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Groupe de la Hutte Sauvage
Étiquette stratigraphique : [ppro]ht
Symbole cartographique : pPht
 

Première publication : 29 janvier 2019
Dernière modification : 21 mars 2023

 

 

Subdivision(s) informelle(s)
La numérotation ne reflète pas nécessairement la position stratigraphique.
 
Aucune
 
Auteur(s) :Van der Leeden, 1994
Âge :Paléoprotérozoïque
Stratotype :Aucun
Région type :Région du lac de la Hutte Sauvage (feuillets SNRC 24A02 et 24A07)
Province géologique :Province de Churchill
Subdivision géologique :Domaine lithotectonique de Mistinibi-Raude
Lithologie :Roches métasédimentaires
Catégorie :Lithostratigraphique
Rang :Groupe
Statut :Formel
Usage :Actif

 

 

Historique

Initialement délimité comme un lambeau de quartzite (Taylor, 1979), le Groupe de la Hutte Sauvage a été défini comme une unité lithostratigraphique formelle par van der Leeden (1994) dans la région du lac de la Hutte Sauvage d’où elle tire son nom. Cette unité a été portée au rang de groupe compte tenu de la recristallisation métamorphique (faciès inférieur des amphibolites) et de la déformation qui n’ont pas été suffisantes pour détruire les structures sédimentaires plus grandes que 2 mm, ni pour modifier substantiellement la forme des fragments conglomératiques. Une analyse de bassin et du milieu de sédimentation a donc pu être réalisée dans le cadre d’une étude approfondie (Girard, 1992).

Jackson et Taylor (1972) considéraient que les roches maintenant assignées au Groupe de la Hutte Sauvage faisaient partie de la couverture supracrustale aphébienne associée au Groupe de Lake Harbour (aujourd’hui Suite de Lake Harbour), défini sur l’île de Baffin dans les Territoires-du-Nord-Ouest. Van der Leeden (1994) mentionne que cette corrélation semble prématurée étant donnée la distance entre les deux unités. Les travaux de cartographie subséquents et les vérifications réalisées dans le cadre de la synthèse du sud-est de la Province de Churchill (Lafrance et al., 2018) indiquent plutôt que les roches du Groupe de la Hutte Sauvage sont bien distinctes de celles du Groupe de Lake Harbour.

Description

Le Groupe de la Hutte Sauvage est un assemblage métamorphisé de roches gréseuses qui a été divisé en quatre sous-unités informelles par van der Leeden (1994) : 1) une sous-unité de méta-arkose; 2) une sous-unité de méta-arkose conglomératique; 3) une sous-unité de méta-arénite quartzitique; et 4) une sous-unité de métawacke quartzitique. L’auteur n’a toutefois pas tracé les contacts entre les unités dû au passage progressif d’une sous-unité à l’autre et à l’échelle de cartographie.

Van der Leeden (1994) n’a pas été en mesure d’établir la séquence stratigraphique du Groupe de la Hutte Sauvage. La dissymétrie lithologique bien marquée permet de soupçonner la présence de plus d’une séquence et des changements latéraux de faciès d’est en ouest. La partie ouest de l’unité comprend majoritairement des méta-arénites et des métaconglomérats avec la présence marquée d’hématite. Ces roches présentent des stratifications horizontales, des stratifications obliques planaires et en feston, des laminations, des chenaux, des lag deposits et des lits entrecroisés renversés.

