Le Pluton de Bevcon est situé dans le quart nord-est du canton de Louvicourt, dans la demie ouest du feuillet SNRC 32C03. Les premières campagnes de reconnaissances géologiques dans cette région datent du début du XX^e siècle et ont été réalisées par R. Bell (1900) le long du tracé de la rivière Bell. Quelques années plus tard, des levés géologiques ont, entre autres, couvert les parties nord et ouest du canton de Louvicourt (James et Mawdsley, 1928). En 1932, les études menées par Hawley (1931), L.V. Bell et A.M. Bell (1932) pour le compte du service des Mines du Québec ont permis de dresser les grandes lignes de la géologie régionale. Bell et Bell (1932) sont toutefois les premiers à signaler la présence de lithologies intrusives (« granodiorite ») sur l’emplacement approximatif de ce pluton. Denis (1937) a examiné les indices minéralisés situés dans la partie centrale du canton de Louvicourt et a confirmé la présence de ces lithologies intrusives. Norman (1945) a cartographié ce canton à l’échelle de 1/12 000 et publiera plus tard une première synthèse géologique des cantons de Dubuisson, Bourlamaque et Louvicourt (Norman, 1947). La surface approximative du Pluton de Bevcon apparaît sur ces cartes, mais cette unité ne se voit toutefois pas accorder un nom officiel. MacLaren (1950) a publié une mise à jour de la carte de la région de Senneterre, laquelle couvrait les feuillets SNRC 32C03, 32C04, 32C/05 et 32C06.

Le premier rapport géologique touchant la totalité du canton de Louvicourt est le résultat des travaux de Sharpe (1964 et 1968). Ce dernier a visité plusieurs propriétés minières dans cette région et a recueilli une quantité appréciable de renseignements utiles de la part des prospecteurs. Sharpe (1968) donne le nom de Pluton de Bevcon à la partie de l’intrusion qui correspond aux contours approximatifs de l’unité nAbev2 actuelle. Cette appellation reprend à la fois le nom de la compagnie minière active dans ce secteur et le nom de sa propriété. Latulippe (1966 et 1976) utilise pour sa part le nom de « Stock de Bevcon ».   

Durant les années 1980, plusieurs publications gouvernementales et universitaires ont touché à divers aspects de la géologie du canton de Louvicourt. Mentionnons les travaux de Dimroth et al. (1982a, 1982b et 1982c), Lacoste et Gaudreau (1986) et Gaudreau et al. (1986). Bien que la cartographie d’Imreh (1984) n’ait pas couvert le secteur immédiat du Pluton de Bevcon, ses travaux apportent une nouvelle interprétation stratigraphique des unités volcaniques encaissantes (le Sillon de La Motte-Vassan). Sauvé (1985) et Sauvé et al. (1993) ont rédigé des rapports sur la géologie et les minéralisations aurifères à la mine Bevcon. Une synthèse stratigraphique, paléogéographique et gîtologique des cantons de Vauquelin, Pershing, Haig, Louvicourt, Pascalis et Denain est produite par Rocheleau et al. (1997). Pilote et al. (1999a) ont publié un âge de cristallisation magmatique pour le Pluton de Bevcon.

Une compilation et une mise à jour de la carte géologique du quadrant NW du feuillet 32C03 sont présentées par Pilote et al. (dans MRNF, 2010). Ces auteurs subdivisent le Pluton de Bevcon en trois unités en se basant principalement sur les levés aéromagnétiques (Questor Surveys, 1969; Keating, 1979; Relevés Géophysiques et MER, 1985; Pineault et Gaucher, 1986; Bérubé et Malo Lalande, 2007; Commission géologique du Canada, Noranda Exploration, Mines d’Or Virginia, 2009), les travaux antérieurs et les affleurements de géofiches.

