2017-JV-2140A
 
Lithologie : Gneiss enderbitique
Unité stratigraphique : Complexe de Lomier (pPlom1a)

Publiée le :  
 

 

 

Numéro d’échantillon :2017-JV-2140A
Lithologie :Gneiss enderbitique
Âge (évènement) :1930,1 ±9,2 Ma (métamorphisme)
Province géologique :Province de Churchill
Subdivision géologique :Domaine lithotectonique de Falcoz
Unité stratigraphique :Complexe de Lomier (pPlom1a)
Feuillet SNRC :24P07
Zone UTM NAD 83 :20
Estant :391290
Nordant :6577516
Méthode d’analyse :

LA-HR-ICP-MS sur zircons (méthode d’analyse décrite dans le MB 2020-01, pages 29 et 30)

 

 

 

Géologie et description de l’échantillon

L’échantillon a été prélevé sur un affleurement de gneiss droit de composition enderbitique au sein de la Zone de cisaillement d’Abloviak, laquelle marque la limite entre la Province de Nain et le sud-est de la Province de Churchill. Cette zone de cisaillement est principalement orientée N-S près de la frontière entre le Labrador et le Québec. Toutefois, dans la partie nord du Domaine lithotectonique de Falcoz, elle prend une orientation NW-SE au contact du Domaine de Burwell. Le gneiss échantillonné est considéré comme appartenant au Complexe de Lomier (pPlom1) du Domaine de Falcoz, mais on ne peut exclure qu’il puisse s’agir de roches déformées de la Suite de Killinek.

Objectif de l’analyse géochronologique

Le but de l’analyse est de déterminer l’âge du protolite du gneiss et de contraindre celui de la déformation.

Géochronologie

Les zircons récupérés de ce gneiss enderbitique présentent beaucoup de similitudes morphologiques avec ceux de l’échantillon d’enderbite 2017-JV-2187A. On reconnaît ainsi une première population de zircons hétérogènes formée de cristaux prismatiques moyennement allongés et passablement émoussée, avec des rapports longueur/largeur très variés. Un deuxième type de zircons est constitué de cristaux équidimensionnels et arrondis. À la différence de l’enderbite (échantillon 2017-JV-2187A), on a également identifié une population de cristaux brun foncé de morphologies très diverses.

Les images en cathodoluminescence révèlent des cristaux montrant une diversité de structures internes. Certains cristaux prismatiques possèdent un cœur luminescent entouré d’une bordure zonée, alors que d’autres présentent une zonation oscillatoire avec une mince couche luminescente et une bordure zonée. Les cristaux arrondis ont une zone centrale sombre entourée d’un domaine montrant une zonation oscillatoire, voire dans certains cas d’une bordure luminescente.

 

L’analyse de 70 zircons incolores a produit des résultats passablement concordants qui sont distribués sur la courbe concordia entre 1,80 Ga et 2,55 Ga, avec une plus grande concentration de résultats près de l’intervalle 1,80 Ga à 2,00 Ga. La modélisation statistique des âges 207Pb/206Pb fait ressortir deux populations principales à 1850 ±11 Ma et 1929 ±7 Ma. Quatre groupes d’âge plus anciens, mais plus dispersés, sont également reconnus à 2179 ±14 Ma, 2266 ±18 Ma, 2375 ±12 Ma et 2488 ±15 Ma. Un examen plus minutieux des résultats permet de constater que les groupes d’âges jeunes se caractérisent par des rapports Th/U spécifiques. Ainsi, les zircons à 1,85 Ga présentent des rapports compris entre 0,4 à 1,6, alors que les rapports des zircons à 1,93 Ga sont moins dispersés entre <0,01 et légèrement supérieurs à 0,4. Des âges de 1844,5 ±8,9 Ma (MSWD = 0,9) et 1930,1 ±9,2 Ma (MSWD = 2,2) ont été obtenus par un calcul de régression linéaire pour chacun de ces groupes.

Une quarantaine de zircons brunâtres ont été analysés lors d’une autre session. Les âges obtenus sont identiques à ceux des zircons incolores, soit entre 1,80 Ga et 2,6 Ga. Un âge de 1847 ±21 Ma (MSWD = 2,8) a été calculé pour les zircons montrant des rapports Th/U variant entre 0,1 et 0,5, alors qu’un âge un peu plus ancien de 1924 ±16 Ma (MSWD = 0,35) a été obtenu pour les zircons avec des rapports Th/U très faibles et inférieurs à 0,1. Ces âges sont comparables à ceux obtenus pour les zircons incolores. En tenant compte de l’ensemble des résultats, nous interprétons l’âge de 1930,1 ±9,2 Ma comme celui de l’épisode métamorphique à l’origine de la formation du gneiss enderbitique. Cet âge provient de l’analyse de zircons présentant des rapports Th/U très faibles qui sont caractéristiques des cristaux formés dans des environnements métamorphiques.

