Domaine structural de Matakahp
Étiquette structurale :DSmak 
 
 
Première publication : 3 juillet 2025
Dernière modification :
Auteur(s) Daoudene et Lafrance, 2024
Méthodologie Défini à partir d’un levé géologique
Subdivision(s) géologique(s) Province de Grenville/Allochtone
Mouvement principal Ne s’applique pas
Style de déformation Plissement multiphasé
Faciès métamorphique (faciès moyen lié à la déformation principale) Supérieur des amphibolites à granulites

Historique et méthodologie

Le Domaine structural de Matakahp (DSmak) a été défini à la suite du levé géologique de la région du lac Coacoachou mené par Daoudene et Lafrance (2024) à l’été 2024.

Le nom du domaine fait référence au lac Matakahp, situé à ∼30 km au nord de la communauté de La Romaine.

Limites et morphologie

Largeur (km) >14
Longueur (km) >22
Orientation

L’étendue du DSmak n’est connue que dans le coin NW du feuillet SNRC 12K08 (Daoudene et Lafrance, 2024). Le domaine est délimité au SE par la Zone de cisaillement de Nehekau (ZCneh). Ailleurs, les limites du DSmak ne sont pas établies. Le domaine s’étend vraisemblablement dans les feuillets 12K07, 12K09 et 12K10.

En l’état actuel des connaissances, le DSmak forme un polygone triangulaire dans le coin NW du feuillet 12K08. Le grand axe du polygone est orienté NE-SW et mesure ∼22 km.

Unités stratigraphiques concernées

Les unités lithodémiques présentes dans le DSmak sont les suivantes :

– la Suite intrusive de Kegaska (unité mPkeg2);

– le Complexe de La Romaine (mPcsr);

– la Suite intrusive de Coacoachou (unités mPcoc2a, mPcoc2b et mPcoc3);

– la Suite intrusive de Mantuh (unité mPmut1);

– la Suite intrusive de Blacklands (unité mPbak1);

– l’Intrusion de Mukanipan (nPmip);

– la Suite intrusive de Washicoutai (unités nPwai3a et nPwai3b).

Caractéristiques structurales

Bien que le domaine ait enregistré plusieurs phases de déformation, les affleurements des unités du DSmak montrent des fabriques qui peuvent être associées à un seul épisode Dn correspondant régionalement à D1 (Daoudene et Lafrance, 2024). Cette phase de déformation s’observe sur pratiquement tous les affleurements et est généralement d’intensité faible ou moyenne. Elle s’exprime par une foliation pénétrative Sn et par une linéation tectonométamorphique Ln peu développée.

L’ensemble des données utilisées dans l’analyse structurale qui suit provient du levé géologique de la région du lac Coacoachou (Daoudene et Lafrance, 2024).

❯ Fabriques principales

Sn = S1

 Sur le terrain, la fabrique planaire Sn se manifeste couramment par une foliation diffuse, faiblement ou moyennement développée. Dans la majorité des roches de la Suite intrusive de Coacoachou et de l’Intrusion de Mukanipan, la foliation Sn est marquée par l’orientation préférentielle des minéraux ferromagnésiens et par l’aplatissement plus ou moins prononcé des grains de quartz ou de feldspath. Là où elle est le plus exprimée, la foliation se matérialise par une légère gneissosité soulignée par l’alternance de bandes millimétriques plus ou moins riches en minéraux ferromagnésiens.

Dans les roches métasédimentaires du Complexe de La Romaine, la foliation Sn est également marquée par un rubanement migmatitique s’exprimant par l’alternance de rubans millimétriques à centimétriques, mésocrates ou mélanocrates, riches en biotite ± grenat et de niveaux de leucosome. Dans les niveaux riches en biotite, localement présents, les porphyroblastes aplatis de grenat marquent la foliation Sn.

 

Au microscope, dans les roches de la Suite intrusive de Coacoachou, la foliation apparaît régulièrement soulignée par l’orientation préférentielle des feuillets de biotite, l’aplatissement plus ou moins prononcé des grains de quartz et de feldspath et par la disposition des cristaux xénomorphes d’orthopyroxène ou de hornblende. Dans les roches du Complexe de La Romaine, elle est également marquée par le fort aplatissement des porphyroblastes de grenat et de cordiérite.