Les premières découvertes de minéralisations aurifères dans le secteur du Pluton de Bevcon sont survenues relativement tôt dans l’histoire de l’Abitibi. Le prospecteur S. B. Jowsey identifie en 1931 les premiers indices d’or pour le compte de G. A. Wyeth. Ces indices étaient situés à ~1300 m à l’ouest-sud-ouest de l’emplacement du futur « puits Bevcon » (Sauvé, 1985; Sauvé et al., 1993). Plusieurs veines aurifères ont ensuite été reconnues en forages durant l’hiver 1944-45. La mine Bevcon (puits Bevcon et Buffadison) a été exploitée de 1951 à 1965. Les réserves n’étaient apparemment pas épuisées à la fermeture, mais l’exploitation n’était plus rentable. La mine avait alors produit 12,67 t d’or et 4,53 t d’argent à partir de 3,17 Mt de minerai titrant 4,32 g/t Au avec des ressources de 0,83 Mt à 4,1 g/t Au (Sauvé et al., 1993; Lapointe, 2001). Plusieurs rapports géologiques ont été soumis par des compagnies minières durant cette période (Silver, 1936; Germain, 1940; Buffadison Gold Mines, 1945; Ingham, 1945, 1946 et 1947; 1948; Watts, 1953, 1954 et 1955). Kempthorne (1957) a décrit de façon détaillée la géologie et la minéralisation présente à la mine Bevcon. Plus récemment, Bayne (1979 et 1987), Sullivan et al. (1986), De Corta (1987), Buro (1990) et Lapointe (2001) ont rapporté les résultats des nombreuses campagnes de forages réalisées dans ce secteur. Taner et al. (1991) et Taner et Martin (1993) ont décrit une zone d’altération riche en silice, aluminosilicates (andalousite ± kyanite ± pyrophyllite), dumortiérite et rutile développée de façon inégale sur plusieurs centaines de mètres dans les environs du lac Surprise, à la bordure sud de l’unité nAbev2 du Pluton de Bevcon. Ces schistes sont affectés par une altération hydrothermale acide associée à des fluides minéralisateurs en Au-Cu. 

Les contacts lithologiques actuels du Pluton de Bevcon ont été interprétés par Pilote et al. (dans MRNF, 2010) à partir des affleurements, des cartes géologiques environnantes, des forages, des publications antérieures et des différents levés aéromagnétiques disponibles. Les descriptions qui suivent sont principalement basées sur les rapports de Sharpe (1968), Sauvé (1985), Sauvé et al. (1993), Gaudreau et al. (1986), Rocheleau et al. (1997) ainsi que sur les descriptions d’une trentaine d’affleurements de géofiches situés dans les parties centrale et ouest de l’intrusion.

Le Pluton de Bevcon, d’une dimension de 12,8 km², affleure à la jonction des routes 117 et 113 dans le canton de Louvicourt. De composition tonalitique à dioritique, ce pluton est relativement homogène, massif et grenu. La roche fraîche montre un assemblage de quartz, plagioclase, hornblende et biotite dans une matrice quartzofeldspathique de couleur gris bleuté. Plusieurs zones de cisaillement, orientées 80° à 110°, sont localisées en bordure nord et ouest du pluton. Dans ces zones, la roche est foliée, schisteuse et légèrement à modérément altérée en chlorite-séricite-carbonate (Sauvé, 1985; Gaudreau et al., 1986; Rocheleau et al., 1997).  Des dykes tonalitiques porphyroïdes, de 20 à 30 m d’épaisseur en moyenne, à phénocristaux de plagioclase ou de quartz-plagioclase (2 à 6 mm de diamètre) semblent être étroitement associés à ces zones de cisaillement et à la minéralisation aurifère de ces secteurs. Ces dykes ont été identifiés en forage à l’ancienne mine Bevcon.  

Le Pluton de Bevcon se divise en trois unités. La partie sud du pluton est constituée d’une unité de diorite (nAbev1) couvrant 4 km². L’unité tonalitique et dioritique (nAbev2) forme la portion nord du Bevcon et occupe une superficie de 8,7 km². Une unité marginale est reconnue en bordure nord de l’intrusion, dans le secteur de l’ancienne mine Bevcon. Il s’agit d’un ensemble de minces dykes de tonalite porphyrique à quartz et à feldspath (nAbev3) étroitement associés aux veines minéralisées et qui servaient de guide d’exploration à l’époque de l’exploitation de la mine. Finalement, des dykes mafiques décrits par Sauvé (1985) et Sauvé et al. (1993) n’apparaissent pas sur la carte du Ministère (SIGÉOM). Ils étaient particulièrement abondants dans certaines parties profondes de la mine Bevcon (Sharpe, 1968). Des enclaves centimétriques de roches mafiques sont nombreuses dans le secteur de la mine (Sauvé, 1985). Dans le canton de Vauquelin, à l’est et au NE de la mine Bevcon, Gaudreau et al. (1986) et Rocheleau et al. (1997) ont identifié deux petites masses intrusives de composition tonalitique qui pourraient être reliées génétiquement au Pluton de Bevcon. L’une d’elles est l’unité encaissante de l’ancienne mine Regcourt.

