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Suite d’Hutton
Étiquette stratigraphique : [arch][ppro]hut
Symbole cartographique : ApPhut
 

Première publication : 22 mars 2018
Dernière modification : 31 octobre 2023

 

 

 

 

 

Subdivision(s) informelle(s)
La numérotation ne reflète pas nécessairement la position stratigraphique.
 
ApPhut2 Norite à grenat, grenatite et webstérite à olivine
ApPhut1 Anorthosite à orthopyroxène, clinopyroxène et hornblende

 

 

 
Auteur(s) :Wardle et al., 1993
Âge :Archéen; Paléoprotérozoïque
Stratotype :Aucun
Région type :Région de Grenfell Sound (feuillet SNRC 25A)
Province géologique :Province de Nain
Subdivision géologique :Domaine lithotectonique de Burwell
Lithologie :Roches intrusives mafiques métamorphisées
Catégorie :Lithodémique
Rang :Suite
Statut :Formel
Usage :Actif

 

 

 

 

 

Historique

Taylor (1979) rapporte initialement la présence de lentilles anorthositiques gneissiques à la marge occidentale des gneiss archéens de la Province de Nain. Van Kranendonk et Wardle (1996) cartographient la suite sur presque 400 km de long sur la majeure partie de son étendue (à l’exception de la région de Circle Mountain, feuillets 14L12 et 14L13). C’est Wardle et al. qui introduisent, en 1993, le terme Suite d’Hutton, d’après la péninsule éponyme dans la région de Home Island (feuillet 25A01), au Labrador. Selon eux, cette suite est affectée à la Province de Nain car elle est localisée en plein dans la Zone de Cisaillement de Komaktorvik. Néanmoins, l’absence d’âge de mise en place et sa localisation à la limite du Domaine de Burwell et de la Province de Nain ne permettent pas de trancher. Verpaelst et al. (2000) introduisent la dénomination Complexe d’Iberville pour regrouper les gneiss anorthositiques et les gneiss granulitiques affleurant à l’est du Complexe de Tasiuyak, dans le secteur de Circle Mountain (feuillets 14L13 et 14L12). Mathieu et al. (2018) rapportent des bandes d’anorthosite et de norite dans le même secteur, mais s’en tiennent à l’ancienne dénomination pour la phase mafique, les phases felsiques à orthopyroxène étant rattachées à la Suite de Killinek.

Description

Ermanovics et Van Kranendonk (1998) rapportent une unité composée essentiellement d’anorthosite, mais aussi d’anorthosite gabbroïque, de diorite et de quantités mineures d’amphibolite et de lentilles ultramafiques en lambeaux tectoniques au contact entre les provinces de Nain et de Churchill. Les lithologies anorthositiques sont décrites comme blanches, grenues, foliées à gneissiques et localement stratifiées. Van Kranendonk et Wardle (1996) décrivent une anorthosite dont l’aspect passe de grenu et subophitique à cristaux bleutés de labradorite dans sa partie orientale, à un gneiss granoblastique à grain moyen et blanc dans le secteur occidental à proximité de l’isograde des granulites. Ils observent également un litage magmatique primaire préservé dans les zones moindrement déformées, avec localement des cristaux automorphes d’hyperstène de 60 cm de diamètre. Selon ces auteurs, le faciès de gabbro anorthositique domine.

Verpaelst et al. (2000) et Mathieu et al. (2018), à proximité du Mont-Iberville, donc dans le secteur affecté par la déformation la plus importante, cartographient des bandes hectométriques d’anorthosite interlitées avec des gneiss granulitiques. La patine et la cassure fraiche arborent une teinte blanche caractéristique de la recristallisation du plagioclase. Les échantillons peuvent également avoir une teinte beige en surface altérée et une couleur olive en cassure fraiche. L’aspect général est rubané et décrit comme gneissique (Verpaelst et al., 2000), protomylonitique (Mathieu et al., 2018) à mylonitique, mais la structure ignée est toujours visible. Le rubanement compositionnel centimétrique à métrique est défini par la variation de la proportion de minéraux mafiques en trait.

Suite d’Hutton 1 (ApPhut1) : Anorthosite à orthopyroxène, clinopyroxène et hornblende

 

Unité composée d’anorthosite, d’anorthosite quartzifère et de leuconorite, toutes fortement magnétiques. Ces lithologies alternent en bandes centimétriques à métriques et offrent les mêmes caractéristiques pétrographiques. La proportion de minéraux mafiques varient de 5 à 25 %, celle du quartz de 0 à 10 %. Le plagioclase forme de larges plages centimétriques partiellement recristallisées à grains fin à moyen, aux macles déformées et à extinction ondulante. Le plagioclase est légèrement séricitisé. Les phases mafiques principales sont la hornblende verte et l’orthopyroxène. Elles se regroupent en lamines discontinues et en amas globulaires étirés (en trait) de dimension millimétrique. Dans l’ensemble, la hornblende verte se développe en bordure des amas et l’orthopyroxène se trouve au coeur. Ce dernier est partiellement remplacé par de l’iddingsite, des carbonates et des oxydes, tandis que la hornblende est entourée de symplectite de clinopyroxène-plagioclase. De la biotite brun-rouge est parfois observée en marge des amas. Elle est généralement squelettique. Le quartz est recristallisé en spectaculaires tiges avec un ratio atteignant localement 8:1, composées de cristaux xénomorphes à extinction roulante. Les phases accessoires sont les minéraux opaques, l’apatite, le zircon, le sphène, le clinopyroxène, l’iddingsite, les carbonates, le spinelle vert (hercynite?) et le grenat. Le grenat est poeciloblastique à symplectite de quartz ou de plagioclase non maclé.

