Historique

Bérard (1959) cartographie, dans la région de la rivière Témiscamie (feuillet SNRC 32P09), une unité de gneiss granitique à biotite ± hornblende et une unité de granite et pegmatite qu’il désigne sous le nom de « Complexe de l’Ouest ». Par la suite, différentes unités de gneiss, de migmatite et de granite sont cartographiées et décrites, mais non nommées, dans les feuillets 23C04, 22M11 à 22M16, 32P07 à 32P11 et 32P14 à 32P16 (Chown, 1960, 1962, 1964, 1971; Hashimoto, 1965; Chown et Caty, 1973; voir le tableau ci-dessous). Le Complexe d’Épervanche est officiellement introduit par Genest (1987) dans la région du lac Indicateur (feuillet 22M13). Genest (1989) élargit le complexe vers le NE et l’ouest et le subdivise en dix unités et sous-unités, dont sept correspondent aux unités informelles actuelles (voir le tableau ci-dessous). Dans les travaux de compilation du Ministère, les roches correspondant au Complexe d’Épervanche dans le feuillet 23C sont assignées à la Suite d’Atticoupi (Aatc1) et à la Terrane de Gagnon (AGAG) (Lamothe et al., 1997). Le Complexe d’Épervanche est reconnu dans les travaux touchant aux feuillets 23D et 32P, mais non subdivisé bien que différentes lithologies soient délimitées sur la carte (Morin et Ayotte, 1998a-d; Morin, 1998a-f, h-j; voir le tableau ci-dessous). Huss (2002) compile et réorganise ensuite la carte géologique des feuillets 32P06 à 32P16 à partir de rapports géologiques, de travaux et de rapports statutaires du Ministère. Dans les feuillets 22M11 à 22M16, Grant (2002a-f) subdivise le complexe en une unité indifférenciée et neuf unités informelles sur la base des travaux de Genest (1989). Ces unités incluent cependant des roches situées au sud des limites actuelles du Complexe d’Épervanche. Ces unités sont retirées du Complexe d’Épervanche dans le cadre de la rédaction de cette fiche stratigraphique parce qu’elles appartiennent à la Province du Grenville. Le nom fait référence à la rivière Épervanche qui coule dans le feuillet 22M14.

Description

Le Complexe d’Épervanche est principalement constitué d’une unité de gneiss, de migmatite et de granite (Aepe1) accompagnée de gneiss quartzofeldspathique (Aepe2) ainsi que de proportions mineures de gneiss tonalitique et de tonalite à hornblende (Aepe3), de migmatitte à amphibole (Aepe4) et de paragneiss et de migmatite (Aepe5). Une unité de granite, de granodiorite et de pegmatite (Aepe6) est également présente et domine dans la partie NW du complexe. Finalement, une unité mineure de rhyolite porphyrique à phénocristaux de quartz et de feldspath (Aepe7) est associée au Complexe d’Épervanche.

Complexe d’Épervanche 1 (Aepe1) : Gneiss, migmatite et granite 

Le Complexe d’Épervanche est principalement formé de gneiss quartzofeldspathique à biotite majoritairement migmatitisé (Aepe1) (Genest, 1987; Huss, 2002). De texture massive, litée ou schisteuse, le gneiss présente partout une couleur grise assez uniforme dont la teinte est fonction du pourcentage de biotite qui peut varier de 15 à 35 %. Il se caractérise par une granulométrie fine et une mosaïque équigranulaire de quartz, de plagioclase et de biotite. En lame mince, les roches les moins affectées par le métamorphisme révèlent une composition tonalitique où le quartz (30 %), le plagioclase (An₃₀, 35 %) et la biotite (35 %) sont distribués uniformément. Cependant, plusieurs paragenèses ont été identifiées : quartz-plagioclase-biotite-muscovite, quartz-plagioclase-microcline-biotite-muscovite et quartz-plagioclase-microcline-hornblende-biotite-sphène. Le microcline est observé dans les faciès appauvris en biotite et enrichis en titano-magnétite; il est interstitiel et généralement xénomorphe. Le quartz primaire et secondaire présente généralement une extinction ondulante et communément un début de cataclase. Des niveaux grenatifères sont présents localement.