Les roches volcaniques situées au nord et à l’ouest du pluton sont constituées de l’assemblage albite-chlorite-quartz ± épidote ± calcite ± muscovite qui indique que le degré de métamorphisme local est au faciès des schistes verts. Les roches du Pluton de Bevcon sont affectées par un métamorphisme de degré similaire à celui des roches environnantes. L’intrusion est associée à une auréole métamorphique qui a pu être observée dans un forage à la bordure nord du pluton (Sauvé, 1985). Cette zone de métamorphisme de contact fait quelques dizaines de mètres et est caractérisée par de la présence de cristaux de hornblende non orientés ainsi qu’un peu de biotite, de grenat et de tourmaline (Sauvé, 1985).

L’ancienne mine Bevcon ainsi que plusieurs autres indices minéralisés en or ± argent ± cuivre se situent près de la bordure du Pluton de Bevcon. Mentionnons les indices Buffadison, Dumont Nickel, Claims Joseph, Abitibi Copper, Lac Wyeth-SE, Courageous et 313-06. Les indices Lac de la Surprise-Ouest et Lac de la Surprise-Sud sont plutôt situés au cœur du l’intrusion (Sauvé, 1985). 

Pluton de Bevcon 1 (nAbev1) : Diorite, diorite quartzifère et tonalite

La diorite, la diorite quartzifère et la tonalite montrent une structure massive et une granulométrie qui varie de moyenne à grossière. Elles contiennent principalement du plagioclase et des minéraux ferromagnésiens (hornblende peu à sévèrement chloritisée) formant des grains idiomorphes ou subidiomorphes. Le quartz et le feldspath sodique sont minoritaires et occupent des positions interstitielles. L’albite forme aussi une surcroissance autour du plagioclase plus calcique et il peut être en intercroissance avec le quartz. Ce dernier constitue 15 à 30 % de la roche, les minéraux ferromagnésiens ~20 à 35 % (Sauvé, 1985).

L’unité nAbev1 n’est pas aussi homogène que ce que la carte géologique semble indiquer. Elle semble plutôt être constituée d’un grand nombre de dykes dioritiques volumineux contenant un fort pourcentage d’enclaves volcaniques de composition intermédiaire à felsique (voir entre autres Bayne, 1979 et 1987; Sullivan et al., 1986; De Corta, 1987; Buro, 1990; Lapointe, 2001). Le manque d’affleurements et de forages ne permet pas de préciser le nombre et les trajectoires de ces dykes. Les indices minéralisés aurifères 313-06 et Courageous sont situés dans cette unité ou à sa bordure sud immédiate. Une intense zone d’altération en aluminosilicates contenant de la dumortiérite est encaissée dans des roches volcaniques felsiques (unité nAvd7) situées au contact des unités nAbev1 et nAbev2 (Martin, 1991; Taner et Martin, 1993). Des exemples de ces lithologies volcaniques sont exposés sur les affleurements 2021-PP-4003, 4004, 4005 et les indices aurifères Lac de la Surprise-Sud et Lac de la Surprise-Ouest.

Pluton de Bevcon 2 (nAbev2) : Tonalite, trondhjémite et diorite quartzifère

L’unité nAbev2 est constituée de tonalite massive à structure granitoïde et à grain moyen (2 à 5 mm). Il s’agit d’une roche gris pâle, riche en plagioclase, contenant ~25 % de quartz bleuté, de 15 à 35 % d’amas chloriteux mal définis et de traces de leucoxène (Sauvé, 1985). Quelques amas de forme indéterminée de trondhjémite leucocrate de 0,5 m à quelques mètres d’épaisseur ont été observés en forage à la mine Bevcon. Les contacts avec la tonalite peuvent être abrupts ou graduels (Sauvé, 1985). Les relations de recoupement entre la tonalite encaissante et les dykes tonalitiques sont communes.

L’examen au microscope et la géochimie indiquent que l’unité nAbev2 est en général fortement altérée (Sauvé, 1985). Les effets de l’altération sont indiqués par la séricitisation, la carbonatisation, la tourmalinisation et possiblement l’albitisation. Les noyaux idiomorphes de plagioclase sont clairs ou criblés d’inclusions de clinozoïsite, de séricite, de carbonate ou de chlorite. La séricite présente une distribution inégale. Les roches massives n’en contiennent pas ou très peu. Avec l’augmentation de la schistosité, la séricite devient plus abondante, mais elle est surtout concentrée dans les plans de faille ou dans les plans de foliation. 