La méta-arkose (sous-unité D2a de van der Leeden, 1994) est blanche, rose pâle, vert jaunâtre pâle ou grise, avec localement une altération beige. Le grain varie de sable moyen à très fin. Des variétés conglomératiques existent, cependant, à part la présence de cailloux et de blocs, la recristallisation et la déformation des grains rendent difficile l’identification des grains détritiques. L’orthose est plus abondante que le microcline. La couleur vert jaunâtre de certaines méta-arkoses semble être causée par une faible quantité de muscovite-séricite et d’épidote. La méta-arkose est localement tachetée rouge foncé en raison de la présence de paillettes d’hématite atteignant 15 mm de longueur sur moins de 0,1 mm d’épaisseur. Certains quartz rouges sont plaqués d’hématite. La spécularite (≤2 %) est disséminée ou se concentre en lamines millimétriques. Des niveaux de méta-arkose conglomératique contiennent quelques fragments de quartz (jusqu’à 5 cm de diamètre) et de granitoïdes blancs de 3 mm à 30 cm par 1 à 15 cm. Quelques niveaux renferment de rares galets de métasiltite grise.

L’épaisseur du litage des méta-arkoses varie de moins de 1 mm à 35 cm. Les laminations sont formées d’agrégats de spécularite. Les lits sont souvent inégaux, continus et de composition régulière; d’autres, en forme de chenaux, sont discontinus et non-uniformes. Les stratifications obliques sont communes, essentiellement en feston, localement planaires ou tabulaires. Des lits entrecroisés sont aussi observés sur des épaisseurs centimétriques à décimétriques. Des lits entrecroisés à polarité renversée, des lits granoclassés et des chenaux d’érosion de 1 à 2 m de profondeur sont décrits par van der Leeden (1994). La méta-arkose comprend également de 5 à 10 % de métagrès calcareux. Ces roches sont blanches à beige pâle avec une patine brun foncé. La matrice est un sable arkosique moyen à très grossier. Le ciment de calcite s’altère facilement, laissant les cailloux en relief positif. Ces cailloux sont surtout des fragments équidimensionnels, arrondis à allongés, de granitoïdes blancs, de quartz et, plus localement, de métavolcanites ou métasédiments fins de couleur vert moyen. Le passage latéral et graduel de métagrès calcareux à des marbres gréseux a été observé localement. Les marbres sont blanc rosâtre ou beige pâle, à grain fin, massifs à faiblement foliés et de 10 à 30 cm d’épaisseur.

La sous-unité de méta-arkose conglomératique (D2b, van der Leeden, 1994) comprend également du métaconglomérat polygénique arkosique et un peu de méta-arkose interstratifiés. La matrice varie de méta-arkose à métagrauwacke feldspathique dans laquelle plus de biotite est présente. Les clastes n’ont pas de granulométrie unimodale, variant de millimétriques à centimétriques (maximum de 32 cm). Les métaconglomérats ne sont pas typiques de ceux formés de gravier de plage. Les cailloux sont subangulaires à subarrondis; en plusieurs endroits, leur forme a été modifiée sous l’effet de contraintes tectoniques. Parmi la variété de cailloux observés, on note : 1) des granitoïdes blancs à biotite ou avec taches d’hématite; 2) du granite rose pâle ou blanc, à grain moyen à grossier; 3) de l’aplite rose; 4) du gneiss quartzofeldspathique à biotite folié; 5) du gneiss quartzofeldspathique œillé mylonitique; 6) du quartz fumé ou laiteux; 7) du schiste gris; 8) de la siltite ou dacite grise; 9) de l’andésite porphyrique et schisteuse; 10) de l’amphibolite; et 11) de l’ultramafite verte à grain fin. Le métaconglomérat est localement déformé dans les zones de failles.

La sous-unité de méta-arénite quartzitique (D2c, van der Leeden, 1994) comprend également de la métasubarkose. Les roches sont blanches ou blanc verdâtre, leur composition est plus mature que la sous-unité de méta-arkose et les niveaux calcareux sont absents. Elles contiennent encore de l’hématite en petites taches et de la spécularite en grains disséminés et en lamines. La méta-arénite a de petits (quelques gros) cailloux arrondis monominéraux de quartz, d’agrégats de quartz très fin, d’orthose ou d’agrégats de microcline. Les gros fragments de quartz sont surtout clairs ou blanc laiteux, rarement fumés, jaunâtres (citrine) ou violets (améthyste). Les grains de la méta-arénite étant souvent aplatis dans la schistosité, le litage et les lits entrecroisés sont plus difficiles à déceler.

