Du leucogabbro (gabbro anorthositique dans le texte original) correspondant à l’extrémité NE du Complexe de Pambrun est d’abord cartographié dans la région du lac Bernay (feuillets 22M15 et 22M16; Chown, 1964a-b). Un peu plus au sud, dans la région du lac Pambrun (feuillets 22M09 et 22M10), Chown et Hashimoto (1965) décrivent un massif anorthositique comprenant plusieurs faciès, dont un faciès de bordure du massif ainsi qu’un complexe granitique (voir le tableau ci-dessous). Chown et Laurin (1970), puis Chown (1971) prolongent ce massif anorthositique et le « complexe de bordure » vers le sud (feuillets 22M01, 22M02, 22M07 et 22M08) et l’ouest (feuillets 22M06 et 22M11). Chown (1971) introduit un 2^e massif anorthositique (et ses faciès de bordure) une soixantaine de km à l’ouest du lac Pambrun, dans la région du lac Béthoulat (feuillet 22M12), qui correspond à la « série plutonique du lac Béthoulat » définie par Neale (1965). Le Complexe de Pambrun, tel qu’introduit par Genest (1989), combine les roches des deux massifs anorthositiques et comprend une unité d’anorthosite et une unité d’anorthosite gabbroïque. Dans les travaux de compilation du Ministère, le massif anorthositique du lac Pambrun est subdivisé en sept unités informelles (Grant, 2002a-j; voir le tableau ci-dessous), tandis que le massif anorthositique du lac Béthoulat est assigné, au sein du Complexe de Pambrun, à une unité non subdivisée d’anorthosite, de diorite, de gabbro, d’anorthosite gabbroïque et de granitoïde à hypersthène (Morin, 1998a-b). Lors des travaux de compilation du feuillet 22M12 réalisés par Grant (2002i), les roches anorthositiques formant l’extrémité NE du massif anorthositique du lac Béthoulat sont plutôt assignées à une nouvelle unité, le Complexe de Béthoulat.

Dans le cadre de la rédaction de cette fiche stratigraphique, les deux massifs anorthositiques (ceux des lacs Pambrun et Béthoulat) sont à nouveau individualisés en deux unité stratigraphiques distinctes, soit les complexes de Pambrun et de Béthoulat. En effet, il est difficile de justifier leur maintien au sein d’une même unité géologique, puisque ces deux massifs anorthositiques sont situés à une soixantaine de kilomètres l’un de l’autre. De surcroît, les roches anorthositiques du lac Béthoulat (à l’ouest) sont situées dans le Parautochtone alors que les roches anorthositiques du lac Pambrun (à l’est) sont situées dans l’Allochtone. Par conséquent, les roches anorthositiques de la région du lac Pambrun (feuillets 22M01, 22M02, 22M06, 22M07, 22M08, 22M09, 22M10, 22M11, 22M15 et 22M16) constituent le Complexe de Pambrun alors que les roches anorthositiques de la région du lac Béthoulat (feuillets 22M12-SE, 32P08 et 32P09) sont retirées du Complexe de Pambrun et assignées au Complexe de Béthoulat.

Le Complexe de Pambrun est constitué de roches anorthositiques et de leurs équivalents déformés et métamorphisés (gneiss anorthositique, amphibolite à grenat et migmatite [Apam2] ainsi qu’une proportion moindre de gneiss granitique à pyroxène et hornblende [Apam3]). Il correspond à une importante anomalie magnétique (Genest, 1989). Les roches du complexe anorthositique sont divisées en unités informelles en fonction de leurs assemblages minéralogiques et des proportions modales : anorthosite (Apam 5), anorthosite à pyroxène (Apam1; anorthosite gabbroïque dans le texte original, voir tableau ci-haut) et leucogabbro (Apam4; gabbro anorthositique dans le texte original) avec des niveaux de péridotite et de pyroxénite (Apam7) ainsi que des lentilles de magnétitite et d’ilménitite associées (Apam6). La portion NW du complexe (feuillets 22M09 et 22M10) est grossièrement zonée à mesure qu’augmente la proportion de pyroxène vers la bordure (Chown et Hashimoto, 1965). Toutes les roches du complexe sont étroitement associées les unes aux autres au point de vue structural (Chown et Laurin, 1970). Elles présentent des degrés croissants de contamination et de métamorphisme rétrograde. Les roches dans lesquelles le quartz est présent et qui ne contiennent aucune relique de pyroxène ou de texture primaire sont classées comme appartenant aux « faciès de bordure » (Apam2); les autres appartiennent aux roches anorthositiques (Apam1, Apam4 et Apam5).

Complexe de Pambrun 1 (Apam1) : Anorthosite à pyroxène

La majeure partie de la masse anorthositique du Complexe de Pambrun se compose d’anorthosite à pyroxène (anorthosite gabbroïque dans le texte original; Chown, 1971). Par définition élargie, cette dernière contient 10 à 30 % de minéraux ferromagnésiens. Dans la partie nord du complexe (feuillet 22M10 et la partie est du feuillet 22M11), l’anorthosite à pyroxène entoure le noyau d’anorthosite (Apam5) (Chown et Hashimoto, 1965). L’anorthosite à pyroxène est tachetée de blanc et de brun en surface fraiche et elle présente une surface altérée brun rouille et bosselée (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970; Chown, 1971). La granulométrie varie de grossière à pegmatitoïdique. Les spécimens frais sont rares, car la roche est profondément altérée et la décomposition des minéraux ferromagnésiens a terni (teinté de brun) le plagioclase uniformément (Chown et Hashimoto, 1965; Chown, 1971). La roche varie de massive à gneissique selon la proportion de minéraux ferromagnésiens et le degré de métamorphisme rétrograde (Chown et Laurin, 1970). En fait, la foliation est généralement le résultat de la nature planaire des agrégats alignés de minéraux ferromagnésiens plutôt que d’un rubanement gneissique.