Le quartz est en intercroissance micrographique ou granophyrique avec le feldspath sodique qui contient des noyaux de plagioclase calcique. Les roches les plus felsiques sont presque dépourvues de minéraux ferromagnésiens. Ceux-ci sont tous entièrement altérés en chlorite et quartz avec des quantités variables de carbonate et d’épidote. Aucun grain de pyroxène, d’amphibole ou de biotite n’est préservé (Sauvé, 1985). Les minéraux accessoires présents dans l’unité nAbev2 sont : les oxydes de fer-titane largement altérés en leucoxène-rutile, le zircon, l’apatite et le sphène (Sauvé, 1985).  Le carbonate constitue de 0 % à 15 % de la roche. Son abondance est souvent proportionnelle à celle de la séricite. Le contenu en épidote diminue avec l’augmentation de carbonate, alors que la quantité de chlorite diminue à la faveur de la séricite et du ferrocarbonate.  La tourmalinisation est nettement reliée à la minéralisation aurifère (Sauvé, 1985).

L’ancienne mine Bevcon ainsi que plusieurs autres indices minéralisés en or ± argent se situent dans l’unité nAbev2, près de la bordure nord du Pluton de Bevcon, à proximité de la Faille Dunraine. Entre 1951 et 1965, la mine Bevcon a produit 3,17 Mt à 4,32 Au g/t avec des ressources de 0,83 Mt à 4,1 g/t Au (Sauvé et al., 1993; Lapointe, 2001). Parmi les indices associés, mentionnons Buffadison, Claims Joseph et Lac Wyeth-SE. De façon caractéristique, presque toutes les veines de quartz aurifères situées dans le Pluton de Bevcon se trouvent entre l’unité nAbev2 et le réseau de dykes tonalitiques porphyriques à quartz et feldspath (unité nAbev3) qui recoupe la partie nord du pluton (Sauvé, 1985). Les bordures de ces veines sont communément riches en séricite (Sauvé, 1985).

Pluton de Bevcon 3 (nAbev3) : Tonalite porphyrique à quartz et à feldspath

L’unité nAbev3 est représentée par un réseau de dykes volumineux de tonalite porphyrique à quartz et à feldspath. Ces dykes forment le mur sud de la zone minéralisée à la mine Bevcon (Sauvé, 1985; Sauvé et al., 1993). Ils font de 10 à 30 m d’épaisseur et ont été reconnus en forage sur une longueur de 2,2 km. Leur direction générale est 085° avec un pendage qui varie de subvertical à 75° vers le nord (Sauvé, 1985). Sharpe (1968) et Sauvé (1985) soulignent que les dykes de porphyre feldspathique de la région de Louvicourt sont surtout abondants dans les zones de failles et qu’ils sont communément associés aux veines aurifères de quartz-tourmaline. Plusieurs dykes de porphyres à phénocristaux de feldspath ou de quartz-feldspath (2 à 6 mm de diamètre) de 20 à 30 m d’épaisseur en moyenne sont localisés dans la partie nord des feuillets 32C02 et 32C03, ainsi que dans le secteur à l’est du lac Simon (Rocheleau et al., 1997). Il pourrait s’agir de la même famille de dykes que celle décrite à la mine Bevcon.

L’unité nAbev3 se distingue facilement des autres unités du Pluton de Bevcon par la présence de gros phénocristaux de plagioclase (de 15 à 35 %) de ~1 cm et de phénocristaux de quartz plus petits (de 5 à 10 %) qui baignent dans une matrice aphanitique gris foncé (Sauvé, 1985; Sauvé et al., 1993). La tonalite porphyrique (nAbev3) est métamorphisée et constituée du même assemblage minéralogique secondaire que la tonalite de l’unité nAbev2. La roche est peu déformée, variant de massive à schisteuse lorsqu’altérée. Les phénocristaux de feldspath sont constitués d’albite relativement claire avec ~5 % d’inclusions microscopiques de séricite et de calcite. Les minéraux ferromagnésiens, peu abondants, sont entièrement altérés en chlorite-quartz-épidote-calcite-rutile. La matrice est un agrégat de quartz-albite-chlorite et contient des traces d’apatite. Avec le développement de la schistosité, la séricite bien orientée devient abondante autour des grains de feldspath et dans les plans de foliation. Les roches les plus altérées contiennent 15 % de séricite, 5 à 10 % de carbonate et 1 % de pyrite (Sauvé, 1985).