Enfin, la sous-unité de métawacke quartzitique (D2d, van der Leeden, 1994) ou de schiste à quartz et muscovite contient localement des lamines de spécularite et des taches rouges d’hématite ± muscovite. Certaines de ces roches contiennent de la piémontite en trace. Les clastes sont moins nombreux, représentés par des petits cailloux aplatis dans la schistosité. Ils sont surtout formés de quartz et d’agrégats de quartz ou de microcline. La déformation étant plus intense dans cette sous-unité, le litage est difficile à déceler.

Épaisseur et distribution

Le Groupe de la Hutte Sauvage forme une lentille nord-sud d’une longueur de 46 km sur 7,5 km de largeur maximale (276 km2) dans la partie centre ouest du Domaine de Mistinibi-Raude (Charette et al., 2019). Plus précisément, il se trouve dans les feuillets SNRC 24A07 et 24A02. La méta-arkose occupe surtout la moitié occidentale de la lentille régionale. La méta-arkose conglomératique occupe une bande le long de la bordure méridionale du Groupe de la Hutte Sauvage et passe de façon transitionnelle à la méta-arkose. Le métawacke constitue le faciès principal dans la partie orientale de l’unité. Le conglomérat est concentré dans la partie sud-ouest de l’unité.

Datation

Les analyses sur 61 zircons ont donné des âges entre 2570 et 1978 Ma. Les âges détritiques sont caractérisés par trois modes dominants, autour de 2510, 2320 et 2080 Ma (Corrigan et al., 2018). Des analyses plus poussées sur le zircon détritique le plus jeune ont donné un âge moyen de 1987 Ma, interprété comme l’âge maximal de dépôt. Ces âges indiquent que le Groupe de la Hutte Sauvage semble dériver des roches du Domaine de Mistinibi-Raude, sans apport significatif des domaines lithotectoniques adjacents.

Une datation préliminaire a aussi indiqué une population de zircons détritiques autour de 2321 Ma et un âge maximal de sédimentation de 1973 Ma. Ces résultats infirment l’interprétation précédente de Girard (1992) selon laquelle le Groupe de la Hutte Sauvage serait en partie dérivé de l’érosion de la Supersuite de De Pas (1861 à 1805 Ma).

UnitéNuméro d’échantillonSystème isotopiqueMinéralÂge maximal de dépôt (Ma)(+)(-)Âge détritique (Ma)(+)(-)Référence(s)
pPht14CXA-D018A1U-PbZircon<1987772510, 2320, 2080  Corrigan et al., 2018
2016-MV-4030AU-PbZircon<19732626232133Davis, 2017

 

Relation(s) stratigraphique(s)

Le contact entre les paragneiss migmatitisés du Complexe de Mistinibi et les roches métasédimentaires du Groupe de la Hutte Sauvage montre un changement abrupte de faciès métamorphique. Les roches de la Hutte Sauvage ont échappé au métamorphisme supérieur qu’ont subi les roches avoisinantes, indiquant qu’elles ont été formées ultérieurement à ce métamorphisme; la surface de contact initiale correspondait donc à une discordance angulaire par rapport à la gneissosité du socle adjacent. Le Groupe de la Hutte Sauvage occupe une position stratigraphique supérieure par rapport aux complexes de Mistinibi et de Ntshuku. Le contact ouest avec le Complexe de Mistinibi est mylonitisé (Girard, 1992; van der Leeden, 1994). Selon ces auteurs, un affleurement y exposerait un contact de faille indiquant un chevauchement du bloc occidental vers l’est.