Suite d’Hutton 2 (ApPhut2) : Norite à grenat, grenatite et webstérite à olivine

Cette unité a été introduite pour discriminer les bandes plus riches en minéraux mafiques (plus de 50 %). Elle est composée de roches d’aspect similaire, dominées par une norite à grenat et incorporant des quantités mineures de grenatite et de webstérite à olivine.

La norite est mésocrate à mélanocrate. Elle arbore une couleur vert sombre tant en patine qu’en cassure fraiche. Elle est fortement magnétique. Les minéraux mafiques sont dominés par l’orthopyroxène. Le grenat est poeciloblastique à couronne de décompression de plagioclase granoblastique. On remarque également la présence de symplectite de plagioclase-pyroxène en couronne autour des amphiboles. L’orthopyroxène est serpentinisé, partiellement remplacé par de l’iddingsite. La hornblende verte est la phase mafique dominante, elle est légèrement corrodée et définit la foliation. La matrice est composée de plagioclase (moins de 20 %), d’orthopyroxène et de clinopyroxène (moins de 5 %) granoblastiques. Les phases accessoires sont les minéraux opaques (magnétite) et l’apatite.

Des boudins ultramafiques métriques de webstérite à olivine ont été localement observés. La roche est composée de cristaux lépidoblastiques d’actinote (50 %) et granoblastique d’orthopyroxène, d’olivine (15 %) et de minéraux opaques.

Des bandes métriques à décamétriques de grenatite ont été observées. La grenatite se retrouve également en boudins dans l’anorthosite. Le grenat forme des poeciloblastes de 2 à 5 mm à nombreuses inclusions de pyroxène, de quartz et d’apatite. Il s’accompagne d’une couronne de plagioclase, impliquant une décompression rapide lors du métamorphisme rétrograde.

Épaisseur et distribution

La Suite d’Hutton a été reconnue sur au moins 350 km (Wardle et al., 1992 et 1993), selon une bande orientée nord-sud qui s’étend de l’ouest de la Baie d’Okak (région de north-River, feuillet 14L) à l’île de Killinek (feuillet 25A07). Le corps principal fait 110 km de longueur sur 3 km de largeur apparente (Van Kranendonk et Wardle, 1996).

Datation

Taylor (1979) suppose un âge paléoprotérozoïque tandis que Wardle et al., (1993) préfèrent une origine archéenne tout en soulignant son aspect atypique qui diffère grandement des anorthosites archéennes de la Province de Nain. Ils s’appuient sur l’abondance d’anorthosite dans la Province de Nain et sa relative rareté dans la Province de Churchill. Ils se basent également sur la présence de mobilisat trondhjémitique (Ryan et al., 1991) semblable à celui des gneiss archéens du Nain coupant l’anorthosite. Néanmoins, ce mobilisat pourrait aussi bien être issu d’un épisode métamorphique ultérieur, comme celui affectant le Domaine de Burwell (granite d’anatexie daté à 1843 Ma, Bertrand et al., 1993). La question reste ouverte.

Des datations isotopiques ont permis de définir un âge de mise en place de l’anorthosite antérieur à 1804 Ma ainsi qu’un âge métamorphique à 1781 Ma (Scott et Machado, 1995) sur trois échantillons prélevés sur la péninsule d’Hutton (région de Home island, feuillet 25A01). Une injection de granite rose coupant l’anorthosite a rapporté un âge interprété comme celui de cristallisation à 1804 ±3 Ma par la méthode U-Pb sur un unique zircon, ainsi qu’un âge concordant sur monazite à 1793 ±3 Ma. Des injections tonalitiques considérées comme un produit de fusion des gneiss encaissants retournent un âge de cristallisation de 1781 ±3 Ma sur un seul zircon par la méthode U-Pb. L’analyse U-Pb sur les rares zircons de l’échantillon d’anorthosite donne deux âges concordants et similaires à l’âge de cristallisation du liquide de fusion partielle à 1781 ±2 Ma et à 1780 ±3 Ma. La date de 1781 Ma est interprétée comme l’épisode de métamorphisme au faciès des amphibolites ayant généré le liquide trondhjémitique.