 

Dans un stéréogramme, les pôles des mesures de foliation Sn sont assez bien regroupés près du centre. Ceci indique que la foliation est généralement à faible pendage à l’échelle du domaine. Le plan moyen à 348°/10° montre que le pendage est globalement dirigé vers l’est. En carte, la trajectoire de Sn est curviligne et dessine de nombreux plis.

La foliation Sn porte couramment une linéation tectonométamorphique Ln qui est faiblement ou moyennement développée. Cette linéation est marquée par l’étirement des amas de grains de quartz ou des phénocristaux de feldspath là où ils sont présents.

 

Les linéations mesurées montrent une direction variable, mais un plongement généralement faible (<30°). Sur un stéréogramme, elles se distribuent autour d’un grand cercle impliquant que la fabrique est plissée à l’échelle du domaine.

Fabrique principale Type de fabrique Direction (°) Pendage (°) Nombre de mesures Commentaires
Foliation Sn Foliation minérale secondaire tectonométamorphique 348 10 97 La direction moyenne et le pendage sont représentatifs à l’échelle du domaine.
Linéation Ln Linéation minérale secondaire tectonométamorphique, linéation d’étirement 15 Les linéations se distribuent autour d’un grand cercle (72°/15°).

❯ Autres fabriques

À l’échelle régionale, la trajectoire de la foliation Sn dessine en carte de nombreux plis qui résultent de plusieurs phases de déformation subséquentes. Toutefois, aucune foliation ou schistosité de plan axial associée à ces plis n’a été pour le moment identifiée.

❯ Plis

Bien que quelques affleurements montrent des évidences de plissement (p. ex. 24-YD-2054), c’est surtout à l’échelle régionale que la structure plissée du DSmak peut être observée. La trajectoire de la foliation Sn dessine en carte une succession de plis qui semblent être le produit de plusieurs phases. En effet, à proximité de la bordure entre les feuillets 12K07 et 12K08, la présence d’une structure elliptique d’étendue kilométrique implique au moins deux épisodes de plissement. 

La phase principale de plissement, probablement la plus tardive, est marquée par un enchaînement de plis antiformes et synformes, serrés ou isoclinaux et de longueur d’onde et d’amplitude kilométrique. Ces plis Pn+2 peuvent être également déduits du patron du levé aéromagnétique de Intissar et al. (2021) et ont une trace axiale approximativement orientée NE-SW. La foliation Sn étant principalement à faible pendage vers l’est, les plis sont vraisemblablement déversés ou couchés vers l’ouest.

La structure elliptique évoquée plus haut laisse donc penser que les plis Pn+2 reprennent une phase de plissement antérieure. Les plis associés Pn+1 seraient alors plutôt orientés NW-SE. Étant donné l’incertitude concernant l’orientation de ces plis, ceux-ci ne sont actuellement pas représentés en carte.

Comme mentionné ci-dessus, la linéation Ln se distribue autour d’un grand cercle (72°/15°) impliquant qu’elle est plissée. L’intersection (107°/9°) entre ce grand cercle et le plan moyen de la foliation Sn semble refléter un plan axial hybride Pn+1-Pn+2 qui correspondrait grossièrement à la direction de transport associée à la phase de plissement principale Pn+2 (voir Ramsay et Hubber, 1987).

Paramètres géométriques des plis régionaux : 


Plis ou famille de plis

Type (anticlinal, synclinal ou indéterminé)

Forme (antiforme ou synforme)

Attitude (déversé ou droit)

Plan axial

Axe de pli

Position (certaine ou probable)

Phase de déformation

Commentaires
Direction Pendage Direction Plongement
Famille NW-SE Indéterminé Antiforme et synforme NW-SE Non représentée Dn+1 Les traces axiales de ces plis ne sont actuellement pas représentées en carte.
Famille NE-SW Indéterminé Antiforme et synforme Déversé NE-SW Faible vers le SE Certaine Dn+2 La direction et le pendage du plan moyen sont déduits de ceux du plan moyen de la foliation Sn.