Les résultats des analyses sont disponibles dans le SIGÉOM et accessibles en cliquant sur ce lien (voir fichiers Excel dans MB202001ADN001.zip).

Interprétation

L’âge de 1930,1 ±9,2 Ma est plus vieux que celui de 1876,9 ±1 Ma (Bertrand et al., 1993) obtenu dans un gneiss du Complexe de Lomier prélevé au Labrador. Ce dernier échantillon est aussi localisé en bordure du prolongement vers le sud de la Zone de cisaillement d’Abloviak. L’âge de ~1930 Ma est aussi plus vieux que ceux obtenus dans la Suite de Killinek (1910 à 1864 Ma; Scott, 1995a et 1995b; Scott et Machado, 1995). La présence d’une composante de zircons plus anciens (2488 à 2179 Ma) dans l’échantillon 2017-JV-2140A le distingue des nombreux résultats d’analyses réalisées historiquement dans la Suite de Killinek. De son côté, la comparaison avec le Complexe de Lomier est difficile étant donné le nombre restreint d’analyses pour cette unité.
 
L’origine de la population de zircons plus jeunes circonscrite à 1844,5 ±8,9 Ma est plus difficile à interpréter. Deux possibilités peuvent être invoquées pour expliquer cet âge. Dans un premier cas, il pourrait s’agir de zircons qui ont recristallisé lors du passage à des conditions subsolidus. Dans ce cas, il s’agirait de l’âge maximal de la déformation. Par contre, cette population de zircons plus jeunes est caractérisée par des rapports Th/U plus élevés comparativement aux zircons plus vieux. Les zircons formés lors du passage à des conditions subsolidus ont habituellement des rapports Th/U faibles puisque cet épisode coïncide généralement avec la cristallisation de la monazite (Yakimchuk et al., 2018). Les rapports Th/U plus élevés des zircons jeunes ne semblent donc pas appuyer l’hypothèse d’une cristallisation près des conditions subsolidus. Une autre explication implique la recristallisation partielle du zircon entraînant une hausse du rapport Th/U et une perte de plomb. Ce phénomène est peu courant, mais possible dans les roches très déformées (MacDonald et al., 2013). Il n’en demeure pas moins que l’âge maximal de la déformation actuellement reconnu dans la Zone de cisaillement d’Abloviak est de 1844 Ma (Bertand et al., 1993) et, par conséquent, compatible avec ces deux scénarios.

Auteurs

RôleNomCourrielAnnée
GéochronologieJean David, géo., Ph. D.jean.david@mern.gouv.qc.ca2018 à 2019
Échantillonnage et interprétationIsabelle Lafrance, géo., M. Scisabelle.lafrance@mern.gouv.qc.ca2018
CoordinationFrancis Talla Takam, géo., Ph. D.francis.tallatakam@mern.gouv.qc.ca2021

Références

 

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

 

DAVID, J., 2020. Datations U-Pb dans les provinces du Supérieur et de Churchill effectuées au GEOTOP en 2018-2019. MERN, GEOTOP; MB 2020-01, 30 pages.

 

 

Autres publications 

BERTRAND, J.M., RODDICK, J.C., VAN KRANENDONK, M.J., ERMANOVICS, I., 1993. U-Pb geochronology of deformation and metamorphism across a central transect of the Early Proterozoic Torngat Orogen, North River map area, Labrador. Canadian Journal of Earth Sciences; volume 30, pages 1470-1489. doi.org/10.1139/e93-127.

MACDONALD, J.M., WHEELER, J., HARLEY, S.L., MARIANI, E., GOODENOUGH, K.M., CROWLEY, Q., TATHAM, D., 2013. Lattice distortion in a zircon population and its effects on trace element mobility and U–Th–Pb isotope systematics: examples from the Lewisian Gneiss Complex, northwest Scotland. Contributions to Mineralogy and Petrology; volume 166, pages 21-41. doi.org/10.1007/s00410-013-0863-8.

SCOTT, D.J., 1995a. U–Pb geochronology of the Nain craton on the eastern margin of the Torngat Orogen, Labrador. Canadian Journal of Earth Sciences; volume 32, pages 1859-1869. doi.org/10.1139/e95-143

SCOTT, D.J., 1995b. U-Pb geochronology of a Paleoproterozoic continental magmatic arc on the western margin of the Archean Nain craton, northern Labrador, Canada. Canadian Journal of Earth Sciences; volume 32, pages 1870-1882. doi.org/10.1139/e95-144

SCOTT, D.J., MACHADO, N., 1995. U-Pb geochronology of the northern Torngat Orogen, Labrador Canada: a record of Paleoproterozoic magmatism and deformation. Precambrian Research; volume 70, pages 169-190. doi.org/10.1016/0301-9268(94)00038-S

YAKYMCHUK, C., KIRKLAND, C. L., CLARK, C., 2018. Th/U ratios in metamorphic zircon. Journal of Metamorphic Geology; volume. 36, pages 715-737. doi.org/10.1111/jmg.12307.

31 mars 2021