Le gneiss a subi une granitisation partielle et de la migmatitisation d’intensité variable, jusqu’à l’anatexie. Ainsi, plusieurs variétés de migmatites sont observées : embréchites, structures stromatitiques, plis ptygmatiques, schlierens, agmatites, mobilisat granitique, pegmatite (Genest, 1987). Les mélanosomes sont principalement composés de biotite et, localement, de hornblende. Des altérations en chlorite, quartz, calcite et épidote sont communes. Au voisinage des mélanosomes, une mylonitisation peut être observée dans le paléosome où les feldspaths subissent un début de rotation. Les leucosomes sont composés de plagioclase, de microcline, de perthite et de quartz et présentent généralement une altération importante en zoïsite. En lame mince, la biotite montre une orientation préférentielle, ce qui est à l’origine de l’aspect lité des mélanosomes dans les migmatites stromatitiques.

Non cartographiable à l’échelle du 1/50 000, le gneiss mylonitisé est commun et intimement associé aux migmatites (Genest, 1987). En affleurement, il montre une texture porphyroclastique. En lame mince, les cristaux de feldspath sont broyés en périphérie et ont subi une rotation complète. Le quartz microcristallin est réparti dans toute la roche, tandis que la biotite se concentre dans des laminations ondulantes, épousant le contour des porphyroclastes de plagioclase et de microcline. Des veinules de quartz polycristallin sont présentes, généralement parallèles à la foliation ou au rubanement et possèdent une extinction ondulante.

La migmatite contient du mobilisat granitique, généralement rose (Genest, 1987). Partout associée à la migmatitisation, la granitisation n’est communément pas assez importante pour avoir développé une unité distincte cartographiable. La roche est généralement à grain grossier, équgranulaire et légèrement gneissique par endroits. Le mobilisat granitique est composé de plagioclase altéré en zoïsite, de microcline, de quartz polycristallin et, localement, de biotite interstitielle (≤15 %) et d’une proportion mineure de chlorite. Le granite présente un aspect pegmatitique localement, et les gros feldspaths cataclasés auraient subi une légère mylonitisation.

Complexe d’Épervanche 2 (Aepe2) : Gneiss quartzofeldspathique

Une unité de gneiss quartzoeldspathique (Aepe2) a été individualisée dans la région de la rivière Tichégami (feuillets 32P14 et 32P15; Genest, 1989; Morin, 19998g-h), ainsi que dans la région du lac de la Décrépitude (feuillets 22M13 et 22M14; Genest, 1987; Grant, 2002c-d; Huss, 2002). Les assemblages minéralogiques sont similaires à ceux décrits pour le gneiss quartzoeldspathique de l’unité Aepe1.

Complexe d’Épervanche 3 (Aepe3) :  Gneiss tonalitique et tonalite à hornblende

Selon Genest (1989), Morin et Ayotte (1998a), Morin (1998e) et Grant (2002e), l’unité Aepe4 est constituée de gneiss tonalitique à hornblende et, localement, de tonalite. Cependant, l’unité est également cartographiée comme du gneiss granitique à biotite (Chown, 1964), du gneiss à quartz, plagioclase et biotite (Chown, 1971) ou du gneiss quartzofeldapthique et du gneiss granodioritique (Huss, 2002). L’unité Aepe3 interceptée en forage dans le feuillet 32P10 consiste en granite rose et gneiss granitique gris étroitement liés (Desbiens et Girard, 2003a-b; Desbiens et al., 2004). Le granite rose est communément légèrement magnétique et à grain grossier avec des passées ou des filonnets pegmatitiques ou, localement, amphibolitiques. Il est composé de plagioclase (65 %), de feldspath potassique (5 à 10 %), de quartz (10 à 15 %), de biotite partiellement chloritisée (1 à 20 %) et alignée selon la foliation ainsi que de magnétite disséminée (1 à 3 %). Le gneiss se différencie par une couleur généralement grise et une foliation bien développée.