Le plagioclase (andésine-labradorite, An_40-55) se présente sous la forme de gros cristaux gris-bleu parcourus de plagioclase blanc et de grenat; ils mesurent ≤30 cm de long et sont communément en partie granulés et brisés en une mosaïque saccharoïde (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970; Chown, 1971). Les cristaux de pyroxène peuvent atteindre 2 m de longueur, bien que la plupart aient des longueurs variant de 1 à 10 cm. L’orthopyroxène brun et le clinopyroxène vert ou brun sont généralement entourés de couronnes de hornblende verte, noire ou brune et/ou de grenat (1 à 3 mm). Plusieurs cristaux de pyroxène sont tronqués, fortement déformés et convertis en amphibole. Dans les roches schisteuses près de la bordure du massif, des cristaux de pyroxène convertis en amphibole forment des traînées qui peuvent atteindre 300 cm de longueur. Les agrégats d’amphibole fine bleu-vert forment une linéation (Chown et Laurin, 1970). De petits agrégats de magnétite-ilménite sont observés dans l’anorthosite à pyroxène, en particulier dans les cristaux de pyroxène ou autour de leurs bordures (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970). Certaines roches contiennent 5 à 10 % d’ilménite, en partie sous la forme d’agrégats individuels entourés par des couronnes de grenat visibles à l’œil nu. Les minéraux accessoires mineurs sont l’apatite, le zircon et le sphène. On note aussi la présence de biotite et de quartz avec le grenat (Chown et Laurin, 1970).

Complexe de Pambrun 2 (Apam2) : Gneiss anorthositique, amphibolite à grenat et migmatite

L’unité Apam2 consiste en un ensemble de gneiss anorthositique, d’amphibolite à grenat et de gneiss mélangés (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970; Chown, 1971). Ces roches semblent représenter un faciès partiellement contaminé du complexe anorthositique et sont considérées comme un faciès de bordure. Les roches de cette unité occupent une superficie au moins aussi importante que les faciès anorthositiques moins déformés du complexe (Apam1, Apam4 et Apam5) (Chown et Hashimoto, 1965). Les roches s’altèrent profondément et sont par conséquent recouvertes d’un épais manteau forestier : elles affleurent donc très peu. L’unité contient différents types de roche dont plusieurs passent graduellement de l’un à l’autre.

Le gneiss anorthositique est la roche dominante de l’unité (Chown et Hashimoto, 1965; Chown, 1971). Il est blanc moucheté de rouge et de noir en surfaces fraiche et altérée (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970). Le gneiss est à grain fin (1 à 3 mm), partiellement folié et montre une texture semblable à une roche ignée formée par des amas de minéraux ferromagnésiens dans une mosaïque de plagioclase (oligoclase-andésine, An_25-30, 60 à 65 %) et de quartz (10 à 20 %) (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970; Chown, 1971). Des cristaux de grenat (10 à 15 %), de hornblende (10 %) et de biotite (≤5 %), d’une longueur de 1 à 2 mm, forment des amas ronds ou allongés (des « yeux ») dont les dimensions varient de 0,5 à 2 cm. Les amas montrent une forte linéation, comme dans le leucogabbro (Apam4) (Chown et Hashimoto, 1965). La principale différence entre le gneiss anorthositique et le leucogabbro réside dans la présence de quartz et de biotite et l’absence de pyroxène dans le premier. De plus, les minéraux ferromagnésiens ne sont pas aussi nettement disposés en couronnes qu’ils le sont dans le leucogabbro. La proportion de quartz du gneiss anorthositique décroît à mesure qu’on approche de l’anorthosite (Apam1 et Apam5).

L’amphibolite à grenat forme des affleurements isolés ou des niveaux de 10 cm à 10 m dans le gneiss anorthositique (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970). Le contact entre les deux types de roche est net et généralement concordant. L’amphibolite à grenat est une roche massive à grain fin à moyen, noire ou brune en surface fraiche et brun rouille en surface altérée. Elle est composée de 40 % de plagioclase (andésine), 40 % de hornblende bleu vert, 15 à 20 % de grenat, 5 % de biotite, et localement de quartz. L’amphibolite à grenat représente d’anciens niveaux mafiques dans l’anorthosite contaminée (Chown et Laurin, 1970).

Bien que l’unité Apam2 soit dominée par du gneiss anorthositique, une bonne partie de celle-ci est composée d’un mélange du gneiss anorthositique et de l’amphibolite à grenat avec un gneiss massif ou lité à grain fin ou moyen contenant du quartz, du plagioclase et de la biotite (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970). La roche semble être une migmatite composée de schlierens et d’enclaves plus grosses de gneiss quartzo-feldspathiques dans les roches anorthositiques. Un métamorphisme contemporain ou subséquent a provoqué une assimilation partielle des roches riches en quartz par l’anorthosite, ce qui a produit des contacts graduels et irréguliers entre les deux (Chown et Hashimoto, 1965).

Les différentes lithologies de l’unité APam2 sont communément coupées et imprégnées de roches granitiques roses à grises (Chown et Hashimoto, 1965; Chown et Laurin, 1970). Des dykes et des filons-couches de pegmatite rose à grain grossier coupent toutes les roches de l’unité. En plus des dykes bien délimités, on peut noter dans les roches métamorphisées des veinules et des veines granitiques irrégulières et à contacts diffus, de même que des porphyroblastes de feldspath potassique distribués au hasard (Chown et Hashimoto, 1965). Près de ces veines, la hornblende est en grande partie transformée en grosses paillettes de biotite.