Sur le plan régional, les indicateurs de direction de courant sont variables. La diminution générale de grosseur, de quantité et de variété des cailloux des roches conglomératiques d’ouest en est témoigne d’une provenance occidentale des sédiments. La présence de méta-arkose, de métaconglomérats polygéniques et de blocs et cailloux de granitoïdes est généralement considérée indicatrice d’érosion et de sédimentation relativement rapides. Un soulèvement concomitant important du socle cristallin est impliqué. Les mylonites et failles immédiatement à l’ouest du Groupe de la Hutte Sauvage témoigneraient, selon Girard (1992), d’une activité tectonique intense qui aurait pu être contemporaine de la sédimentation de l’unité. Toutefois, les données géochronologiques tendent plutôt à infirmer cette hypothèse (Charette et al., 2019).

Régionalement, van der Leeden (1994) interprète cet empilement silicoclastique épicontinental comme une double quille formant un synclinal régional aux flancs coffrés, localement renversé vers l’ouest. Les lithologies et structures sont caractéristiques d’un milieu alluvial, avec sédimentation dans un système fluvial tressé (dépôts de faciès grenus, rivières de basses sinuosités; Girard, 1992; van der Leeden, 1994). Un tel système aurait dû déposer ses sédiments à proximité de leur source.

 

Paléontologie

Ne s’applique pas. 

Références

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

 

CHARETTE, B., LAFRANCE, I., VANIER, M.-A., GODET, A., 2019. Domaine lithotectonique de Mistinibi-Raude, sud-est de la Province de Churchill, Nunavik, Québec, Canada : synthèse de la géologie. MERN; BG 2019-07, 2 plans.

LAFRANCE, I., CHARETTE, B., VANIER, M.-A., 2018. Sud-est de la Province de Churchill, Nunavik, Québec, Canada: synthèse de la géologie. MERN; BG 2018-12

VAN DER LEEDEN, J., 1994. GEOLOGIE DE LA REGION DU LAC DE LA HUTTE SAUVAGE (TERRITOIRE DU NOUVEAU-QUEBEC). MRN; MB 94-32, 109 pages, 2 plans.

 

 

Autres publications

 

 

 

CORRIGAN, D., WODICKA, N., McFARLANE, C., LAFRANCE, I., VAN ROOYEN, D., BANDYAYERA, D., BILODEAU, C., 2018. Lithotectonic framework of the Core Zone, Southeastern Churchill Province, Canada. Geoscience Canada; volume 45, numéro 1, pages 1-24. https://doi.org/10.12789/geocanj.2018.45.128

DAVIS, D., 2017. U-Pb Geochronology of Zircon, in samples from northern Quebec. Université de Toronto; document inédit, 29 pages.

GIRARD, R., 1992. Le Groupe de la Hutte Sauvage : sédimentation alluvionnaire épi-orogénique dans l’arrière-pays de la fosse du Labrador (Protérozoïque inférieur, Nouveau-Québec). Canadian Journal of Earth Science; volume 29, pages 2571-2582. https://doi.org/10.1139/e92-204

JACKSON, G.D., TAYLOR, F.C., 1972. Correlation of major Aphebian rock units in the northeastern Canadian Shield. Canadian Journal of Earth Sciences; volume 9, pages 1659-1669. https://doi.org/10.1139/e72-146

TAYLOR, F.C.,1979. Reconnaissance geology of a part of the Precambian Shield, northeastern Quebec, northern Labrador and Northwest Territories. Commission géologique du Canada; Mémoires 393, 99 pages, 19 plans. https://doi.org/10.4095/124930

Citation suggérée

 

Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF). Groupe de la Hutte Sauvage. Lexique stratigraphique du Québec. http://gq.mines.gouv.qc.ca/lexique-stratigraphique/province-de-churchill/groupe-de-la-hutte-sauvage [cité le jour mois année].

 

Collaborateurs

Première publication

Isabelle Lafrance, géo., M. Sc. isabelle.lafrance@mern.gouv.qc.ca (rédaction)

Mehdi A. Guemache, géo., Ph. D. (coordination); Pierre Lacoste, géo., M. Sc. (lecture critique); Céline Dupuis, géo., Ph. D. (révision linguistique et version anglaise); Yan Carette (montage HTML). 

 
29 janvier 2019