Complexe d’Épervanche 4 (Aepe4) : Migmatite à amphibole

L’unité Aepe4 est composée de migmatite à amphibole (Chown, 1962; Genest, 1987, 1989; Morin, 1998g-h; Grant, 2002c). La roche se présente sous la forme de lentilles décamétriques ou en séquences tabulaires d‘épaisseur constante (Genest, 1987). Elle contient certaines lithologies et structures qui tendent à démontrer une affinité avec les roches volcano-sédimentaires du Groupe de Tichégami : métaquartzite riche en magnétite, structures litées, amphibolite coussinée à grenat et présence de sulfures disséminés. Dans l’ensemble, la roche est noirâtre et contient ici et là de minces leucosomes grenatifères irréguliers, plus ou moins parallèles à la foliation. La roche contient en moyenne 65 % de hornblende, de l’oligoclase, du microcline et du quartz. Le quartz est xénomorphe et associé aux roches contenant une proportion moindre de hornblende. Le microcline résulte du métamorphisme, est pœcilitique et forme localement des porphyroblastes. Des porphyroblastes de grenat ont également été observés localement. Le microline et le grenat confèrent à la roche une texture porphyroblastique. Les minéraux accessoires sont principalement la magnétite, le sphène, le leucoxène et la biotite. Les produits d’altération secondaire sont la zoïsite, l’albite, la chlorite, l’épidote, la calcite, le quartz et, par endroits, l’actinote.

Complexe d’Épervanche 5 (Aepe5) : Paragneiss et migmatite

Une unité d’étendue restreinte formée de paragneiss et de migmatite (Aepe5) est individualisée au nord du lac du Champignon (feuillets 22M13 NE et 22M14 NW; Genest, 1989; Grant, 2002c-d). La roche consiste en gneiss quartzofeldspathique à grain grossier, localement migmatitisé (recristallisation d’anatexie) (SDBJ, 1980). Des passées et des poches pegmatitiques sont observées. La roche est composée de quartz (20 à 40 %), de feldspath potassique rose (30 à 50 %) et de feldspath blanc (30 %). Du paragneiss quartzitique (85 % de quartz) à biotite (15 %) est également présent en rubans, en enclaves et en laminations. Ce paragneiss micacé est gris pâle en surface fraîche et brun rouille en surface altérée dû à l’oxydation du fer contenu dans la biotite. La roche montre des plis polyphasés en lentilles, pseudo-ptygmatiques et des plissotements polyphasés, dans le prolongement de la schistosité régionale, mais qui présentent de nombreuses variations de direction. Ils sont par endroits soulignés par du mobilisat quartzitique. Le rubanement est très bien développé dans les zones plissées. Des zones mylonitisées de 5 à 10 cm d’épaisseur sont également observées le long de plans de faille

Complexe d’Épervanche 6 (Aepe6) : Granite massif, granodiorite massive et pegmatite

En plus du granite d’injection lit par lit associé au gneiss (Aepe1), le Complexe d’Épervanche contient des amas granitiques et pegmatitiques ne recelant aucune texture gneissique empruntée aux enclaves digérées ou au gneiss préexistant (Bérard, 1959). Ces granite et pegmatite massifs contiennent par endroits des enclaves anguleuses d’amphibolite. Le granite est rose tacheté et blanc en surface fraîche, rose à gris en surface altérée et la granulométrie varie de moyenne à très grossière et pegmatitique; certaines pegmatites contiennent des cristaux >60 cm de longueur (Bérard, 1959; Chown, 1960). Ces roches sont composées de microcline (50 à 60 %), de plagioclase (5 à 15 %), de quartz (25 à 30 %) et d’une combinaison de biotite, de muscovite, de hornblende et de magnétite (<5 à 15 %) (Bérard, 1959; Chown, 1960, 1964; Genest, 1987). Le microcline est généralement xénomorphe, perthitique, traversé par des lamelles sinueuses d’albite et communément pœcilitique sur des reliques de plagioclase (Chown, 1964; Genest, 1987). Le plagioclase est généralement altéré et communément zoné avec une auréole externe plus alcaline (Chown, 1960; Genest, 1987). Les minéraux accessoires sont principalement la chlorite, qui forme un mince liséré autour de la biotite et de la hornblende (Chown, 1960), le grenat, la tourmaline, l’allanite, le zircon et l’apatite (Genest, 1987). La pegmatite possède communément une texture graphique caractéristique (Bérard, 1959; Genest, 1987). En certains endroits, le granite est à grain grossier ou moyen plutôt que pegmatitique et le plagioclase constitue 20 à 30 % de la roche (Chown, 1964).