Relation(s) stratigraphique(s)

La Suite d’Hutton s’intercale entre les gneiss du Complexe de Noodleook, les intrusions à orthopyroxène de la Suite de Killinek et les diatexites du Complexe de Tasiuyak. Ermanovics et Van Kranendonk (1998) proposent un contact tectonique, lié à l’orogenèse des Torngat, entre la Suite d’Hutton sous forme d’écailles et les roches environnantes du Churchill, en assumant que la suite appartient au Nain. Van Kranendonk et Wardle (1996) supposent plutôt une mise en place sous forme de sills; ils rapportent des contacts nets avec les gneiss environnants. Les contacts avec les autres unités n’ont pas été observés lors des campagnes de cartographie des étés 1998 (Verpaelst et al., 2000) et 2017 (Mathieu et al., 2018).

Paléontologie

Ne s’applique pas.

Références

 

Publications accessibles dans SIGÉOM Examine

MATHIEU, G., LAFRANCE, I., VANIER, M.-A., 2018. Géologie de la région de pointe Le Droit, Province de Nain et sud-est de la Province de Churchill, Nunavik, Québec, Canada. MERN; BG 2018-07, 4 plans.

VERPAELST, P., BRISEBOIS, D., PERREAULT, S., SHARMA, K. N. M., DAVID, J., 2000. Géologie de la région de la rivière Koroc et d’une partie de la région de Hébron, 24I et 14L. MRN; RG 99-08, 62 pages, 10 plans.

 

Autres publications

BERTRAND, J.M., RODDICK, J.C., KRANENDONK, M.J., ERMANOVICS, I. 1993. U-Pb geochronology of deformation and metamorphism across a central transect of the Early Proterozoic Torngat Orogen, North River map area, Labrador. Revue canadienne des sciences de la Terre,  volume 30 (7): pages 1470-1489. https://doi.org/10.1139/e93-127

ERMANOVICS, I., VAN KRANENDONK, M.J. 1998. Geology of the Archean Nain Province and Paleoproterozoic Torngat Orogen in a transect of the North River-Nutak map areas, Newfoundland (Labrador) and Quebec. Commission géologique du Canada, Bulletin 497, 156 pages, 7 plans. https://doi.org/10.4095/209574

RYAN, B., KROGH, T.H., HEAMAN, L., SCHÄRER, U, PHILIPPE, S., OLIVER, G. 1991. On recent geochronological studies in the Nain Province, Churchill Province and Nain Plutonic Suite, north-central Labrador. In: Current Research, Newfoundland Department of Mines and energy, Mineral Development Division; Report 91-1, pages 257 à 262. https://www.gov.nl.ca/iet/files/mines-geoscience-publications-currentresearch-1991-ryan-compiler.pdf

SCOTT, D.J., MACHADO, N. 1995. U-Pb geochronology of the northern Torngat Orogen, Labrador, Canada: a record of Palaeoproterozoic magmatism and deformation. Precambrian Research, Volume 70, Issues 3-4, pages 169-190. https://doi.org/10.1016/0301-9268(94)00038-S

TAYLOR, F.C. 1979. Reconnaissance geology of a part of the Precambrian Shield, northeastern Quebec, northern Labrador and northwest Territories. Geological Survey of Canada; Memoir 393, 99 pages and 19 maps. https://doi.org/10.4095/124930

VAN KRANENDONK, M.J., WARDLE, R.J. 1996. Burwell domain of the Palaeoproterozoic Torngat Orogen, northeastern Canada: Tilted cross-section of a magmatic arc caught between a rock and a hard place; In: Geological Society London Special Publications 112(1): pages 91-115.
https://doi.org/10.1144/gsl.sp.1996.112.01.06

VAN KRANENDONK, M.J., WARDLE, R.J., MENGEL, F.C., SCOTT, D.J. 1992. Geological mapping in the Torngat Orogen, northernmost Labrador: preliminary results. In: Current Research, Newfoundland Department of Mines and energy, Mineral Development Division; Report 92-1, pages 413-430. https://www.gov.nl.ca/iet/files/mines-geoscience-publications-currentresearch-1992-wardle.pdf

WARDLE, R.J., VAN KRANENDONK, M.J., MENGEL, F.C., SCOTT, D.J., SCHWARZ, S., RYAN, B., BRIDGWATER, D. 1993. Geological mapping in the Torngat Orogen. Northernmost Labrador: Report 2. In: Current Research, Newfoundland Department of Mines and Energy, Geological Survey Branch, Report 93-1, pages 77-89. https://www.gov.nl.ca/iet/files/mines-geoscience-publications-currentresearch-1993-wardle.pdf

 

Citation suggérée

Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF). Suite d’Hutton. Quebec Stratigraphic Lexicon. https://gq.mines.gouv.qc.ca/lexique-stratigraphique/province-de-nain/suite-hutton [cité le jour mois année].

 

Collaborateurs

Première publication

Guillaume Mathieu, ingénieur géologue, M. Sc. guillaume.mathieu@mrnf.gouv.qc.ca (rédaction)

Mehdi A. Guemache, géo., Ph. D. (coordination); Simon Auclair, géo., M. Sc. (lecture critique et révision linguistique); Céline Dupuis, géo., Ph. D. (version anglaise); André Tremblay et Nathalie Bouchard (montage HTML). 

 
22 mars 2018