❯ Relations de recoupement

Le DSmak est bordé au sud et au SE par la Zone de cisaillement de Nehekau, qui coupe du SW au NE le coin NW du feuillet 12K08.

Le DSmak est aussi coupé par des failles kilométriques d’orientation NNW-SSE ou N-S. Sur le terrain, la seule évidence de ces failles, déduites du levé aéromagnétique de Intissar et al. (2021), est l’hématitisation des roches localement observée au voisinage (p. ex. affleurement 24-IL-3035). En raison du caractère rectiligne des failles en carte, leur pendage approche probablement la verticale.

Paramètres géométriques des failles régionales coupant le Domaine structural de Matakahp :

Faille ou Famille de failles Type Direction (°) (moy) Pendage (°) (moy) Plongée de la linéation dans le plan de la faille Largeur estimée (m) Longueur estimée (km) Mouvement apparent Position Commentaires
Zone de cisaillement de Nehekau Zone de cisaillement régionale 235 39 Variable 400 à 1100 ∼25   Certaine Délimite au SE le DSmak
Failles NNW-SSE ou N-S Failles régionales NNW-SSE ou N-S ∼90 8-12 Position déduite de levés géophysiques Les roches à proximité sont communément caractérisées par une intense hématitisation.

❯ Cinématique

Ne s’applique pas.

Style de la déformation

En carte, l’intrusion de Mukanipan est localisée au cœur d’une synforme kilométrique et de plan axial orienté NE-SW. Cette unité englobe de vastes lentilles de paragneiss migmatitisé du Complexe de La Romaine, montrant des évidences d’un métamorphisme n’ayant probablement pas atteint le faciès des granulites durant la phase de déformation Dn (voir la section « Caractéristiques métamorphiques » ci-dessous). En revanche, les roches de la Suite intrusive de Coacoachou, qui sont structuralement plus profondes, présentent des conditions plus élevées de température typiques des granulites. Ce constat implique que le DSmak affiche un gradient métamorphique normal. La limite entre la zone du faciès des amphibolites et celle du faciès des granulites se superpose approximativement au contact entre l’Intrusion de Mukanipan et la Suite intrusive de Coacoachou.

Par la suite, ce gradient métamorphique a vraisemblablement été affecté par au moins deux phases de déformation subséquentes, Dn+1 et Dn+2. La seconde et principale phase a engendré des plis NE-SW, dont la synforme de l’Intrusion de Mukanipan, essentiellement déversés ou couchés vers le NW. Pour cette raison, Daoudene et Lafrance (2024) relient cette phase de plissement au fonctionnent de la Zone de cisaillement de Nehekau qui borde le DSmak au SE. Cette zone de cisaillement aurait permis le déplacement du domaine du SE vers le NW, comme semble indiquer la direction de transport associée au déversement des plis Pn+2 (Daoudene et Lafrance, 2024).

Caractéristiques métamorphiques

L’examen au microscope d’échantillons de roches issus du levé de Daoudene et Lafrance (2024) montre que la déformation Dn est associée à un épisode métamorphique de haute température.

Les roches métasédimentaires du Complexe de La Romaine présentent communément des bandes de mobilisat dont l’orientation marque la fabrique Sn. Cette relation impliquerait que la phase de déformation Dn est accompagnée d’un épisode de fusion partielle. Parallèlement, ces roches présentent des assemblages minéralogiques à biotite-grenat ± cordiérite (voir la section « fabriques principales » qui indiquent des conditions métamorphiques ayant atteint au moins le faciès des amphibolites. En revanche, l’absence de sillimanite semble plutôt indiquer que des températures typiques du faciès de granulites n’ont pas été atteintes.