De la granodiorite est également mentionnée par Chown (1962), Morin et Ayotte (1998a-d), Morin (1998b-e, g-i) et Grant (2002a-f). La roche est grise à rose et renferme 20 à 30 % de quartz, ~40 % de plagioclase, ~20 % de microcline et ≤10 % de biotite et de muscovite (Chown, 1962). Cependant, la structure varie de massive à gneissique et l’unité englobe par endroits des roches des unités gneissiques actuelles (p. ex. Aepe2).

Complexe d’Épervanche 7 (Aepe7) : Rhyolite porphyrique à phénocristaux de quartz et de feldspath, porphyre quartzofeldspathique

L’unité Aepe7 est constituée de rhyolite porphyrique à phénocristaux de quartz et de feldspath ainsi que de porphyre quartzofeldspathique (Chown,1971; Genest, 1989; Morin, 1998e; Huss, 2002). Ces roches sont localement gloméroporphyriques. Elles sont généralement rouge foncé, mais peuvent être roses, vertes, grises ou noires par endroits (Chown, 1971). Elles comprennent des phénocristaux de quartz vitreux, de feldspath potassique et de plagioclase. Les phénocristaux de quartz et de feldspath rouge tabulaire constituent généralement <10 % et dépassent rarement >35 % de la roche. Les phénocristaux de plagioclase et de feldspath potassique sont fortement altérés et tachés d’hématite, alors que les phénocristaux de quartz sont partiellement résorbés. La mésostase est partiellement recristallisée en masses sphérolitiques de feldspath potassique qui rayonnent à partir des phénocristaux. Les minéraux accessoires tardifs sont la pyrite et la magnétite. Une seconde génération de quartz enduit les diaclases et les fractures et remplit les ombres de pression autour des cristaux de quartz primaire et de pyrite. Selon Genest (1989), les roches porphyriques de l’unité Aepe6 présentent certaines affinités avec les granitoïdes de l’unité Aepe6.

Épaisseur et distribution

Le Complexe d’Épervanche couvre une importante superficie de la partie NE de la Sous-province d’Opatica (feuillets 23C03 à 23C06, 23D01 à 23D03, 23D07, 22M11 à 22M16, 32P06 à 32P11 et 32P14 à 32P16). En forme de « botte basculée », il s’étend sur ~275 km selon une orientation NE-SW et sur selon une orientation. Sa « largeur » NW-SE varie de quelques kilomètres à ~95 km dans sa portion SW.

Datation

Aucune.

Relations stratigraphiques

Le Complexe d’Épervanche est limité au SE par le front du Grenville. Du NE au NW, il est en contact avec la Suite d’Atticoupi, le Complexe de Séchelles, le Supergroupe d’Otish, principalement le Groupe d’Indicator, et le Complexe de Mingault. Dans sa portion ouest, il est étroitement lié avec le Groupe de Tichégami au NE (feuillets 22M12, 22M13 et 32P16) et au SW (feuillets 32P07 et 32P08) : les roches gneissiques du Complexe d’Épervanche renferment des lambeaux étroits d’amphibolites et de schistes (métasédimentaires et métavolcaniques) du Groupe de Tichégami (Genest, 1989; Huss, 2002). Le Complexe d’Épervanche et le Groupe de Tichégami sont séparés du Groupe d’Indicator sus-jacent par une discordance (Genest, 1987). La composition du conglomérat polygénique de base du Groupe d’Indicator coïncide grosso modo avec celle du socle volcano-sédimentaire appartenant au Groupe de Tichégami et on y relève des lithologies quartzofeldspathiques du Complexe d’Épervanche (Genest, 1987). Sinon, la portion ouest du complexe est en contact avec des unités lithologiques métamorphiques archéennes non différenciées : gneiss à biotite, migmatite amphibolitique et gneiss quartzofeldspathique. Au SW, dans la région de la rivière Pépeshquasati (feuillet 32P10), la Formation de Papaskwasati est sus-jacente au Complexe d’Épervanche, particulièrement à l’unité de rhyolite porphyrique et de porphyre quartzofeldspathique (Aepe6); l’arkose à la base de la formation est quasi identique au porphyre, dont elle dérive (Chown, 1971). Plus au SW, des portions discontinues du Complexe d’Épervanche sont en contact avec la Formation d’Albanel sus-jacente. 

Paléontologie

 Ne s’applique pas.

Références

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

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Collaborateurs