l’ouest du lac Watts et autour du lac Serpentine, ainsi que dans le feuillet 35G12. La masse principale, située dans le feuillet 35G16, prend la forme d’un crochet qui s’étend sur >15 km de longueur et 600 m à 5 km de largeur. Plus à l’ouest (feuillet 35G15), la Suite d’Illuinaqtuut forme de petits hauts topographiques de dimension réduite. La suite est aisément reconnaissable sur les cartes aéromagnétiques (Intissar et al., 2014) par sa très forte susceptibilité magnétique, comparativement au gabbro et au basalte des unités encaissantes (carte interactive). Plus spécifiquement, la suite renferme des crêtes de haute susceptibilité, de forme irrégulière et allongée, généralement subparallèles aux contacts avec les unités environnantes. La suite est également délimitée de façon grossière par une zone de faibles valeurs en thorium et potassium sur les levés radiométriques (carte interactive). L’unité pPiqt3 affleure à l’ouest du lac Spartan et couvre une superficie de ~1,75 km². Dans le feuillet 35G12, la Suite d’Illuinaqtuut se présente comme une série de petites intrusions de <4 km² disposées en plusieurs chapelets. 

Datation

Aucune.

Relation(s) stratigraphique(s)

 

La Suite d’Illuinaqtuut est intrusive dans les gabbros de la Suite de Watts. En effet, on note sur l’affleurement 2018-GM-5048 que la pyroxénite à grain grossier de l’unité pPiqt1b coupe un leucogabbro fortement déformé de la Suite de Watts, ce dernier se retrouvant aussi en enclaves anguleuses déformées dans la première. La Suite d’Illuinaqtuut coupe les roches volcaniques du Groupe de Parent (pPpa) ainsi que les roches métasédimentaires du Groupe de Spartan (pPsp), et s’injecte au contact entre ces deux groupes. La Suite d’Illuinaqtuut coupe aussi les suites de Vanasse (pPvas), de Serpentine (pPsep) et de Sanimuapik (pPsak), les plutons de Pingasulik (pPpig) et d’Ulluvinaaluit (pPull) ainsi que le Complexe métamorphique de Qaaneq (pPqaa).

La Suite de Niqituraaqiaruk (pPnqk) coupe les roches ultramafiques de la Suite d’Illuinaqtuut. Cette observation a été faite à l’ouest du lac Serpentine (Mathieu et al., 2023). L’ensemble de ces relations stratigraphiques permet d’estimer un âge de mise en place de la Suite d’Illuinaqtuut entre 1859 ±2 Ma (âge de la Suite de Vanasse; Machado et al., 1991) et 1848 +6/-4 Ma (âge de la Suite de Niqituraaqiaruk; Parrish, 1989).

Paléontologie

Ne s’applique pas.

Références

Publications accessibles dans Sigéom Examine

DEBRUYNE, T., CÔTÉ-ROBERGE, M., MATHIEU, G., 2025. Géologie de la région du lac Pingasulik, Orogène de l’Ungava, Nunavik, Québec, Canada. MRNF, BG 2024-03, 1 plan.

INTISSAR, R., BENAHMED, S., D’AMOURS, I., 2014. LEVÉ MAGNÉTIQUE ET SPECTROMÉTRIQUE AÉROPORTÉ DE LA PARTIE NORD DE L’OROGÈNE DE L’UNGAVA, PROVINCE DE CHURCHILL. MRN; DP 2014-03, 10 pages, 410 plans.

MACHADO, N., DAVID, J., CARIGNAN, J., ZHANG, Q., GARIEPY, C., 1991. GÉOCHRONOLOGIE U-PB DU TERRITOIRE QUÉBÉCOIS : FOSSES DE L’UNGAVA ET DU LABRADOR, PROVINCE DE GRENVILLE ET SOUS-PROVINCES DE PONTIAC ET DE L’ABITIBI. RAPPORT STATUTAIRE SOUMIS AU GOUVERNEMENT DU QUÉBEC; GM 59899, 47 pages.

MATHIEU, G., BEAUDETTE, M., 2019. Géologie de la région du lac Watts, Domaine Nord, Fosse de l’Ungava, Nunavik, Québec, Canada. MERN; BG 2019-04, 1 plan.

MATHIEU, G., VANIER, M.-A., DEBRUYNE, T., 2022. Géologie de la région du lac Spartan, Orogène de l’Ungava, Nunavik, Québec, Canada. MERN; BG 2022-06, 1 plan.

MATHIEU, G., VANIER, M.-A., DEBRUYNE, T., 2023. Géologie de la région du lac Serpentine, Domaine Nord, Orogène de l’Ungava, Nunavik, Québec, Canada; MRNF; BG 2023-04, 1 plan.

Autres publications

 

PARRISH, R.R., 1989. U-Pb geochronology of the Cape Smith Belt and Sugluk Block, northern Québec. Geoscience Canada; volume 6, pages 126-130. journals.lib.unb.ca/index.php/GC/article/view/3609

ST-ONGE, M.R., LUCAS, S.B., 1989. Géologie, Lac Watts, Québec. Commission géologique du Canada; Carte série « A ». 1721A. doi.org/10.4095/127673

ST-ONGE, M.R., LUCAS, S.B., 1992. New insight on the crustal structure and tectonic history of the Ungava Orogen, Kovik Bay and Cap Wolstenholme, Quebec. Geological Survey of Canada; Paper 92-1C, pages 31-41. doi.org/10.1139/e92-064

 

 

Citation suggérée

Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF). Suite d’Illuinaqtuut. Lexique stratigraphique du Québec. https://gq.mines.gouv.qc.ca/lexique-stratigraphique/province-de-churchill/pluton-illuinaqtuut [cité le jour mois année].

Collaborateurs

Première publication

Guillaume Mathieu, ing., M. Sc. guillaume.mathieu@mrnf.gouv.qc.ca; Mélanie Beaudette, géo., B. Sc. (rédaction)

Mehdi A. Guemache, géo., Ph. D. (coordination); James Moorhead, géo., M. Sc. (lecture critique); Simon Auclair, géo., M. Sc. (révision linguistique); Céline Dupuis, géo., Ph. D. (version anglaise); Ricardo Escobar Moran (montage HTML). 

Révision(s)

Guillaume Mathieu, ing., M. Sc.; Myriam Côté-Roberge, géo., M. Sc.; Thomas Debruyne, géo., B. Sc. (rédaction)

Philippe Pagé, géo., Ph. D. (coordination); Yannick Daoudene, géo., Ph. D. (lecture critique); Simon Auclair, géo., M. Sc. (révision linguistique); André Tremblay (montage HTML).

 
14 juin 2019