 Les roches de la Suite intrusive de Coacoachou montrent couramment des assemblages minéralogiques à feldspath potassique-biotite ± hornblende ± orthopyroxène. La disposition des grains xénomorphes d’orthopyroxène couramment altérés en un mélange fin de biotite et d’amphibole, l’alignement des feuillets de biotite et l’aplatissement plus ou moins prononcé des grains de quartz marquent la foliation Sn. Les bordures entre les cristaux de quartz et de feldspath sont communément interlobées. Les grains de quartz, qui présentent généralement une extinction en échiquier, sont par endroits amiboïdes, une forme témoignant d’un processus de recristallisation dynamique par la migration des bordures de grains (voir Passchier et Trouw, 2005). L’ensemble des caractéristiques microstructurales du quartz et du feldspath implique une température de déformation atteignant au moins le faciès supérieur des amphibolites (∼600 °C). Dans de telles conditions, la fusion partielle des granitoïdes est possible, ce que semble indiquer la présence commune d’intercroissances symplectiques de biotite et de quartz pouvant être interprétées comme des poches résiduelles de liquide anatectique. La présence locale d’orthopyroxène semble indiquer que les températures ont atteint le faciès des granulites.

Altérations

Non observé.

Caractéristiques géophysiques

La région du lac Coacoachou a fait l’objet d’un levé aéromagnétique et aérospectrométrique de haute définition (Intissar et al., 2021). Les particularités du patron magnétique du Domaine structural de Matakahp (DSmak) sont décrites en utilisant la nomenclature de Lavoie (2017).

Sur la carte du gradient vertical du champ magnétique, le patron du DSmak est hétérogène. La majeure partie du domaine présente un aspect plus ou moins rubané dont les bandes de susceptibilité contrastée semblent approximativement subparallèles à la foliation régionale Sn. La trajectoire de ces bandes dessine des plis kilométriques et une structure grossièrement annulaire à la limite entre les feuillets 12K07 et 12K08.

À la limite entre les feuillets 12K08 et 12K09, la zone correspondante à l’Intrusion de Mukanipan montre aussi un patron rubané, mais se démarque par une susceptibilité plus intense. Les crêtes magnétiques, qui sont là aussi subparallèles à la foliation régionale, définissent un pli synforme kilométrique dont la trace du plan axial est orientée NE-SW.

Des crêtes magnétiques rectilignes de susceptibilité intense, plus ou moins continues et orientées N-S ou NNW-SSE traversent le domaine. Elles reflètent vraisemblablement la présence de failles, puisque certains affleurements localisés à proximité montrent des roches caractérisées par une forte hématitisation et chloritisation (voir p. ex. 24-IL-3035).

Repères chronologiques

Aucun âge absolu ne permet de préciser la chronologie des déformations qui ont affecté le DSmak.

Références

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

DAOUDENE, Y., LAFRANCE, I., 2024. Géologie de la région du lac Coacoachou, Province de Grenville, région de la Côte-Nord, Québec, Canada. MRNF; BG 2024-06, 1 plan.

INTISSAR, R., BENAHMED, S., MOUGE, P., 2021. Levé magnétique et spectrométrique aéroporté dans le secteur de la rivière Olomane, Basse-Côte-Nord. MERN, NOVATEM INC; DP 2021-05, 64 pages.

Autres publications

LAVOIE, J., 2017. Sous-province d’Opatica : nouveau territoire pour l’exploration minérale. CONSOREM; projet 2016-01, 85 pages.

PASSCHIER, C.W., TROUW, R.A., 2005. Microtectonics; Springer Science & Business Media, 366 pages. doi.org/10.1007/3-540-29359-0

RAMSAY, J.G., HUBER, M.I., 1987. The Techniques of Modern Structural Geology. Volume 2: Folds and Fractures. Academic Presse; xi + 391 pages. doi.org/10.1017/S0016756800010384.

Citation suggérée

Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF). Domaine structural de Matakahp. Lexique structural du Québec. https://gq.mines.gouv.qc.ca/lexique-structural/domaine-structural-de-matakahp/ [cité le jour mois année].

Collaborateurs

Première publication

Yannick Daoudene, géo., Ph. D. yannick.daoudene@mrnf.gouv.qc.ca; Isabelle Lafrance, géo., M. Sc. isabelle.lafrance@mrnf.gouv.qc.ca (rédaction)

Hanafi Hammouche, géo., M. Sc. (coordination); François Huot, géo., M. Sc. (lecture critique); Simon Auclair, géo., M. Sc. (révision linguistique); André Tremblay (montage HTML).

 

3 juillet 2025